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RECHERCHES
ANAT0M1QUES , PATHOLOGIQUES ET THÉRAPEUTIQUES,
SUR I.A MALADIF. CONNUE SOUS LE NOM
ni
FIÈVRE TYPHOÏDE.
II.
RECHERCHES
INATOMIQUES, PATHOLOGIQUES ET THÉRAPEUTIQUES
SUR T. A MALADIF CONNUE SOIS LES NOMS
DI
FIÈVRE TYPHOÏDE,
PUTRIDE, ADYNAMIQIE, ATAXIQUE, BILIEUSE, MUQUEUSE,
GASTRO-ENTÉRITE, ENTÉRITE POLL1CULEUSE, DOTUTNENTÉ&IE , ETC.
COMPARSE AVEC LES MALADIES AIGOE8 LBS PLIS ORDINAIRES.
Par P.C. -A. LOUIS,
de l'Itôlel-Dieuj, uiédei in en chef des epidemips du département de la Seine, président perpétuelde la So'-iélc médicale d'obaenalioii de Paris, membrede l*Aeadémie rn\nie il. ■ . ■ • • I • ■ ■ i ■ i . ■ de li m me tille, membre honoraire de la Société médicale du liasaacliiuelt, de relie d'Edimbourg, de l'Association provinciale médicale ei chirurgicale de VTorcceler, a»si,e.r du Collège dci médecin! de Pbiladelphiei de la SociéU médicale de la même fille, d>- l'Aca- démie de Saint-Pétersbourg, des So";éié> de médecine de Beidelberg ci de Bruges, de la So- - médicale d'observation de Boston.
■ Je .lois que la vérité est dam ta cl"te*, et non <tnn« I fprit qui le* jugtt et que oubli _/'< iiied rfu mien m Us jugementê qw- j'en porie^ /'/us je >uls sûr d'a/rpri • Euitî.
DEUXIÈME EDITION, CONSIDÉRABLEMENT AUGMENTÉE. TOME SECOND.
A PARIS, CHEZ J.-B. BAILLIÈRE,
LIBRAIRE DE I.'ACADÉMIE ROYALE DE MÉDECINE, «le hé l'école de médecine, n.. ]".
A LONDRES, CHEZ H. BAILLIÈRE, 210. REGENT STREET.
1841.
RECHERCHES
ANATOMIQUES, PATHOLOGIQUES ET THÉRAPEUTIQUES
SUR LA MALADIE CONNUE SOUS LES NOMS
FIÈVRE TYPHOÏDE,
PUTRIDE, ADYNAMIQUE, ATAXIQUE, BILIEUSE, MUQUEUSE, GASTRO-ENTÉRITE, DOTHTNENTÉRIE, ETC.
TROISIÈME PARTIE.
DESCRIPTION DES SYMPTOMES.
ARTICLE VII.
Des symptômes cérébraux.
Céphalalgie, somuolencc, de'lire, mouvements spasmodiques, cUi des forces.
§ 1.
Do la céphalalgie.
1» Chez les sujets morts dJ affection typhoïde.
A quatre exceptions près, la céphalalgie eut lieu chez tous les sujets (obs. 15, 1S, 28, 51), presque toujours continue, rarement bornée aux redoublements du soir. Elle augmen- tait par degrés dans certain cas , était uniforme dans le grand nombre , et débuta avec les premiers symptômes de H 1
2 3« PAKT1E, sïMPTÔMtS.
l'affection , si ce n'est chez trois malades qui n'en éprouvè- rent qu'à partir des deuxième, troisième et quatrième jour (obs. 5 , 6, 21 ). Elle finissait aux approches du délire , ou quand l'assoupissement se déclarait ; ce qu'on ne pouvait pas toujours attribuer à une perception incomplète , plusieurs malades accusant des douleurs dans diverses parties du corps, en même temps qu'ils assuraient ne plus avoir de cé- phalalgie. Le délire passé, le mal de tête ne reparaissait plus. Le caractère et le degré de la céphalalgie n'étaient pas toujours les mêmes. Ordinairement gravative , elle était quelquefois tensive, occupait peu les malades, à quelques exceptions rares près. Très intense chez une femme qui succomba au douzième jour de l'affection, au point de lui faire désirer la mort, elle était encore dans toute sa vigueur, chez le même sujet, deux jours avant le terme fatal ; et le cerveau était dans l'état naturel (obs. 8).
2° Chez les sujets atteints d'affection typhoïde, qui ont guéri.
Deux sujets, sur cinquante-sept dont la maladie fut grave, n'eurent point de mal tête; et si l'on en excepte huit, chez lesquels la céphalalgie débuta du troisième au douzième jour de l'affection, elle eut lieu avec les premiers symptô- mes. Sa durée la plus ordinaire était de huit à dix jours, ses termes extrêmes de quatre et vingt. Elle cessait presque constamment deux ou trois jours avant l'admission des ma- lades à l'hôpital, quand l'assoupissement commençait, ou quelques jours avant. Son caractère, ses degrés, sa marche progressive ou son état stationnaire, sa continuité, ses exas- pérations, furent les mêmes que dans les cas où l'issue de la maladie avait été funeste. — Trois fois je l'ai vu dispa- raître ou diminuer notablement, au cinquième jour de sa durée, à la suite d'une saignée du pied.
CEPHALALGIE. S
La céphalalgie n'a manqué que chez un des trente sujets dont l'affection fut légère. Trois d'entre eux n'en éprouvè- rent que cinq à six jours après le début. Elle ne fut consi- dérable que dans un cas, et le premier jour de la maladie seulement.
La céphalalgie , dont l'existence est difficile à constater dans le premier âge , au moins dans un grand nombre de cas, la céphalalgie, d'après les faits recueillis par MM. Ril- liet et Taupin, serait à peu près aussi fréquente avant qu'a- près quinze ans. M. Rilliet n'a pu s'assurer de l'existence ou du défaut de ce symptôme dans la sixième partie des cas ; M. Taupin affirme que la céphalalgie a existé chez tous les enfants dont il a recueilli l'histoire, à part trois ; toujours bornée à la région frontale, à une exception près ; très rare- ment aiguë, ordinairement gravative, bien que dans quatre cas néanmoins il y ait eu photophobie. M. Rilliet n'a ja- mais observé la céphalalgie à un haut degré, et il considère ce haut degré de la céphalalgie comme un moyen de dia- gnostic important, pour ne pas confondre les maladies céré- brales de l'enfance avec l'affection typhoïde ; ce qui n'est guère moins vrai d'ailleurs, dans l'âge adulte.
Il résulte aussi des faits recueillis par le même médecin, que la céphalalgie a lieu dès le début de l'affection dans l'enfance , et qu'elle cesse après une durée de sept à dix jours. Une seule fois, M. Taupin Ta vue momentanément soulagée par des épistaxis survenues dans le cours de la maladie.
3° Chez les sujets morts d'autres maladies aiguës.
La céphalalgie n'a eu lieu que chez la moitié des sujets qui ont succombé à d'autres maladies aiguës, et elle s'est montrée un peu plus fréquemment chez les péripneumo-
4 3' PARTIT, SïMH'JMKS.
niques que chez les individus atteints d'autres affections. Elle fut moins intense et de moins longue durée dans les cas dont il s'agit, que dans le cours de l'affection typhoïde.
A' Chez les sujets atteints d'autres maladies aiguës, qui ont
guéri.
Huit péripneumonigues, sur cinquante-sept, n'eurent pas de céphalalgie. Elle se manifesta dès le début chez les au- tres, et ne se prolongea pas au-delà de huit jours.
Onze varioleux, sur douze, l'ont éprouvée dès le com- mencement de l'affection, terme moyen pendant six jours.
Elle a manqué dans cinq cas, sur dix-neuf, de scarlatine. Toujours peu considérable, elle débuta le premier jour de la maladie, à deux exceptions près, et sa durée fut or- dinairement de six à sept.
Trois des treize sujets atteints de rougeole en furent exempts. Elle se manifesta avec les premiers symptômes de- l'affection dans les deux tiers de cas ; et elle fut légère dans tous.
Rarement intense chez les sujets affectés d'angine guttu- rale, elle n'en épargna que quatre sur trente-sept -, ayant lieu presque constamment dès le début, pendant cinq jours, terme moyen.
Je ne l'ai observée que dans la troisième partie des cas d^ rhumatisme. Ordinairement de peu de durée, elle persista plus que dans les affections précédentes, chez quelques su- jets.
De soixante-douze malades atteints de catarrhe pulmo- naire , quatre seulement n'eurent pas de céphalalgie; mais elle ne se manifesta, chez un grand nombre, que pendant la toux. Elle débuta, chez vingt-quatre, du quatrième au vingtième jour de l'affection.
CÉPHALALGIE. S
Vingt-huit sujets, sur les quatre- vingl-quafre qui fur< ni. affectés d'entérite , n'eurent pas de mal de tète, que la ma- ladie fût grave ou légère. Ce mai de tète débuta à une époque éloignée de l'apparition des premiers symptômes, dans quinze cas. — Ainsi, môme sous le rapport de cé- phalalgie, on trouve une différence remarquable entre l'af- fection typhoïde la plus légère, et l'entérite proprement dite. Mais, dans ces affections comme dans les autres, il y eut un rapport presque constant entre le degré du mouve- ment fébrile, la fréquence et l'intensité de la céphalalgie.
Ce qui eut lieu dans les cas de colique de plomb est con- forme à ce fait, et montre que le rapport dont il s'agit est une loi. Treize, ou seulement la sixième partie des sujets qui furent atteints de la colique saturnine , eurent de la céphalalgie, pendant deux ou trois jours, presque constamment à un faible degré, et à une époque plus ou moins éloignée du début de l'affection. — Cette rareté de la céphalalgie , dans le cours d'une maladie ausssi dou- loureuse, ne peut guère s'expliquer, ce me semble, que par le défaut de lièvre.
Ainsi , la céphalalgie est un des symptômes les plus or- dinaires des maladies aiguës fébriles de toute espèce ; mais elle est plus fréquente chez les sujets atteints d'af- fection typhoïde que chez ceux qui sont affectés dune autre maladie; et comme elle est presque constante chez les premiers, comme elle débute aussi , chez eux, avec les premiers accidents , son absence, au début d'une maladie fébrile dans laquelle les autres symptômes d'une affec- tion typhoïde manqueraient, cette absence serait l'indice que très probablement on a affaire à une maladie autre que l'affection typhoïde.
6 3e PARTIE, SYMPTÔMES.
§2. De la somnolence.
1° Chez les sujets morts d'affection typhoïde.
La somnolence eut lieu dans tous les cas, hors cinq, ou chez les huit neuvièmes des sujets (obs. 2, 8, 12, 24, 44), et elle offrit de grandes variétés relativement à son début , à son intensité et à sa durée.
Elle débuta, le premier jour de l'affection, chez quatre sujets qui moururent les vingt-unième, vingt-deuxième, vingt huitième juur (obs. 1, 7, 21, 39); du troisième au sixième, chez cinq autres (obs 2, 8, 12, 24, 44); aune époque plus éloignée, et, à une exception près, toujours avant le délire, chez le reste des individus.
Faible à son début dans tous les cas , même dans ceux où elle s'est offerte au plus haut degré, dans la suite, la somnolence conserva ce caractère dans tout le cours de la maladie chez un petit nombre de sujets, devint promptement considérable chez la plupart , au point qu'on pouvait découvrir la poitrine de plusieurs d'entre eux, leur lAler le pouls, pratiquer l'auscultation, leur parler à assez haute voix , sans les réveiller.
Une fois déclarée , la somnolence persistait presque sans interruption, à part les moments de délire, jusqu'à la mort,- de manière qu'elle n'a cessé, de quatre à quinze jours avant cette époque, que chez sept malades, presque tous emportés après le trentième jour (obs. 15, 16, 17, 18 28,34, 43).
Dans cet état, l'exercice des facultés intellectuelles était fort lent, les malades y répugnaient; plusieurs d'entre eux, pour peu que les questions se prolongeassent, donnaient
SOMNOLENCE. 7
des marques d'humeur; et, quand l'assoupissement était considérable, ils y retombaient aussitôt qu'on cessait de les interroger. Us étaient indifférents à tout ce qui se passait au- tour d'eux, et cette indifférence était surtout très sensible chez un certain nombre de femmes qui perdaient tout senti- ment de pudeur, etse laissaient découvrir la poitrine et l'abdo- men sans opposition. Alors aussi la figure était sans expres- sion, les traits immobiles; il y avait stupeur dans la moi- tié des cas.
L'observation suivante est une de celles où la somnolence s'est montrée au degré le plus remarquable.
XXXIII™ OBSERVATION.
Constipation, diminution de l'appétit, douleurs dans les membres, puis diarrhée, chaleur, frisson, le'ger délire, assoupissement successive- ment plus profond, mc'te'orisme considérable ; mort au vingt-hui- tième jour. — Cerveau sain, muqueuse gastrique ramollie, rouge, ulcérée ; plusieurs plaques dures, ulcérées ou non ulcérées dans l'i- léum ; glandes mésentériques correspondantes volumineuses, ra- mollies, d'un rouge violet ; reins, rate, foie, ramollis.
Un serrurier, âgé de vingt-sept ans , petit , large, fort , cheveux noirs, peau bien colorée, muscles bien dessi- nés, fut admis à l'hôpital de la Charité, le 21 juillet 1823. A Paris depuis sept mois , il s'y était mal nourri pendant les quatre premiers, faute d'ouvrage; il accusait quinze jours de maladie, | avait continué à travailler jusqu'au 18 juillet, disait avoir ou , dix années avant cette époque, une mala- die grave avec délire, dont il ne se rappelait aucun autre symptôme.
Au début : céphalalgie, douleurs lombaires, diminution de l'appétit, constipation. Ces symptômes continuèrent, des douleurs de ventre s'y joignirent dans les quatre derniers
8 3* PAR TIF, SYMPTOMES.
jours; à la même époque l'anorexie fut complète, la consti- pation fit place à la diarrhée , qui parut à la suite d'une dé- coction très chaude donnée au malade par un pharmacien; il y eut des sueurs nocturnes, et de légers frissons dans la soirée. Le sommeil fut toujours assez bon , et des étourdis- sements, qui avaient précédé l'affection de quinze jours, n'avaient pas sensiblement augmenté depuis. — Le malade avait mangé, jusqu'au 18, un peu de viande, sans en être incommodé; et une demi-bouteilje devin, prise la veille de son admission à l'hôpital, parut augmenter la diarrhée , sans exciter ni douleurs à l'épigastre, ni nausées.
Le 22J, la ligure était médiocrement colorée, naturelle d'ailleurs, le sommeil paisible; il y avait de légères douleurs dans les lombes et dans les membres inférieurs , la langue étaitfun peu rouge au pourtour, villeuse et jaunâtre au cen- tre, bien humide; la soif vive, l'anorexie complète, sans dégoût, l'épigastre légèrement sensible à la pression; le malade avait eu au moins douze selles pendant la nuit, sans la moindre colique : il avait expectoré quelques crachats clairs et avait un peu de toux depuis quatre jours ; un peu de râle sec et sonore existait dans l'inspiration; le pouls était ré- gulier, assez large, à quatre-vingt-huit; la chaleur fran- che et élevée , avec une sueur légère ; le malade se plai- gnait de sa faiblesse et ne demandait qu'à être délivré de son dévoiement (Tis. d'orge éd. ; lac. lin ter).
Il eut quatre selles dans la journée, et un peu de délire pendant la nuit. Le -23 , à l'heure de la visite, il ne se le rap- pelait pas, témoignait des craintes sur l'issue de sa maladie et sur l'effet de la saignée qu'on lui prescrivait; sa langue était moins humide que la veille; il n'y avait aucun autre changement. [Saignée de 3(>o gramme» ; orge hl. ; lav. I<n.
Le sang ne prit ancuu reliait et se couvrit d'une couenne
sOUNOI ISCV. 9
assez épaisse , demi-transparente , peu consistante. L'assou- pissement fut continuel dans la journée, il y eut du délire et de l'agitation pendant la nuit. Le 24, la physionomie n'offrait rien de remarquable , la langue était aride , le ven- tre météorisé, indolent; le pouls à quatre-vingt-seize, quel- quefois intermittent; la chaleur sèche et élevée. {Quinze sangsues à l'anus.)
L'assoupissement fut considérable le jour, et le délire à peu près au môme degré que la veille, pendant la nuit. Le 25 : stupeur légère, surdité commençante ; le malade ne se rappelle pas où les sangsues ont été appliquées; la langue et l'abdomen sont dans le même état que la veille. ( Petit lait\ lav. ém. ; vésic.)
Les 26 et 27 , l'assoupissement est continu et toujours croissant , le malade délire la nuit , a l'ait distrait , tient des propos incohérents à l'heure de la visite ; son pouls est régu- lier, à quatre-vingt-dix-huit , ri a quelques stries rouges sur les yeux, des douleurs aux vésicatoires ; la sécheresse de la langue et le météorismesont les mômes que les jours pré- cédents. (Douze sangsues aux oreilles , le 27.)
Aucune amélioration ne suivit la perte de sang, qui fut médiocrement abondante. Le 28, on ne pouvait réveiller le malade , tant l'assoupissement était profond ; son pouls était redoublé, tremblotant, à cent-huit; sa langue un peu moins sèche que la veille , son ventre très météorisé ; ses selles étaient peu fréquentes : les taches roses lenticulaires, obser- vées le 26 , étaient plus nombreuses , et la faiblesse très considérable. {Glace sur la tête; sinap. aux membres infé- rieurs. )
On prescrivit encore de la glace le lendemain, sans le moindre succès. Le 3o, à l'heure de la visite , on ne pou- vait qu'à grande peine obtenir quelques monosyllabes du
10 3r PAR.TII, SYMPTÔMES.
malade, on le découvrait," on auscultait sa poitrine, sans faire cesser l'assoupissement; la langue était sèche et rouge antérieurement , encroûtée en arrière ; le ventre ballonné ; le pouls petit, régulier, à cent-seize, la chaleur élevée; la respiration fréquente. (Lim. bis.; petit-lait; quatre liv. de glace sur la tête; poudre de kk. sur les vésicatoires.)
Dans la soirée , après la fonte de la glace , la figure était très rouge, l'assoupissement toujours profond, la chaleur intense , le pouls d'une extrême mollesse. Le 31 , la figure était un peu bouffie, le malade faisait des efforts impuis- sants pour parler ; il avait de la dysphagie, de larges suda- mina au cou , et les taches roses lenticulaires de l'abdomen étaient élargies ; un peu de râle sonore ou muqueux exis- tait à droite et à gauche de la poitrine ; on entendait des grognements continuels. (Lav. de camotn. camph.)
Il y eut des selles involontaires dans la journée. Le len- demain, je trouvai un râle sous-crépitant du côté gauche de la poitrine; le ventre était toujours très météorisé, un peu sensible à la pression du côté gauche , le pouls et l'assoupissement étaient comme à l'ordinaire.
Les symptômes étant les mômes le 2 août , on ordonna un vésicatoire au cou et une potion avec deux grammes d'extrait de quinquina.
Le malade prit par erreur la potion purgative d'un pein- tre, eut cinq selles sans vomissements et des sueurs copieu- ses. Le 3 : chaleur acre , sudamina énormes, semblables à de grosses gouttes d'eau. Mort à quatre heures de l'après- midi.
OUVERTURE DU CADAVRE DIX-NEUF HEURES APRES LA MORT.
f'.lal extérieur. Météorisme considérable; destruction in- complète de la peau dans quelques points de la plaie des
SOMNOLENCE. 11
vésicatoires des jambes; épaississement du môme organe dans les parties non ulcérées.
Tête. Peu desanget beaucoup d'air dans les veines cérébra- les; tissu sous-arachnoidien très légèrement injecté-, petite cuillerée de sérosité dans les ventricules latéraux; toute la masse encéphalique peu injectée, d'une bonne consistance.
Cou. Trachée-artère rouge, comme par suite de macé- ration.
Poitrine. Cœur d'un rouge pâle, très mou, facile à péné- trer. Aorte très rouge à l'intérieur , contenant quelques caillots de sang noirâtre; sa membrane propre, rouge, bien qu'à un médiocre degré, dans la moitié de son épais- seur. Nul épanchcment de sérosité dans le péricarde. — Poumons volumineux, légèrement engoués en arrière, d'ail- leurs sains.
Jbdomen. La cavité abdominale ne contenait pas d'air, et l'intestin , très météorisé, se précipitait à travers les inci- sions pratiquées à l'abdomen. — L'estomac était doublé de volume, contenait une médiocre quantité de liquide bru- nâtre , dans lequel nageaient beaucoup de petits corps noirs, dont une partie restait adhérente au mucus visqueux et épais qui tapissait la membrane muqueuse dans sa portion pylorique. Cette membrane était brune et extrêmement ramollie, sans augmentation d'épaisseur, dans le grand cul-de-sac ; rose el beaucoup moins ramollie ailleurs, où se trouvait un assez grand nombre de petites ulcérations super- ficielles. — Le duodénum offrait deux ulcérations sem- blables, de trois à quatre millimètres de diamètre. — L'in- testin grôle contenait peu de mucosités. Sa membrane interne était mince, grisâtre, sablée de noir, d'une bonne consistance, excepté dans son dernier tiers, où elle était ramollie. Près du ccecum . dans la longueur de 33 centi-
1- «5f l'ARTir, SYMPTÔMES.
nièlres, se trouvaient six ulcérations el plusieurs phqucs rouges, ovalaires, non ulcérées. Les ulcérations les plus considérables étaient les plus rapprochées du cœcum, au nombre de deux , de 200 millimètres de surface, jaunâtres et inégales. La membrane muqueuse était entièrement dé- truite dans le point correspondant, et la couleur jaune était due à la bile appliquée sur une matière blanchâtre, légèrement nuancée de jaune et de rose, épaisse de 2 à 3 millimètres, développée dans le tissu cellulaire, un peu friable à sa surface libre et dans tout son pourtour, de ma- nière qu'on la séparait aisément des parties environnantes. Dans ce point les fibres musculaires étaient un peu rouges et épaissies. Quant aux plaques non ulcérées, la muqueuse qui en faisait partie était épaissie, moins molle que dans les points intermédiaires, et le tissu placé au-dessous , sem- blable à celui qui vient d'être décrit, mais un peu moins épais, plus ferme et plus rose. — Le gros intestin conte- nait une médiocre quantité de matières fécales pultacées; sa membrane muqueuse était blanche et parfaitement saine, à part quelques taches rouges où elle était épaissie et ra- mollie. — Les glandes mesenlériqucs voisines du cœcum étaient volumineuses, violacées et ramollies; les autres, d'une couleur ardoisée, d'ailleurs saines. — Le foie était mou , d'un jaune verdàtre , et offrait , dans son épais- seur comme à sa surface, un grand nombre de taches rouges, de 100 à 120 millimètres de diamètre, anguleu- ses, comme étoilées, sans ramollissement. La vésicule biliaire contenait une grande quantité de liquide très visqueux. — La rate était doublée de volume , très ra- mollit'. — Les autres viscères sains.
Si l'assoupissement n'eut lieu qu'à une époque assez
sommm.i-.m;»:. 13
avancée de l'affection, il lit des progrès rapides, fut bientôt si considérable qu'on ne pouvait en tirer momentanément le malade -, et comme le cerveau n'offrait rien de remar- quable, il faut en chercher la cause ailleurs. On ne saurait la placer dans la membrane muqueuse de l'estomac , dont les lésions les plus graves, chez les sujets qui succombent à des maladies aiguës, différentes de celle dont il s'agit, ne sont pas accompagnées de somnolence. Il faut en dire au- tant des autres lésions secondaires, des divers ramollisse- ments, môme de celui de la membrane muqueuse de l'in- testin grêle intermédiaire aux plaques altérées , par les mêmes raisons ; du météorisme qui n'a pas lieu dans tous les cas de somnolence. En sorte qu'on arrive, par voie d'ex- clusion, à placer la cause de l'assoupissement dans l'altéra- tion spéciale des plaques de l'iîéum, ou dans la cause, quelle qu'elle soit, qui préside à leur développement; proposition rigoureusement vraie pour tous les cas, et sur laquelle je reviendrai dans le paragraphe suivant, au sujet du délire.
La marche de la maladie, obscure et incertaine dans la première moitié de son cours, puis rapide et accompagnée des symptômes les plus caractéristiques et les plus graves, mérite d'ailleurs d'être remarquée. Ce n'est effectivement qu'après douze jours d'un état dans lequel la perte des for- ces était trop peu considérable pour empêcher le malade de se livrer à ses occupations, qu'il éprouve un mouvement de fièvre bien prononcé, de la diarrhée , une extrême faiblesse et un manque complet d'appétit. Après quatre jours de ce nouvel état, le délire survient, puis la somnolence et le météorisme, l'un et l'autre promplement extrêmes : la veille de sa mort, quand il était au plus mal, le sujet prend, par erreur, la potion purgative d'un peintre, n'a que quelques selles dans la journée, sans vomissements; et, à Pouver-
14 3e PARTIE, SYMPTÔMES.
ture de son corps, on trouve la membrane muqueuse de les- tomac plus ou moins rouge et ramollie dans toute son éten- due , superficiellement ulcérée près du pylore 5 plusieurs plaques de l'iléum profondement altérées , ulcérées ou non ulcérées ; la membrane muqueuse de l'intestin grêle ramollie à un degré remarquable dans son dernier tiers; la rate, le cœur, le foie non moins ramollis : dernières lésions auxquel- les l'altération cadavérique commençante n'est probablement pas étrangère , comme on l'a vu dans la seconde partie de cet ouvrage.
On dirait, au premier abord, qu'il y a eu ici deux affec- tions :1a première, antérieure ; la seconde, postérieure au dévoiement; et l'on peut croire qu'à une époque encore peu éloignée de celle-ci, on aurait désigné la première sous le nom d'embarras gastrique, et la seconde sous celui de lièvre typhoïde. Mais un examen un peu approfondi des symptômes et des lésions, me semble repousser cette ma- nière de voir. Car, d'un côté, la constipation, ou la ré- gularité des selles, n'est pas très rare au début de l'affection typhoïde, qui peut rester latente dans tout son cours; et, de l'autre, l'altération des plaques elliptiques étant la plus profonde de celles qui ont été observées, doit être consi- dérée comme la plus ancienne, antérieure, par conséquent, à celle de l'estomac.
La lésion de l'intestin grêle avait d'ailleurs suivi sa mar- che accoutumée, les ulcérations des plaques elliptiques de l'ileum étant plus larges près de la valvule iléo-cœcale que dans tout autre point. Et il est remarquable que la mem- brane muqueuse des plaques non ulcérées n'était que mé- diocrement ramollie, que L'altération du tissu sous-mu- queu\ correspondant était profonde; en sorte qu'il n'est pus vraisemblable, comme je l'ai dit dans la première partie
SOMNOLENCE. 15
de cet ouvrage, que cette lésion fût consécutive à celle de la muqueuse; qu'on peut seulement admettre qu'elles se sont développées l'une et l'autre en môme temps.
N'oublions pas, en terminant, un fait important, je veux parler de l'absence de tout vomissement à la suite du drastique donné, par erreur, au malade, la veille de sa mort. A raison de l'état où était alors la membrane muqueuse de l'estomac, le fait semble d'abord avoir quelque chose d'extraordinaire ; mais il s'explique sans peine par l'assoupissement profond du sujet, et il devient une nouvelle preuve de la vérité de ce qui a été dit plus haut, de l'influence des accidents céré- braux sur les symptômes gastriques, dont ils empêchent le développement chez les sujets dont la membrane muqueuse de l'estomac est profondément altérée.
2° Chez les sujets atteints d'affection tjphoïde , qui ont guéri.
Huit, sur cinquante-sept sujets dont l'affection fut grave, n'eurent pas d'assoupissement manifeste. Et dans quarante cas où j'ai noté avec soin le début, la durée et le degré de ce symptôme, voici ce que j'ai observé. Il n'eut lieu, le pre- mier jour de la maladie, chez aucun individu. Un seul en fut affecté le deuxième. Il débuta les sixième et huitième chez deux autres, le plus ordinairement le neuvième; dans un cas extrême, le quarantième, et, terme moyen, le qua- torzième jour de l'affection. — Sa durée moyenne fut de huit jours ; les extrêmes de cette durée, un et vingt. Qua- tre sujets n'eurent d'assoupissement bien marqué que pen- dant vingt-quatre ou trente-six heures ; trois éprouvèrent ce symptôme pendant quinze, dix-huit et vingt jours. — Il fut profond dans la quatrième partie des cas, c'est-à-dire qu'alors les malades retombaient dans l'assoupissement
](i 3' l'Ali lit, SÏMPTOMJES.
d'où on les avait tirés par quelques questions, dès qu'on cessait de les interroger. Il était médiocre ou léger dans les autres, ordinairement continu-, et il remplissait les intervalles du délire quand celui-ci avait lieu, comme chez les indivi- dus dont la maladie eut une terminaison funeste.
Parvenu au summum de son développement, il dimi- nuait par degrés, de manière que je ne l'ai vu suivre une marche contraire , ou augmenter le dernier jour de sa durée , que dans un cas.
Dans ceux où l'affection fut légère, la somnolence man- qua assez fréquemment ; c'est à-dire que dix-neuf sujets seulement , sur trente-un , l'éprouvèrent à divers degrés, Elle était généralement beaucoup moins considérable , de moindre durée, plus tardive dans ces cas que dans les précédents. Elle débuta au cinquième jour chez un seul sujet ; aux septième et neuvième chez deux^autres , terme moyen , au dix-huitième jour de l'affection.
La somnolence est aussi un des symptômes le plus ordi- naire de l'affection typhoïde dans Yenfance; mais nous ignorons dans quelle proportion elle a lieu. Comme chez l'adulte la somnolence débute rarement chez les enfants avec les premiers symptômes de la maladie, de manière que M. Rilliet ne l'a observée, à celte époque, que chez deux sujets dont un a succombé. Et bien rarement , ajoute- t-il, la somnolence est aussi marquée avant qu'après quinze ans.
3» Chez les sujet* atteints d'autres maladies aiguës , qui ont succombe ou qui ont guéri.
Je n'ai recueilli d'exemple de somnolence chez les^sujels emportes par des maladies aiguës de cette espèce, que dans
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deux cas. Parmi ceux dont l'affection cul une heureuse issue , un péripneumonique éprouva ce symptôme à un remarquable degré , les huitième et neuvième jours de la maladie. Il débuta chez trois varioleux aux troisième et quinzième-, et l'on conçoit sans peine que la som- nolence jetterait aisément dans l'erreur, dans des cas ana- logues, si elle venait à se manifester avant 1 éruption , puis- que les symptômes généraux étant alors les mômes que dans beaucoup de cas d'affection typhoïde , on pourrait croire avoir affaire à cette maladie. Toutefois, comme dans l'affection typhoïde la somnolence débute bien rare- ment avant le quatrième jour , on devrait soupçonner , dans le cas où elle se manifesterait plus tôt , qu'elle est le sigiLe précurseur d'une lièvre eruptive. — - J'ai encore ob- servé la somnolence dans un cas de scarlatine, chez quelques sujets al teints à'érysipèle à la face, et chez deux autres affec- tés d'angine gutturale.— Il n'y eut ni somnolence ni stupeur dans les cas d'entérite proprement dite. Et si quelques-uns des quatre-vingt-quatre sujets qui furent atteints de cette maladie à divers degrés , eurent un peu de tendance au sommeil , ce fut seulement dans la proportion du nom- bre des selles et de l'affaiblissement qu'elles produisaient.
Chez aucun des sujets dont il s'agit , la somnolence n'a été comparable à ce qu'elle était ordinairement chez les malades atteints d'affection typhoïde, même à un fai- ble degré ; en sorte qu'il faut la considérer comme un des symptômes les plus caractéristiques de cette maladie.
Il
18 - 3' PARTIE, SYMPTÔMES.
§3.
Du délire. 1" Chez les sujets morts d'affection tyho'ide.
Le délire eut lieu chez sept des quarante-six sujets dont il s'agit. Les huit qui n'en offrirent pas succombèrent, pour la plupart, à la suite de la perforation de l'intestin grêle (obs. 8, 15, 20, 32 , 41 , 42, 43, 44 , 45). Deux autres ne l'eurent que de vingt-quatre à quarante-huit heures, à une certaine période de l'affection (obs. 2, 16). Je ne l'ob- servai que dans les deux ou trois derniers jours de l'exis- tence , chez deux sujets emportés aux vingt-troisième et vingt-quatrième jour de la maladie, comme cela est assez ordinaire chez ceux qui succombent à d'autres affec- tions aiguës (obs. 24, 37) : de manière qu'il serait exact de dire, à très peu de chose près, que sur quarante-six sujets emportés par l'affection qui nous occupe, trente-quatre seu- lement, ou les trois quarts environ , eurent du délire.
Ce symptôme offrait des différences remarquables rela- tivement au degré , au début et à la durée, môme -chez les malades qui succombèrent dans la môme période, du huitième au quinzième jour, par exemple.
Il fut accompagne dune violente agitation , surtout pondant la nuit, chez douze sujets qu'on fut obligé de main- tenir avec le gilet de force, la nuit seulement, ou le jour et la nuit, pendant un espace de temps plus ou moins considérable, suivant le ëegré de l'agitation. Et cette agi- tation fut si considérable chez un malade, que les liens 1rs plus nombreux suffisaient à peine pour le maintenir dans son lit , au dixième jour de l'affection . la veille de sa mort (obs. 9 . — Cette forme de délire était plus Fréquente chez
DELIRE. 19
les sujets emportés du huitième au vingtième jour de la ma- ladie, que chez ceux qui succombèrent plus tard; dans la proportion de six à treize pour les premiers , de six à vingt pour les seconds.
Au milieu de cette violente agitation, la plupart des ma- lades, dix sur douze, poussaient des cris, la nuit principale- ment, de manière à empêcher leurs camarades d'une même salle de dormir un instant. Ces vociférations insupportables, dont la durée offrit de nombreuses variétés, se prolongè- rent, sans interruption, du treizième au vingt-cinquième jour de l'affection , chez un sujet qui mourut à cette der- nière époque (obs. 30). Tant que cette extrême agitation durait, il était impossible d'obtenir quelque réponse des ma- lades ; ou bien elles étaient dune bizarrerie extrême. Ainsi l'un ne savait pas son nom, l'autre ignorait s'il était malade (obs. 3 , 38). Les mêmes individus témoignaient souvent beaucoup d'impatience, et l'un d'eux, avant d'être main- tenu avec le gilet de force, me frappait du poing pour m'empôcher de lui tàter le pouls.
D'autres, sans éprouver la même agitation, parlaient presque sans interruption pendant la nuit (obs, 1 , 10, 17, 2â) ; et, chez quelques-uns, au lieu de paroles intelligibles, c'était un grognement continuel , plus ou moins fort, pres- que aussi insupportable que les vociférations, qui se prolon- gait au milieu de l'assoupissement (obs. 3, 29).
I o fait fort digne d'attention d'ailleurs, c'est qu'un seul des dix malades qui poussèrent des cris plus ou moins vio- lents au milieu du délire, m'a offert, après la mort, quelques fausses membranes dans les voies aériennes; que chez au- cun il n'y eut destruction partielle del'épiglotte ; et que le sujet dont les vociférations se prolongèrent pendant quinze jours, avait le larynxet l'épiglotte dans l'état naturel. Preuve,
20 3* PARTIEj SYMPTÔMES.
entre mille , que les causes occasionnelles sont sans action , ou presque sans action , là où les causes prédisposantes n'existent pas.
Dans les autres cas , le délire avait principalement lieu pendant la nuit; il n'était pas continu , et l'on pouvait assez ordinairement fixer, pour quelque temps, l'attention des malades qui faisaient alors quelques réponses sensées. Mais leur attention se fatiguait promptemenl, et pour peu que l'interrogatoire se prolongeât , ils ne répondaient plus ad rem. — Quelques-uns , au milieu des symptômes les plus graves , répondaient se trouver bien \ espèce de perversion des sensations et du jugement que les pathologistes ont regar- dée, avec raison, comme un des signes les plus graves, et que je n'ai pas rencontrée parmi les malades qui ont guéri. — Une femme , qui mourut à une époque assez éloignée du début, parlait du danger qui la menaçait, le dix-septième jour de l'affection -, elle y était profondément indifférente , comme à tout ce qui l'environnait, le vingt-unième; elle se trouvait mieux le vingt-troisième, passant ainsi rapidement de la crainte à l'indifférence et à l'espoir (obs. 29 ).
Si l'on en excepte un malade qui assurait, dans les inter- valles d'agitation, que son argent lui avait été pris, le dé- lire ne portait dans aucun cas sur une idée fixe.
Le délire débutait , chez presque tous les sujets , après la somnolence. Il eut lieu, dès le troisième jour de l'affection . chez deux malades qui succombèrent les huitième et qua- torzième-, le quatrième, chez un homme qui mourut le trente-troisième ; le cinquième , chez deux individus em- porté» les dix-neuvième el vingtième jour; du huitième au viogt - cinquième , dans I. -s autres cas. 11 débuta, terme moy •!'. le dixième jour de l'affection chez les sujets qui mou-
DÉLIRE. '21
rurent du quinzième au vingtième , él le quinzième seule- ment, chez ceux qui succombèrent après cette époque.
Quanta sa durée , elle fut la môme chez les malades qui moururent du quinzième au vingtième jour, et chez ceux qui furent emportés après cette époque, terme moyen, de dix jours. Ce qui provient de ce que le délire débuta plus tard chez ceux qui succombèrent lentement, que chez ceux qui arrivèrent plus ou moins rapidement au terme fatal ; et de ce que, chez cesderniers, il était continu, pers stait jusqu'à la mort-, tandis que chez les autres, il cessait parfois avant , ou offrait quelque intermittence plus ou moins marquée (obs. 17, 18, 21, 22,28, 34). — Les extrêmes de la durée ne différaient même que fort peu chez les individus qui suc- combèrent avant ou après le trentième jour de l'affection, cette durée étant de cinq à quinze jours pour les premiers, de quatre à seize pour les autres.
Maintenant , y avait-il un rapport appréciable entre le délire et Tétat du cerveau , ou celui de quelque autre or- gane? Pouvait-on en trouver la cause dans leur état anato- mique ? Voici les faits :
Des douze sujets qui n'eurent pas de délire dans le cours de l'affection, ou qui n'en eurent que momentanément, pour vingt-quatre heures, ou pendant les deux ou trois derniers jours de la vie, quatre avaient la substance corti- cale du cerveau plus ou moins rose, dans toute sa circon- férence. Ce viscère était parfaitement sain chez six autres. Il était très injecté, une de ses couches optiques était un peu ramollie, dans un cas-, toute sa masse était un peu moins consistante que dans l'état ordinaire, dans le dernier. — Une si grande variété dans l'état apparent du cerveau, chez
22 3« PARTIE, SYMPTÔMES.
des sujets qui n'eurent pas de délire , doit faire craindre de ne pouvoir trouver, dans les lésions appréciables de l'encé- phale , l'explication des symptômes dont il est la source; et elle indique que ces altérations diverses sont probablement , comme je l'ai dit dans la seconde partie de cet ouvrage, le produit des derniers temps de l'existence (obs. 2, 8, 15, 16. 20, 24,32, 37, 42, 43,44, 45).
Ces inductions se trouvent confirmées par l'état du cer- veau des douze sujets dont le délire a été le plus violent. Chez cinq d'entre eux, en effet, la substance corticale était d'un rose plus ou moins vif (obs. 9 ,19, 23 , 27 , 36 ) ; chez cinq autres, toute la masse encéphalique était dans l'état normal. Eile était un peu molle chez un onzième (obs. 14), très injectée chez le dernier (obs. 18). — Entre l'état du cerveau chez ces sujets et chez les précédents, la dif- férence est si petite, qu'on peut dire à très peu près, qu'il y a identité; tandis que les fonctions cérébrales étaient dans un état opposé , ou entièrement différent, chez les uns et eliez les autres.
La consistance du cerveau ne parut un peu supérieure à ce qu'elle est dans l'état naturel, que chez deux des vingt-quatre sujets dont il s'agit. L'un eut un délire violent, l'autre conserva l'usage îles facultés de l'intelligence (obs. l(J,45). Nouvelle raison de ne pas eonsiderer ce degré de consistance comme un étal pathologique page 387 du premier volume .
Il est inutile, après cela . de comparer en détail l'étal du cerveau <'t celui des fonctions cérébrales chez les autres individus-, et je m,' contenterai de dire que cette compa- raison n'est pas moins concluante que celle qui précède; eu soi te que biea évidemment l'état apparenl du cerveau ne p .iivaii expliquer les symptômes dont il avait été la h ni <•• . a peu près comme l'étal de la membrane mu-
DELIEE. 23
queuse de l'estomac ne rend pas compte de l'anorexie et d'autres symptômes gastriques, dans un grand nombre de circonstances. Et comme alors on trouve ordinairement la cause de ces altérations de fonctions dans les lésions plus ou moins graves de quelque autre viscère, on peut croire qu'il en est encore de môme ici des symptômes cérébraux ; ce qu'il s'agit maintenant de rechercher.
On a souvent attribué aux maladies de l'estomac l'altéra- tion plus ou moins profonde des fonctions cérébrales. Sans leur dénier cette intluence , qu'elles doivent nécessairement avoir , comme tant d'autres, dans quelques cas, voici ce que j'ai observé à cet égard, chez les sujets qui nous occu- pent. Des douze qui n'avaient pas eu de délire , on n'en avaient eu que dans les deux ou trois derniers jours de l'existence, un avait la membrane muqueuse de l'estomac dans l'état naturel, sauf une légère nuance rose (obs. 37) ; trois l'avaient légèrement ramollie, sans altération de cou- leur ou d'épaisseur, dans le grand cul-de-sac ou dans le voi- sinage du pylore (obs. 1"», 32,43); cette membrane n'of- frait guère que quelques petites ulcérations chez deux au- tres sujets (obs. 24, 42); elle était mamelonnée dans une étendue variable, ordinairement avec altération de couleur, de consistance et d'épaisseur, dans les six autres cas (obs. 2, 8 , 1(>, 21 , 44 , 45 ). —Ces divers états existaient à peu près dans la môme proportion chez les sujets dont le délire avait été plus ou moins violent; de manière que deux d'entre eux avaient la membrane muqueuse de l'estomac dans l'état na- turel (obs. 14 . ts); deux lavaient seulement ramollie dans le grand cul-de-sac (obs. 9, 19) -, deux l'avaient ramollie et amincie ou détruite par bandes (obs. 10,27"; enfin . celte membrane était plus ou moins largement mamelonnée, or- dinairemenl plus ou moins rouge et épaissie, chez les ^ix
21 3e PACTir, STMPTÙMES.
derniers sujets ( obs. 3 , 23 , 30 . 36 , 33 , 39 }. — Il n'est donc pas possible d'attribuer à l'état de la membrane muqueuse de l'estomac les symptômes cérébraux qui ont eu lieu chez les sujets morts d'affection typhoïde.
Le môme défaut de rapport existait entre les symptômes cérébraux , parmi lesquels il ne faut pas oublier la somno- lence, l'état de la membrane muqueuse du gros intestin, et celui des autres organes. Et, comme il n'y eut qu'une seule lésion constante et toujours la môme chez tous les su- jets, l'altération des plaques elliptiques de l'intestin grêle , il faut en conclure que c'est dans cette lésion, et sans doute aussi dans la cause, quelle qu'elle soit , qui avait favorisé le développement de l'affection , que se trouvait la véritable cause du délire, de la somnolence surtout; ce dernier symp- tôme n'existant que chez un bien petit nombre d'individus emportés par d'autres affections aiguës, bien que dans celles-ci les altérations des membranes muqueuses soient presque aussi fréquentes que dans le cours de l'affection typhoïde.
On dira peut-être que si le cerveau et l'estomac n'étaient pas altérés dans tous les cas où les fonctions cérébrales avaient été plus ou moins profondément troublées, si l'on ne peut pas expliquer le trouble de ces fonctions par l'altéra- tion de l'un et de l'autre organe réunis , on le peut sans doute, par l'un ou par l'autre isolément ; qu'ainsi, mes con- clusions ne sont pas rigoureuses. Mais les faits repoussent cette manière de voir , le cerveau et l'estomac n'ayant rien offert de remarquable dans plusieurs cas.
Le défaut de relation entre les symptômes cérébraux et l'étal delà membrane muqueuse de l'estomac, est d'ailleurs parfaitement d'accord avec ce qui a été dit précédemment, de l'époque a laquelle débutent ordinairement les lésions de
DÛI.IRK. 25
ce ! dernier viscère, à une période avancée de la maladie, quand déjà les fonctions encéphaliques sont plus ou moins profondément altérées. L'observation suivante va nous of- frir une nouvelle preuve de ce fait.
XXXIV OBSERVATION.
Anorexie, soif, chaleur, constipation, puis diarrhée, léger délire ; som- nolence bientôt considérable, continue les dix derniers jours; meteo- risme très prononce; mort au vingt-cinquième jour. — Ramolli-Ci- ment, amincissement. <lc la muqueuse gastrique; ramollissement extrême, e'paississement de la muqueuse colite ; plaques elliptiques de l'ileum ulcérées ou non ulcérées, glandes inesentériques corres- pondantes volumineuses, ramollies, d'un rouge livide.
Une fille, âgée de dix-sept ans, vive et intelligente, d'une petite taille, d'un embonpoint médiocre, vint à 1 hôpital de la Charité le 9 février 18*23. A Paris depuis près de neuf mois, elle y était venue malgré elle, y avait pris un peu d'embonpoint, était malade depuis quinze jours, et au lit depuis six.
Au début, à la suite d'une nouvelle affligeante : cépha- lalgie, perte de l'appétit et des forces , soif, chaleur élevée , constipation. Ces symptômes persistèrent, la céphalalgie cessa au huitième jour, peu après l'application de dix sang- sues à l'anus. A la même époque , la malade prit , sans avoir éprouvé de symptômes gastriques, quelques grains d'ipé- cacuanha qui furent suivis de vomissements de bile; ses évacualions alvines, rares jusqu'alors, devinrent liquides et assez nombreuses; elle eut, par intervalles, des douleurs de ventre, à l'hypogaslre surtout 5 elle se mit au lit, eut des frissons, et fut, dès ce moment, très sensible au froid. Toussant depuis quatre semaines, à l'époque du début , elle toussa un peu davantage ensuite.
Le 10 : figure violacée, d'ailleurs assez naturelle somno •
2G 3* PARTIE, SYMPTÔMES.
lence fréquente , mais facile à vaincre ; réponses justes , lé- ger délire pendant la nuit, comme depuis quelques jours; céphalalgie gravative, yeux assez vifs, soubresauts presque continuels dans les bras, sentiment de gêne autour de la mâchoire inférieure -, langue rouge et sèche à la pointe, jau- nâtre et villeuse en arrière, soif vive, déglutition facile, anorexie sans dégoût ; ventre universellement sensible à la pression , souple , non météorise , une selle pendant la nuit ; pouls assez plein , un peu dur , à cent quinze ; chaleur sèche^ intense; quelques taches roses , lenticulaires, au dus et sur les parties antérieures et latérales de la poitrine ; toux mé- diocrement fréquente, parole un peu brève, oppression, râle muqueux, ou comme produit par une espèce de corde de basse dans toute la partie postérieure de la poitrine. (Li- mon, ter; pot. gom.; lav. de Un.)
Le soir : délire tranquille , mais profond ^de manière que la malade ne reconnaissait pas les personnes qui lui don- naient des soins. Ce délire persista long-temps encore au môme degré, après une légère émission sanguine. Le len- demain , à l'heure de la visite, la malade se le rappelait et se disait assez bien-, sa figure portait l'empreinte de la tristesse et de l'ennui , sa langue était rouge et humide, son ventre météorise, un peu sensible à la pression ; la chaleur élevée, le pouls enfoncé; les soubresauts continuaient. ; Vitte. >m.r
jonbes.)
Il y eut des propos incohérents dans la journée. Le 12 , l'intelligence riait complète, la tendance au sommeil, con- sidérable; et la malade faisait d'inutiles efforts pour la sur- monter. La langue était sèche et rouge antérieurement , le météorisme considérable, le pouls plus enfonce que la veille, à cent di\: les autres symptômes comme le jour précédent
DÉLinr. 27
L'assoupissement futcontinuel pendant le jour, et il y eut du délire pendant la nuit- Le 13 au matin: pouls encore plus faible que de coutume, à quatre-vingt douze seulement, crachats muqueux, parmi lesquels plusieurs étaient striés de rouge; un peu de crépitation au bas du poumon droit en arrière, continuation des soubresauts et du météorisme. (Quatre sangs, à chaque oreille , sinap. aux pieds; pot. gom.)
Dès-lors, jusqu'au 19, l'assoupissement fut profond, diffi- cile à vaincre ; il y eut du délire pendant la nuit. Cepen- dant la malade se plaignait, le 14 , des nouveaux vésica- toires qu'on lui ordonnait, le premier l'ayant fait inutilement souffrir, parcequ'elle n'avait aucun mal ! Le météorisme diminua progressivement, et les selles, au nombre de trois à quatre dans la journée, furent involontaires. La chaleur fut assez élevée, le pouls médiocrement développé. On en- tendait un peu de râle crépitant sur les côtés de la poitrine. —Les vesicatoires des jambes et des cuisses eurent un bon aspect; on en ordonna un cinquième à la poitrine le 17. Des sangsues , appliquées aux oreilles , le 14 , n'eurent aucun effet heureux appréciable, et une infusion de quinquina, prise le 18, fut vomie.
Le 19: figure décolorée, persistance de l'assoupissement; et si l'on en tire la malade, elle assure ne pas souffrir. (Suppression du kk.)
Dans la soirée , la respiration fut très gênée , très fré- quente, répétée soixante fois par minute; la malade fut administrée , commença à se croire en danger, et bientôt elle eut du délire. Le lendemain, sa figure était cadavé- reuse, elle avait encore l'usage de son intelligence, sans avoir la force de soulever complètement ses paupières , et elle faisait des efforts inutiles pour sortir ses bras hors du lit .
28 3' PARTIE, SVMPTÔMES.
croyant que je voulais lui tûler le pouls. Ses plaintes étaient continuelles durant l'application des sinapisrnes, et on l'en- tendait dire: Les battements du cœur sont-ils encore sensi- bles? Oh mon Dieu ! — Une heure après , elle expira.
OUVERTURE DU CADAVRE VIN'GT-UNE HEURES AERES LA MORT.
État extérieur. Raideur considérable des membres; épais- sissement de la peau sur laquelle avaient été appliqués les vésicatoires.
Tête. Point de granulations arachnoïdiennes (glandes de Pacchioni), ni d'infiltration au-dessous de l'arachnoïde; quelques gouttes de sérosité dans les ventricules latéraux ; substance cérébrale ferme, médiocrement injectée; cerve- let sain.
Cou. Larynx dans l'étal naturel; trachée-artère rouge intérieurement.
Poitrine. Poumons libres , remplissant la poitrine sans s'affaisser, bien que leurs cellules ne fussentque très peu di- latées ; d'un rose tendre à leur partie antéreure, d'un rose violet, un peu engoués en arrière , dans une médiocre éten- due; semés, intérieurement . d'un grand nombre de gra- nulations grises, demi-transparentes. Bronches d'un rose assez vif; leurs dernières divisions tapissées par une ma- tière puriforme. — Le péricarde contenait 55 grammes de sérosité claire. Le cœur et l'aorte étaient parfaite- ment sains. Les ventricules droit el gauche contenaient des concrétions succinifonnes.
Abdomen. L'œsophage était en partie dépouillé de son épiderme, d'ailleurs sain. — L'estomac contenait un liquide grisâtre. Sa membrane muqueuse avait le même aspect jus- qu'à 80 millimètres du pylore, près duquel elle était d'un
DUI.11.1 . 2(J
rose très tendre. D'une épaisseur et d'une consistance con- venables dans celte partie, elle était très amincie et molle comme du mucus partout ailleurs. — Sauf une faible nuance rose, le duodénum n'offrait rien de remarquable. — L'intestin grêle contenait une médiocre quantité de mucus, couleur orange plus ou moins intense. Sa membrane mu- queuse était très ramollie, d'un rouge obscur près du cœ- cum , dans la longueur de 13 décimètres , et de là jusqu'au duodénum, d'un rouge clair, sauf quelques taches blan- châtres. Les plaques elliptiques n'étaient visibles que dans l'iléum ; les plus rapprochées du jéjunum étaient blanchâ- tres, assez minces ; les autres, rouges , successivement plus développées, plus larges et plus épaisses, à mesure qu'elles étaient plus voisines de la valvule iléo-cœcale Près de celle- ci , elles étaient ulcérées dans la longueur de G décimètres et demi, leur membrane muqueuse plus ou moins largement détruite, leur tissu sous-muqueux à découvert, ou même dé- truit,au fond de quelques ulcérations, dans la largeur de 10 à 12 millimètres; et alors les fibres musculaires correspon- dantes étaient rouges et épaissies. Les plaques non ulcérées avaient 2 millimètres, ou environ, d'épaisseur, par suite du développement de la muqueuse, quiétait rouge et ramollie, et du tissu cellulaire sous-muqueux, non moins rougeet épaissi. Entre ces deux espèces de plaques s'en trouvaient d'autres beauconp plus petites, irrégulières, d'ailleurs semblables, et quelques granulations miliaires jaunes, sans orifice ou point central. En outre, contre le cœcum, dans la largeur de 10 millimètres, la membrane muqueuse de l'iléum était détruite dans presque tout son pourtour, et le tissu cellu- laire sous-muqueux plus ou moins rouge et épais. — Le gros instestin était un peu plus volumineux que dans l'état ordi- naire, et il contenait une matière jaunâtre, assez abon-
30 3« PARTIE, SYMPTOMES.
dante,très claire. Ses parois étaient épaissies, sa membrane muqueuse extrêmement ramollie, plus épaisse que d ordi- naire , et elle offrait un assez grand nombre de taches gri- sâtres, lenticulaires, marquées d'un point noirâtre à leur centre. — Toutes les glandes mésentériques étaient rou- ges et livides; et les plus rapprochées du cœcum très volumineuses et ramollies. Les glandes mésocolites très d'un rouge plus foncé et d'un volume proportionné- inent plus considérable. — Le foie était un peu rouge et gorgé de sang , d'ailleurs sain ; la bile de la vésicule était rousse et ténue — La rate était presque doublée de volume, d'une couleur . foncée , d'une médiocre consis- tance. — Les reins étaient rouges et pénétrés de plus de sang que d'ordinaire. — La matrice était saine. L'ovaire gauche avait 70 millimètres de long sur 27 de large, était aplati, grisâtre, comme infiltré à l'intérieur; le droit avait une forme arrondie, 27 millimètres de diamètre, et il offrait, intérieurement, une petite cavité remplie de sang.
Cette observation est remarquable , comme plusieurs de celles que j'ai exposées j usqu'ici , parla bénignité de cer- tains symptômes, l'absence de plusieurs autres, la profon- deur et la variété des lésions. Il n'y eut, en effet, ni nausées ni douleurs'à l'épigastre; et si le ramollissement pultacé, avec amincissement de la membrancmuqueuse de l'estomac , ne peut pas être considéré comme le résultat d'une inflamma- tion ; au degré où il était, chez un individu mort en hiver, et ouvert vingt heures après la mort, on ne saurait non plus l'attribuer uniquement à la décomposition cadavérique com- mençante. La diarrhée fut peu considérable, et cependant l;i membrane muqueuse de l'intestin grêle et du gros intes- tin était profondément altérée.
DiiLint. 31
Les symptômes cérébraux, bien que fort graves , avaient aussi une certaine apparence de bénignité. Il y eut, pendant la nuit, bien rarement le jour, un peu de délire ; l'assoupisse- ment eut lieu , sans interruption , pendant tout le cours de la maladie; mais dès qu'on en avait tiré la malade par quel- que question, elle répondait avec justesse; le mouvement fébrile n'était pas non plus très considérable; en sorte qu'un examen attentif de la maladie semblait devoir conduire moins à un pronostic fâcheux qu'à un pronostic favorable. La longue durée de l'assoupissement n'était pas une raison de désespérer du sujet, puisqu'on le voit persister de quinze à vingt jours chez des individus qui guérissent.
L'état delà sensibilité de la malade, six jours avant la mort, est d'ailleurs fort digne de remarque. Alors effective- ment, elle paraissait aussi sensible à l'action des vésicatoi- res qu'une personne de la sensibilité la plus vive, et elle repoussait l'application de nouveaux épispastiques, parla raison qu'elle n'était pas malade ! On pourrait concilier ces deux choses, en apparence contradictoires, si l'on pouvait supposer que cette femme ne se disait bien que pour éviter la douleur des vésicatoires. Mais cette supposition ne peut être faite, puisque, plus tard , on sut que la malade ne se croyait réellement pas en danger, à cette époque. En sorte qu'il faut reconnaître ici tout à la fois, une sensibilité aussi extrême de la peau , qu'obtuse des organes profondément placés; ce qui d'ailleurs n'est pas très rare. La justesse des perceptions de la malade une heure et demie avant la mort , quand déjà elle ne pouvait plus relever complètement ses paupières ni mouvoir ses bras, est plus remarquable , et rapproche ce fait d'un autre cité plus haut, également rela- tif à une femme qui paraissait insensible au pincement des bras, la veille de sa mort, et ne les y laissait exposés
3"2 3' PARTIE, SYMPTÔMES.
que parce qu'elle ne pouvait leur taire exécuter le plus petit mouvement (obs. 8).
2° Chez les sujets atteints d'affection typhoïde, qui ont guéri.
Chez trente -neuf des cinquante-six sujets dont l'affection fut yrave, le délire eut lieu, offrit de grandes variétés sous le rapport du début, de ladurée, du degré ; et il futgénérale- ment moins intense que chez les malades qui succombèrent.
Relativement au début, deux sujets âgés de quinze à seize ans en furent atteints dès le premier jour; mais il était peu considérable chez l'un et chez l'autre, avait presque uni- quement lieu durant la nuit, de manière qu'il n'offrait . pour ainsi dire . que l'exagération de cet état de malaise qu'éprouvent la plupart des malades atteints d'affection ty- phoïde pendant le sommeil, et qui leur fait souvent faire beaucoup d'efforts pour se tenir éveillés. Le délire débuta du quatrième au dixième jour de la maladie chez neuf su- jets, du onzième au vingtième chez douze, du vingtième au trentième chez les autres.
D'une assez longue durée dans quelques cas, il était généralement fort court. Ainsi, sept malades ne l'eurent que pendant vingt-quatre heures, du sixième au vingtième jour de la maladie, sans que d'ailleurs la somnolence en fut moins considérable : trois l'éprouvèrent pendant quinze et vingt-quatre jouis, à un degré remarquable et d'une ma- nière presque continue. Sa durée moyenne fut de six jours »! demi chez les autres.
( Mdi nai renient calmc.de ma nière à ne se déceler (pie par des propos incohérents et souvent inintelligibles, ou par des i«6- pu uses peu appropriées aux questions, le délire fut très agité, violent chez cinq sujets, qui poussaient des cris continuels,
di.i 33
pendant la nuit surtout, et qu'on lut obligé de maintenir dans leur lit avec le gilet de force. Il y eut encore de l'agi- tation chez quelques autres, mais à un beaucoup moindre degré , de manière qu'ils étaient sutlisamment assujettis , au moyen d'un drap passé transversalement sur leur corps et attaché de chaque côté du lit.
Dans la période d'accroissement, ou dans l'état de l'affec- tion , quand le mouvement fébrile était encore plus ou moins considérable, le délire ne portait sur aucun objet dé- terminé, consistait seulement dans l'impossibilité où était le malade de faire un usage régulier de son intelligence. Mais au-delà de cette époque, quand la fièvre avait beau- coup diminué, ou même au commencement de la convales- cence , j'ai vu deux fois le délire porter sur des objets lixes. Un malade qui se trouvait dans ce dernier cas , prétendit , cinq jours de suite, avoir été depuis son admission à l'hô- pital, dans son village , d'où il avait rapporté des louveteaux qu'il voulait vendre. Il ne pouvait dire comment il avait voyagé-, mais quelque objection que je lui fisse, il resta pendant cinq jours dans la même illusion , que d'ailleurs il soutenait avec beaucoup de calme; et ce ne fut qu'après celle époque, en revenant du jardin de l'hôpital, qu'il re- connut son erreur. — L'autre cas est relatif à une jeune fille beaucoup moins avancée dans la convalescence, d'une grande sensibilité» , qui avait eu beaucoup de chagrins avant le début de sa maladie. Elle soutint, deux jours de suite, que sa sœur, qui habitait Saint-Germain, était morte; qu'elle l'y avait vue trois jours auparavant; et elle le soute- tenait avec l'accent de la plus profonde conviction , s'occu- panl de ses petites nièces, de leur deuil , et me suppliant, d'un air profondément affligé, d'écrire à une de ses parentes à ce sujet. (Je délire eut encore cela de remarquable, qu'il 11. 3
'.] 5 .",• PAB rJJJ, M.Ml'h'iui S.
fut remplacé par un délire varie qui disparut après le même
espace de temps. D'ailleurs, ce symptôme cessait , non tout-à-coup, mais
par degrés; l'exercice complet des facultés intellectuelles ne se rétablissait qu'un peu plus tard : et, ce qui me paraît véritablement digne de remarque, c'est qu'à l'exception d'un des malades dont il vient d'être question, aucun de ceux que j'ai observés n'eut le moindre dérangement des facultés intellectuelles , après la cessation de la lièvre. Ce fait serait inconcevable, il me semble, si le délire dépendait, dans le cours de l'affection typhoïde, d'une lésion grave du cerveau, comme le serait une inflammation de toute sa niasse ou d'une de ses parties; une pareille lésion devant avoir, au moins dans plusieurs cas, des suites, dont l'exis- tence se serait révélée par quelque altération de l'intelli- gence ou du mouvement. — Ainsi l'étude des symptômes confirme ce que j'avais cru pouvoir conclure de la simple considération de l'état du cerveau après la mort , et tous les faits semblent prouver que le délire de l'affection typhoïde ne peut être expliqué par une lésion appréciable du cerveau. Sur plus de trois cents malades atteints d'affection ty- phoïde, que j'ai observés depuis la publication de mes re- cherches , je n'en ai vu qu'un dont l'intelligence ait offert un certain degré d'altération pendant la convalescence d'une affection typhoïde grave. C'était un sujet de peu de capa- cité , qui resta, pendant les six semaines que dura sa conva- lescence, dans une sorte d'idiotisme, dont il ne sortit que lentement, complètement toutefois. De manière qu'aucune proposition ne doit paraître mieux établie que celle qui précède.
Chez les sujets dont la maladie lut légère, le délire fut rare.
ULLIIIL. 35
Trois seulement, sur trente-un, en lurent atteints, à un certain degré-, l'un deux pendant vingt-quatre heures, un autre pendant deux jours , le troisième pendant sept. Le dé- lire eut lieu au déclin de la lièvre chez ce dernier, du vingt- huitième au trente-cinquième jour de l'affection , quand la diarrhée était encore assez considérable , et il était fixe. Le malade se croyait loin de Paris et près de son pays, sans pouvoir indiquer avec précision le lieu où il se trouvait. Il perdit à peu près complètement la mémoire , et ne put rete- nir le nom de l'hôpital , pendant ces sept jours.
Suivant MM. Taupin et Rilliet le délire débute bien rare- ment, dans Y enfance , avec les premiers accidents; il appa- raît ordinairement du septième au treizième jour de l'affec- tion , et sur cent dix-huit entants observés par M. Taupin, cinquante-trois eurent seulement un peu d'agitation, sans délire; quarante-quatre poussaient des cris, et quinze, si l'on avait oublie de les maintenir dans leur lit avec la cami- sole de force , se levaient au milieu de la nuit, courait-ut jouer ou se coucher avec leurs camarades endormis, ou er- raient sans but, Ou marchaient à grands pas dans les salles, et résistaient à des personnes robustes; incapables, après l'exacerbation , de boire seuls ou de se tenir assis dans leur lit, et ne se rappelant pas, le lendemain, ce qu'ils avaient fait pendant la nuit. Neuf sujets eurent des rêvasseries continuelles.
La durée «lu délire fut très variable dans les cas observés par M. Rilliet, qui ne l'a pas rencontré au-delà du quinzième jour de l'affection, si ce n'est dans deux cas où il fut con- staté aux vingt-troisième et vingt-cinquième jour. Le der- nier était relatif à un enfant de huit ans, qui avait été traite par les émissions sanguines, et dont le détira ne disparut
,'ib •">' PARTIE, MMl'lÙMtï.
qu'à l'époque à laquelle ou commença à lui donner des ali- ments. Le même médecin n a observe le délire que dans le tiers des cas, souvent précédé d'agitation et de rêvasseries pendant la nuit, souvent remplace par de la somnolence : de manière qu'il est vrai de dire qu'avant comme après quinze ans, le délire n'a pas lieu, à beaucoup près, chez tous les individus atteints d'affection typhoïde , qu'il varie beaucoup relativement à l'époque de son apparition, relati- vement à sa cause et„à son degré.
;i° Chez les sujets morts d'autres maladies aiguës.
De trente përipntumoniques sur lesquels j'ai pu prendre des renseignements exacts, relativement au symptôme qui nous occupe, huit, ou environ la quatrième partie, eurent un délire plus ou moins fort, à une époque et dans un es- pace de temps variables. Chez un sujet dont l'affection dura sept jours, il débuta en même temps quelle , continua sans interruption jusqu'à la mort , fut tranquille pendant les cinq premiers jours, puis bruyant et furieux , au point qu'on fut oblige d'en venir au gilet de force. Chez cinq malades qui moururent du onzième au vingt-cinquième jour, il com- mença de quatre à sept jours avant le terme fatal , et ne finit qu'avec la vie. Deux d'entre eux l'eurent à un remarquable degré . furent maintenus dans leur lit avec le gilet de force; eteelui dont l'affection et le délire durèrent sept jours, disait a M. Chorael) qu'il connaissait depuis l'enfance, qu'il vou- drait bien le vir. el M. Ghomel lui observant qu'il lui par- lait à lui même, il lui répondait avec vivacité qu'il le con- naissait trop bien pour qu'on pût lui en imposer! Le délire cul lieu chez le septième sujet pendant un jour, au qua- trième de l'affection ; et du vingt-septième au trentième
DELIRE. ..
chez le dernier, qui succomba à la lin du deuxième mois de
la maladie. Chez l'un et chez l'autre il fut caractérise par un babil insupportable pendant la nuit. — La somnolence ne vint pas à sa suite, ce qui le distinguait de celui qui a lieu dans le cours de l'affection typhoïde.
Ici comme dans cette dernière maladie, je crois impossi- ble , dans l'état actuel de la science, de trouver la cause du délire dans une altération appréciable du cerveau. Car cinq des huit sujets qui nous occupent avaient le cerveau parfaitement sain-, il était injecté plus ou moins vivement chez les autres, et la substance corticale ne fut rose que dans un cas : tandis que celle coloration eut lieu chez six individus qui n'avaient point éprouvé de délire, ou n'en avaient eu que dans les vingt-quatre ou trente-six der- nières heures de l'existence. Il est mémo à remarquer que le cerveau était , sous tous les rapports , dans l'état na- turel, chez les deux sujets dont le délire dura, sans in- tèrruption , pendant sept jours.
On ne peut pas non'plus attribuer le délire à une influence sympathique exercée sur le cerveau par une altération secon- daire, comme celle de la membrane muqueuse de l'estomac, qui était saine dans trois des cas dont il s'agit -, ni à une lé- sion analogue de celle de l'un ou de l'autre intestin, par la même raison. Ici, comme dans l'affection typhoïde, il faut en veuir à l'organe, toujours, el quelquefois uni- quement ou presque uniquement affecté, aux poumons . dont la phlogoso donnait lieu à tant de désordres secon (laires.
Mais celle action des poumons el des plaques ellipti- ques de l'intestin grêle, faut-il la considérer comme l'ef- fet d'Une sympathie inappréciable dans ses moyens, ou comme la suite du mouvement fébrile, dont l'inflmima
38 .'îe PARTIE, SVMPTÙMFS.
lion de ces organes était la source ? Cette dernière supposi- tion me semble la seule vraisemblable , vu , comme nous allons bientôt en avoir la preuve, que le délire était pro- portionnée à la fièvre , dans la somme des cas où il a eu lieu : et que dans la première supposition , il faudrait ad- mettre que l'action sympathique des organes les plus dif- férents par leur structure et par leurs fonctions, est la mêmej ce qui me parait impossible.
On me comprendrait mal, toutefois, si l'on imaginait , relativement à l'objet qui nous occupe , que je n'admets d'autre influence que celle du mouvement fébrile ; puis- que, tout à l'heure encore , j'observais que le délire ou ses suites n'étaient pas entièrement les mêmes chez les individus emportés par l'affection typhoïde et chez ceux qui avaient succombe à la péripneumonie. Ce que je veux dire, et ce qui me semble évident, c'est que l'influence sympathique des organes est secondaire, et que celle de df la fièvre est la principale.
Ici d'ailleurs se présente une remarque importante, déjà indiquée, sur laquelle je crois néanmoins utile de revenir : c'est qu'il ne faut pas conclure du défaut de rapport entreles symptômes cérébraux ei l'état anatomique de l'encéphale, que le cerveau n'a aucune influence sur l'issue de la ma- ladie; car cette influence doit exister, et être considéra- ble, puisqu'à l'apparition des symptômes cérébraux, les autres, ou cessent, ou s'amoindrissent, ou sont arrêtés dans leur développement. Qu'importe d'ailleurs, relativement aux effets , la cause du trouble de uns fonctions , quand ce troubli' esl considérable .' La dyspnée . si elle est extrême, peut amener la mort , quelle qu'en soil la cause, qu'on puisse ou non s'en rendre compte par l'étal des organes; et il en est de même de la syncope. Il faut doue . dans
KÉLIRE. 39
les cas où les altérations appréciables de nos organes ne rendent pas raison de la mort des malades, tenir compte, à cet effet , de l'état des fonctions , et surtout des fonctions cérébrales.
Chez les sujets morts d'autres maladies aiguï's, dont le cerveau n'était pas le siège , six sur vingt ( à peu près la même proportion que dans la péripneumonie) , eurent un délire plus ou moins grave. Ce délire eut lieu au septième jour d'une péritonite mortelle au onzième, et il fut remplacé par un peu de somnolence. Je l'obser- vai encore du cinquième au huitième jour d'une scarla- tine dont la terminaison funeste arriva le vingt-neu- vième seulement-, au vingt-cinquième jour d'une métrite mortelle au trentième, pendant vingt-quatre heures; et, dans deux cas d'érysipèle phlegmoneux des membres inférieurs; à compter du cinquième jour, chez un des sujets qui mou- rut au onzième, et, dans une bonne partie du cours de la maladie, chez l'autre, qui ne succomba qu'au cinquan- tième.
Le cerveau était parfaitement sain dans ces deux derniers cas , les plus remarquables de ceux qui nous occupent \ un peu mou, pâle et médiocrement injecté chez le sujet qui suc- comba à la péritonite; ferme et très sablé de sang chez celui qui mourut de variole. Ses lobes postérieurs étaient ramollis chez celui qui fut emporté par la scarlatine. En sorte que dans ces cas, comme dans ceux de péripneumonie, l'état du cerveau n'offrit rien de fixe ; et comme il en fut de même des membranes muqueuses de l'estomac et de l'intestin grêle, les précédentes réflexions s'appliquent exactement aux su- jels donl il s'agit.
-10 3* mrtif, symptômes.
A' CJic: les sujets atteints d'autres maladies aiguës, qui ont
guéri.
Dix pérxpneumoniques" sur cinquante-six, eurent du dé- lire ; trois pendant vingt -quatre heures seulement, les au- tres pendant un espace de temps qui a varié de deux à six jours, quelquefois séparés par un intervalle de deux à trois. Tl fut continu, ou à très peu de chose près, dans les cas où il dura cinq à six jours. — Il eut lieu , dès le début de l'affection, chez un sujet , le deuxième jour chez deux au- tres, du cinquième au quinzième chez le reste des mala- des. Et l'agitation fut assez considérable, chez trois d'entre eux , pour qu'on dût recourir au gilet de force.
S'il y eut de la diarrhée ou quelques symptômes gastri- ques dans quelques-uns de ces cas, il n'y en eut pas dans le plus grand nombre; de manière que les réflexions pré- cédentes se trouvent encore justifiées par ces nouveaux faits.
Le délire eut lieu chez quatre des douze varioleux que j'ai observés-, c'est-à-dire dans une proportion beaucoup plus considérable que chez les péripneumoniques, mais aussi pour un espace de temps beaucoup moindre: chez deux malades pendant la nuit seulement , les septième et huitième jours de l'affection; chez les autres pendant vingt- quatre heures, du quatrième au quinzième jour de la ma- ladie.
J'observai encore le délire chez trois des dix-huit sujets atteints de «car Jafme, dont j'ai recueilli l'histoire; aux cin- quième, sixième el septième jour de l'affection ; pendant un jour dans un c;is. pendant deux ou trois dans les autres: el il fut violent chez le dernier malade qu'on fui obligé de
DKMRE. /jl
maintenir avec le gilet de force. — Aucun symptôme gas- trique ne coïncidait avec le délire dans ces trois cas.
Il y eut de l'agitation et quelques rêvasseries chez deux des quatorze sujets atteints de rougeole. Aucun n'eut de délire.
En sorte que dans ces trois espèces d'affections , qui of- frent entre elles plus d'un point de contact, le délire fut assez exactement proportionné au degré de la fièvre.
Les trente-huit malades qui furent atteints d'un érysipèle à ht face, huit, ou la cinquième partie, eurent du délire. L'affection s'étendit au cuir chevelu chez six d'entre eux, et dans six autres cas où les facultés intellectuelles conser- vèrent toute leur intégrité. Sans nier l'influence du voisi- nage de la maladie sur le trouble des fonctions cérébrales , il est évident, par ce dernier fait et par ceux qui ont été rapportés jusqu'ici , qu'il avait encore une autre cause qui n'était sans doute pas la moins puissante, et qui ne peut pas différer de celle qui a été signalée. — D'ailleurs, ici , comme dans le cours des autres maladies aiguës, le délire parut à <lts époques variées; le premier jour de l'affection dans deux cas, du quatrième au sixième dans les autres. — Il cessa après vingt-quatre heures de durée et même moins, chez trois sujets-, il persista de trois à quatre jours chez les au- tres, et au-delà chez l'un d'eux.
Huit malades, sur trente-neuf de ceux qui furent atteints d'angine gutturale, éprouvèrent beaucoup d'agitation pendant une ou plusieurs nuits; et l'un d'eux eut un véritable délire au huitième jour de l'affection ; mais pendant la nuit seule- ment.— Cette rareté du délire chez les malades dont il s'agit , dépose en faveur de ce qui a été dit relativement à l'une de ses causes, la plus vraisemblable et la plus efficace, dans le cours des maladies aiguës: le mouvement fébrile
4'2 .'V PARTIT, SYMPTOMES.
étant rarement considérable et de quelque durée, dans l'angine.
Aucun des malades (vingt) chez lesquels j'observai le zona ,Ycrythcma marginatum , ou Yurticaire, n'eut de dé- lire. Mais plusieurs de ces derniers éprouvèrent beaucoup d'agitation; symptôme qui est bien souvent l'avant-coureur du délire, et qui suppose généralement une cause moins puissante que celle qui amène ce dernier.
Il en fut de môme pour les individus atteints de rhuma- tisme vide catarrhe pulmonaire (cent vingt-neuf), dont quel- ques-uns éprouvèrent beaucoup d'agitation et d'anxiété, sans trouble manifeste des facultés intellectuelles.
Des quatre-vingt-quatre malades affectés iïentérite propre- ment dite, deux eurent un peu de délire pendant la nuit, avant leur admission à L'hôpital. L'exercice des facultés intel- lectuelles se ralentit chez quelques autres. Mais cette lenteur, toujours proportionnée à l'affaiblissement causé par l'abon- dance des évacuations alvines, qu'on observe dans tous les cas de débilité, quelle qu'en soit la cause, comme dans une simple courbature, par exemple, cette lenteur mériterait à peine d'être mentionnée, si je ne m'étais fait un devoir rigoureux de citer tous les faits et surtout ceux qui concer- nent l'entérite, qu'on a confondue dans ces derniers temps avec ce qu'on appelle les lièvres graves; bien, comme nous la verrons en traitant du diagnostic, qu'il ne soit guère pos- sible de citer deux affections réellement plus distinctes. Toutefois, cette absence presque complète du délire, chez un si grand nombre de sujets, dont beaucoup étirent des évacuations alvines excessives, n'a plus rien d'étonnant, si i on Be rappelle les lait s qui précèdent -, puisque le mouvement fébrile fut aussi peu marqué dans l'entérite, qu'il estcon-
miu. 43
sidérable dans la plupart des maladies aiguës danslcsqu<'lles le délire est plus ou moins fréquent.
Huit des soixante-treize sujets atteints de la colique des peintres eurent beaucoup d'anxiété, ou une extrême agita- tion pendant la nuit; quatre, un délire violent qui dura de six à dix-huit jours , et débuta le quatrième de l'affection, chezdeux malades.Un mouvement fébrile assez remarquable eut lieu chez l'un des quatre sujets qui eurent du délire; il fut beaucoup moins prononcé chez les autres. Et si Ton peut rattacher le délire à la fièvre, chez le premier, cela n'est guère possible chez les derniers; en sorte que ces faits sem- blent, au premier abord, en contradiction avec ce que j'ai dit jusqu'ici. Mais cette contradiction est plus appa- rente que réelle, vu qu'il n'y a sans doute qu'une bien faible distance entre l'extrême anxiété due à la douleur, et le délire; et que, d'ailleurs, il existe ici une cause spécifique, qui agit souvent et incontestablement sur le cerveau , et dont il faut, de toute nécessité, tenir compte (1).
Il résulte des faits consignés dans ce paragraphe, que le délire , comme les autres symptômes secondaires qui se sont développés dans le cours de l'affection typhoïde, ou dans celui des autres maladies aiguës soumises à mon ob- servation, a débuté bien rarement le premier jour de l'affec- tion, ordinairement du septième au dixième; que l'état du cerveau ne peut , dans l'étal aetuel de la science, en ren- dre compte chez les sujets qui ont succombé; qu'il est éga- lement impossible de l'attribuer à des lésions secondaires, à celles de la muqueuse gastro-intestinale, par exemple. qui lui étaient évidemment postérieures dans plus d'un
(i) Mémoires <>u Recherches sur plusieurs maladies. Mémoires*} 1rs morts subites, \\. iss.
4-î 3* PARTIE, SYMPTÔMES.
cas; que sa fréquence, sa violence et sa durée ont été en rapport avec le mouvement fébrile, quelque fût l'organe primitivement affecté ; que c'est à ce mouvement fébrile ob- servé dans le cours d'une affection aiguë , ordinairement inflammatoire, plutôt qu à une action sympathique de l'or- gane malade, encore que cette action n'y soit certainement pas étrangère, qu'il convient de l'attribuer; puisque c'est la seule circonstance commune aux sujets dont il s'agit, et qu'on ne peut recourir à des causes différentes pour l'intel- ligence d'un phénomène plus ou moins exactement tou- jours le même.
Encore une réflexion qui trouve naturellement sa place ici. Si le trouble le plus profond des facultés cérébrales a lieu dans un grand nombre de cas, sans que le cerveau pré- sente de lésion appréciable, il doit en être de môme de beaucoup d'autres fonctions et d'autres organes-, et loin de s'étonner que la membrane muqueuse de l'estomac soit as- sez souvent saine chez des sujets qui ont éprouvé des sym- ptômes gastriques , on ne doit voir dans ce fait que la con- firmation d'une loi générale, que l'analogie aurait pu faire conjecturer avant d'en avoir la preuve matérielle. Je ne dis pas admettre, car l'analogie n"est pas un moyen de prou- ver; elle peut mettre sur la voie de la vérité , elle ne peut rien au- delà.
§4.
Des spasmes. 1 ■ Chez les sujets morts tV affection typhoïde.
Ce symptôme se présentait sous deux formés principales : l.i raideur et une alternative de contraction el de relâche- ment dos muscles. Je l'ai observé dans seize cas , ou chez
!>PASM£8. i,')
la troisième partie des sujets; le plus ordinairement un as- sez |;raiid nombre de jours avant le terme fatal, quatre fois seulement la veille ou l'avant-veille de la mort; chez deux des dix-sept malades emportés du huitième au vingtième jour de la maladie, chez la moitié de ceux qui sont morts plus lard.
Ces spasmes avaient leur siège dans les muscles des mem- bres supérieurs, du cou, des lèvres, des autres parties de la face et dans le diaphragme, de la manière suivante.
Les membres supérieurs furent dans un état de contrac- tion permanente chez quatre sujets , pendant un, trois, cinq et quinze jours avant le ternie fatal -, au moins les trouvai-je dans cet état tous les jours, au moment où j'observais les malades (obs.5, H, 39, 4o) : et à cette raideur se joignait celle du cou chez l'un d'eux (obs. 46). Au lieu d'une con- traction permanente, c'était des mouvements spasmodiques des bras chez trois sujets , soit au milieu de l'affection , trois jours de suite (obs. 34 , 35) ; soit les deux derniers jours de l'existence ( ubs. 23 ). Chez quatre malades, j'observai de simples soubresauts des tendons , pendant un intervalle de temps qui a varié de deux à cinq jours, au milieu de la maladie, ou un peu au-delà (obs. 3 , 4 , 17, 29). — Des spasmes eurent lieu dans les muscles des lèvres et des au- tres parties de la face, chez trois sujets ; peu de temps avant la mort, chez l'un d'eux (obs. 7); cinq ou six jours seule- ment après le début, et pendant un espace de temps assez considérable, chez les autres (obs. 28, 36). — Deux mala- des eurent le hoquet plusieurs jours avant le terme fatal: et les muscles du cou étaient, en outre, spasmodique- ment contractes chez l'un d'eux (obs. 15, 30).
Le cerveau n'offrait d'ailleurs aucune différence appré- ciable chez les sujets qui curent des spasmes et chez ceux
46 3e PARTIE, 8YMPTÔMBS.
qui n'en eurent pas ; ce qui n'a rien d'étonnant après ce que nous avons vu danalogue relativement au délire.
Les deux observations suivantes, qui réunissent plus d'un genre d'intérêt , nous fourniront l'exemple des princi- paux aspects sous lesquels se présente le symptôme dont il s'agit.
XXXV* OBSERVATION.
Coliques, diminution de l'appétit, sensibilité au froid, frissons, cha- leur, anorexie complète au septième jour, et bientôt selles nombreu- ses, météorisme, assoupissement, délire, mouvements spasmodiques; il.uis les derniers jours, érysipèle, plilegmoncux, esebare au g acrum ; mort au trentième jour. — Substance médullaire du cerveau très injectée, la corticale rose ; plaques elliptiques de l'iléum, rouges, ulcérées ou non ulcérées ; glandes mésentériques correspondantes, rouges, ou bleu;1 très, volumineuses et très ramollies, etc., etc.
Un maçon, âgé de dix-neuf ans , dune constitution mé- diocrement forte, à Paris depuis cinq semaines, ayant eu presque constamment de la diarrhée depuis cette époque, accusait huit jours de maladie , quand il fut admis à l'hôpi- tal de la Charité, le premier mai 1824 ; ayant eu néanmoins, dans la semaine qui avait précédé , des maux de tète et des coliques par intervalles, beaucoup de sensibilité au froid, un appétit très inégal et ordinairement déprimé. Au début : frissons, bientôt suivis de chaleur, anorexie complète, constipation 5 la chaleur et l'anorexie persistèrent, les fris- sons oc se renouvelèrent pas, et, au cinquième jour, la ( estimation lit place à la diarrhée. D'ailleurs, ni nausées, ni douleurs de ventre, m soif.
Le 1" mai: figure jaunâtre , physionomie sévère et maus- sade . céphalalgie, hésitation dans l'exercice de la parole, comme depuis quatre jours; mouvements spasmodiques
SI" ASM ES. 47
des membres supérieurs très fréquents-, le malade ignore où il esl, dit n'avoir pas toujours eu sa tète, et, après quelques paroles raisonnables, répond à autre chose qu'à ce qu'on lui demande : la langue est humide, rouge au pourtour, blanchâtre au centre; la soil* nulle; de légères douleurs ont lieu au-dessus du nombril,' il existe du mé téorisme , desselles nombreuses, involontaires depuis deux jours : la chaleur est médiocre, le pouls à quatre-vingts, sans caractère particulier ; la respiration peu accélérée ; on entend un râle sec et sonore, universel, nombreux. (Orge éd. ; lav. lin bis. -, bain.)
Le sujet l'ut très calme au bain , où il resta une heure ; mais à midi l'agitation survint et obligea de recourir au gilet de force. Le 2 : paroles sans suite , rire sardonique , mouvements spasmodiques des bras aussi fréquents que la veille , pouls faible , à quatre-vingt cinq ; le malade re- fuse ses tisanes et demande du vin -, le météorisme et les selles involontaires continuent. {Bainj 2 kilogr. de gl. sur la tête, dans le bain ; sinap. )
Le délire persista , il y eut de l'agitation le jour et de l'as- soupissement durant la nuit. Le 3 : somnolence , affaisse- ment des traits, mouvements spasmodiques universels, hy- pogastre très sensible à la pression , persistance du météo- risme et des autres symptômes. {Orge éd. ; infus. kk.id.j pot. ai . ri ii et sirop de kk. GO grammes t et extrait de kk. A grammes; {ornent, arom.; sinap.)
L'assoupissement fut continuel, le malade ne prit que la moitié de sa potion, et fut débarrassé de bonne heure du gilet de forée. Le 4 : stupeur extrême , mouvements spas- modiques des lèvres; ceux des membres supérieurs sont moins prononcés que la veille; les paupières sont presque constamment fermées, la langue est imparfaitement tirée.
18 , UTIL. SYMPTOMES.
comme rôtie; les lèvres sont encroûtées, le pouls peu accé- lère. Id. , et en outre un gramme de musc dans la potion. ) Le 5 : dernier degré de stupeur , assoupissement dillîcile à vaincre, mouvements spasmodiques nuls, météorisnie peu considérable, plusieurs selles involontaires, pouls à quatre-vingts ; toux rare , un peu de ràlemuqueux sur les cotés de la poitrine. ( Même potion avec extrait de kk.)
Du 5 au 10 , la stupeur et l'assoupissement continuèrent; il y eut un peu de délire,, de l'agitation pendant la nuit, et quelques mouvements spasmodiques; la langue fut parfois un peu humide et rouge antérieurement, les selles toujours involontaires, plus ou moins fréquentes, et les matières féca- les ordinairement mêlées de quelques vers. Le 8, le ventre était plut, le pouls régulier, à cent quatre. II n'y eut pas de taches lenticulaires à la poitrine ou à l'abdomen. — La po- tion tonique fut discontinuée du 8 au 10.
Le lo : même stupeur, mouvements spasmodiques des bras plus marqués, presque continuels; contractions spas- modiques des grands pectoraux très sensibles; selles un peu moins nombreuses, eschare au sacrum. ( Pot. nom. av. suif, de k. et musc. au. 2 grammes; lav. foment. arum. kk. en m pli.)
11 y eut dans la journée des alternatives d'assoupissement et de délire, et depuis lors jusqu'au 17, jour de la mort, voici ce que j'observai. L'assoupissement persista, quelque- fois interrompu par ta délire; le 15, on entendit le malade i : \h! mon Dieu! Le 10, c'était des grognements continuels. Il y eut de fréquents mouvements spasmodi- ques dans les épaules , du 12 au 16; l'cschare au sacrum était tombée le 15. — Le ii, un érysi pèle œdémateux se manifesta à l'avant-bras droit, et ne parut pas faire beau- coup de progrès les jours suivants. — Les selles furent
srAsaiiî ■ 19
rares du 10 au 12, moulées le 13, peu fréquentes et invo- lontaires dans la suite. Le ventre souple et indolent, non niétéorisé, le 13, l'était à un degré remarquable le 17.— La chaleur fut toujours élevée.
On supprima la potion tonique le 12, et trois jours de suite on ordonna un bain , pendant lequel on appliquait de la glace sur la tète du malade , qui mourut peu après la vi- site du 17.
OUVERTURE DU CADAVRE VINGT -TROIS HEURES APRES Là MORT,
État extérieur. Amaigrissement médiocre , point de ver- gelures antérieurement ou sur les côtes du corps. — Avant- bras droit volumineux et rouge, comme pendant la vie, dans ses deux, tiers supérieurs 5 endurcissement et épaissis- scment de la peau , dans la môme étendue ; et, au-dessous, matière puriforme nuancée de rose , d'une bonne consis- tance, traversée par un plus ou moins grand nombre de fi lamenta de tissu cellulaire. Môme matière entre les couches superficielle et profonde des muscles correspondants, qu n'offraient, d'ailleurs, pour toute altération, que quelquesi ecchymoses à leur périphérie.
Tête. Infiltration sous-arachnoïdienne peu considérable. Subslanee corticale d'un rose tendre ; la médullaire très sablée de sang , avec un léger coup d'œil lilas : l'une et l'au- tre d'une bonne consistance. Environ une cuillerée de séro- sité dans chacun des ventricules latéraux. Cervelet dans l'état naturel (1).
Cou. Le pharynx, l'épiglotte et le larynx n'offraient rien de remarquable, et la trachée-artère était seulement un peu rouge.
(l) Ce sujet ayant été abandonne aux dissections pour les muscles «lu «los, je n'ai pu ouvrir k rachis,
IL 4
iO 3e PARUE, SYMPTÔMES.
Poitrine. Il y avait deux cuillerées de sérosité dans le péricarde ; le cœur et l'aorte étaient parfaitement sains. — Le poumon gauche, libre, mou, et généralement rose, offrait de larges plaques d'un rouge noirâtre , plus ou moins épaisses, dures, sans air, à sa partie postérieure; les unes grenues, les autres non. Celles-ci, comme splénisées, don- naient, par expression, une médiocre quantité de sang noirâtre, sans air. Le poumon droit présentait quelques adhérences, était plus lourd que le gauche, dans sa partie inférieure où se trouvaient des plaques noirâtres plus grandes et plus épaisses que dans ce dernier. Il était en- goué dans le reste de son étendue. — Les bronches étaient minces et rouges et contenaient un peu de mucus de même couleur.
abdomen. L'œsophage était sain, coloré en rose inférieure- ment.— L'estomac avait un médiocre volume, contenait une petite quantité de bile. Sa membrane muqueuse était d'un jaune-clair dansle grand cul-de-sac, grisâtre ailleurs le long de la grande courbure surtout; tapissée, dans toute son étendue, le grand cul-de- sac excepté, par une couchée paisse d'un mucus visqueux, difficile à en détacher après deux heures de macération: elle avait une épaisseur convenable, et un peu plus de consistance que d'ordinaire, dansle grand cul -de-sac où elle fournissait, par traction, des lambeaux de 10 millimètres, comme le long delà grande courbure. — L'intestin grôle contenait une grande quantité débile mêlée de mucus. Sa membrane interne était généralement grisâtre, mince, d'une bonne consistance; toutes les pla- ques elliptiques del'ileum étaient plus ou moins rouges et Baillantes, el leur rougeur et leur saillie augmentaient à nesure qu'os s'approchait du eœcum, près duquel cinq d'entre elles étaient ulcérées. Elles formaient, dans les 13
SPAs.MtS. ,')1
derniers décimètres, une saillie de pins de 2 millimètres, principalement due à la muqueuse qui concourait à leur formation , laquelle avait plus d'un millimètre d'épaisseur, était ramollie, de manière à ne pouvoir être enlevée par traction. Au delà, en approchant du jéjunum, l'épaissis- semenlet le ramollissement étaient moindres. Le tissu cel- lulaire correspondant avait une épaisseur et une coloration proportionnées à celles de la muqueuse; il était à découvert ou en partie détruit sur les plaques ulcérées.— Le gros in- testin était doublé de volume dans la première moitié de sa longueur, où se trouvait une assez grande quantité de ma- tière jaunâtre, pultacée. Sa membrane muqueuse était ra- mollie, un peu épaissie et rougeàtre dans le cœcum et dans le colon droit-, puis successivement moins épaisse, moins molle et d'une couleur naturelle. Elle offrait, dans sa portion la plus ramollie, vingt ulcérations de 15 à 30 millimètres de surface, et presque autant de tumeurs aplaties, moins larges encore, principalement dues à l'épaississement du tissu cellulaire, rouge , homogène , et ferme dans ce point. Trois de ces tumeurs étaient légèrement ulcérées. — Les glandes du mésentère correspondantes à l'iléum , et celles de mésocolon , étaient d'un rouge peu foncé, ou grisâtres et bleuâtres, volumineuses et très ramollies. Les mésentéri- ques avaient la grosseur d'une noisette ou d'une aveline. — Le foie était sain, la bile de la vésicule roussàtre et verdâ- tre, très liquide. — La rate et les autres viscères de l'abdo- men étaient dans l'état naturel.
Bien que la diarrhée ait été considérable, cependant les symptômes cérébraux, ledelire, l'assoupissement, les mou- vements spasmoiliques des membres, étaient i ommails. et ils donnent à l'affection du sujet quelque chose de la
.')2 3« PARTIE, SYMPTOMES.
forme des fièvres dites ataxiques. Après avoir eu, pendant huit jours, des malaises, de la sensibilité au froid , et moins d'appétit qu'à l'ordinaire, sans se croire malade, le sujet éprouve un frisson violent , des maux de tête , de la consti- pation; l'anorexie est complète, et bientôt la diarrhée sur- vient ; au quinzième jour, ou au milieu du cours de l'affec- tion , les facultés intellectuelles sont plus ou moins profon- dément altérées, il y a de la somnolence, des mouvements spasmodiques presque continuels dans les membres : ces spasmes persistent au môme degré plusieurs jours de suite, puis offrent quelques rémissions, deviennent considérables six jours avant la mort, atteignent les grands pectoraux, les muscles des lèvres et de la mâchoire inférieure; cette augmentation des spasmes parait précéder de quelques jours le développement d'un érysipèle phlegmoneux : et , à l'ouverture du cadavre, on trouve la substance corticale du cerveau universellement rose, la médullaire très injec- tée, d'un blanc- lilas ; les plaques elliptiques de l'iléum plus ovi moins profondément altérées, la membrane muqueuse du colon très ramollie et ulcérée dans sa première moitié ; une large ulcération au sacrum , et une assez grande quan- tité de pus dans le tissu cellulaire superficiel et profond du bras et de l'avant-brasdu côté droit. C'est-à-dire que, malgré la forme ataxique de la maladie, sa marche fut la même que dans les cas les plus ordinaires, dans ceux où les symptômes cérébraux sont légers; les lésions les plus profondes, il en apparence les plus anciennes, ayant eu lieu dans l'iléum et près du cœcum. En sorte que la variété, le nombre et le degré des symptômes cérébraux peuvent, comme nousl'avons déjà TU, donner à l'affection une forme différente de la plus habituelle, sans que son caractère fondamental, l'altéra- tion des plaques de l'intestin grêle, cesse d'être le môme.
WASMF.S. 53
D'ailleurs, on se demandera. peut-être encore, malgré les faits rapportés plus haut, si les symptômes cérébraux ne se- raient, pas liés aux lésions appréciables du cerveau _, à la teinte rose de la substance corticale , et à cette nuance lilas, extrêmement faible, de la substance médullaire, qui a été ob- servée. Je ne puis répéter à ce sujet que ce que j'ai dit plus haut, que la couleur rose de la substance corticale a égale- ment lieu dans les cas où les malades ont éprouvé des symp- tômes cérébraux plus ou moins intenses, et dans ceux où les facultés de l'intelligence n'ont pas été troublées; chez les sujets qui ont succombé à l'affection typhoïde et chez ceux qui ont été emportés par d'autres maladies aiguës; quelle se développe très probablement dans les derniers jours de l'existence ; qu'il est par conséquent impossible de lui rap- porter les symptômes dont il s'agit. Quant à la couleur blanche un peu lilas de la substance médullaire, c'est le seul cas de cette espèce qui se soit offert à mon observation -, et comment risquer l'interprétation d'un fait unique ?
L'étendue, la profondeur, et surtout la rapidité de la marche de l'érysipèle , méritent d'être remarquées; cette marche rapide ayant lieu dans nombre d'affections qui se développent dans les derniers jours des maladies aiguës. La permanence de la couleur rouge de la peau doit aussi être signalée, comme un des faits nombreux qui prouvent que la rougeur réellement inflammatoire ne disparaît pas complè- tement , à beaucoup près , après la mort . — Enfin, je rappel- lerai à l'attention de ceux qui s'exagèrent l'effet des médi- caments, et surtout, des toniques , que la membrane mu- queuse de l'estomac était presque dans l'état naturel, mal- gré les excitants et les toniques forts qui avaient été ad- ministrés.
"54 3' FARTIF, SYMPTÔMES.
XXXVI» OBSERVATION.
Douleurs dans les membres et dans les lombes pendant huit jours ; au huitième, céphalalgie, eTîlouissemeiits, picotements aux yeux, bour- donnements, nause'es, douleurs à l'e'pigastre et à l'ombilic; puis sou- bresauts il.uis les tentions, mouvements spasmodiques dan- les poi- gnets, bientôt étendus aux muscles de la face, contraction perma- nente des bras, somnolence, délire, diarrhée, météorisme ; mort au yingt içT*e jour. — Substance corticale du cerveau et du cervelet, des corps striés et des corps rhomboïdaux, d'un rose violet; plaques elliptiques de riléum grisâtres et bleuâtres, ulcérées ou non ulcérées; glandes mésentériques correspondantes de même couleur, avec quel- ques foyers de pus ; muqueuse gastrique ramollie et amincie, etc.
lu cordonnier, âge de vingt-deux ans, d'une taille moyenne, de peu d'embonpoint, fut admis à l'hôpital de la Charité le 2 août 1824. Sujet aux maux de tête et au ca- tarrhe pulmonaire depuis l'enfance, il avait eu, à l'âge de quinze ans, une jaunisse, et, à dix-sept, unepéripneumonie. Il ne faisait d'excès en aucun genre, et était à Paris depuis un mois. Sa maladie avait été précédée, pendant huit jours, de douleurs dans les membres et dans les lombes , avait dé- buté, au milieu de la nuit, par une céphalalgie assez in- tense , des picotements aux yeux , des bourdonnements d'orciik-s, des etourdissements , la chaleur, la soif, des nausées, des douleurs à l'épigastre, à l'ombilic et dans d'au- tres punies dît ventre. Ces symptômes avaient continué, il y avait eu des sueurs chaque nuit ; mais de frissons, aucun. — Quand le malade fut admis à l'hôpital , le quatrième jour de l'affectioD , on ne lui avait ordonné aucune espèce de mé- dicament; il s'ôtail lenu à une diète sévère, avait pris du thé pour boisson.
Le3, commencement du cinquième jour : figure un peu rouge el dépourvue d'expression, yeux larmoyants, rou-
SMS MI. S. ."),")
geâlres et un peu douloureux; somnolence par intervalles, réponses justes, parfois signes d'impatience, nulles douleurs dans les membres, soubresauts fréquents des tendons, mou- vements spasmodiques très sensibles aux poignets ; langue rouge et humide à la pointe, blanchâtre et moins humide au delà ; soif assez vive, anorexie, point de nausées depuis deux jours-, douleurs à l'ombilic , moindres à l'épigastre, augmentées par la pression, une selle liquide (constipation jusque-là) : injection médiocre des téguments, chaleur éle- vée, pouls à quatre-vingt-quinze , sans largeur : respiration médiocrement accélérée. (Saignée de 360 grammes; petit- lait; orge oorym. bis. )
Le sang se prit en un caillot sans couenne et presque sans retrait; il y eut quatre selles liquides dans la journée. Le lendemain 4 : stupeur légère, céphalalgie gravative , yeux larmoyants , mais sans douleurs; marnes mouvements spas- modiques du poignet que la veille; langue sèche, lisse et sans rougttur; sensibilité à la pression dans la fosse iliaque, droite; chaleur forte, pouls à cent, peau un peu violacée: ni sudamina, ni taches roses lenticulaires.
Le 5 : nulle céphalalgie, figure béate , agitation presque continuelle de la tête, en arrière et en avant ; somnolence , abolition presque complète delà mémoire; langue imparfai- tement tirée, humide antérieurement, un peu rouge en ar- rière; léger météorisme; deux taches roses, lenticulaires, sur l'abdomen ; chaleur forte , pouls un peu vacillant , à quatre-vingt-quinze.
Il veut desselles involontaires dans la journée, et un dé- lire non interrompu pendant la nuit; le 6, ce délire persis- tait, les réponses du malade n'étaient pas en rapport avec les questions que je lui adressais, ses yeux étaient lar- moyants, le gauche rouge, la tête agitée comme, la veille, les
5C 3* PARTIE, SYMPTÔMES.
sourcils ordinairement froncés, les paupières souvent closes, rhypogastre sensible à la pression. {Petit-lait; limon. 1er.; lav. émoll.; vésic. aux jamb.).
Le délire continua, et le malade fut attaché toute la nuit. Le 7 au matin : cris presque continuels , intelligence nulle, mouvements spasmodiques des paupières et des lèvres, figure assez animée , œil gauche moins rouge que le 6 ; lan- gue humide et un peu rose , ventre très météorisé , selles involontaires ( quelques vers lombrics ) : pouls peu accé- lère, régulier. (Huit sangs, à chaq. oreille; oxicrat froid sur la tête préalablement rasée.)
Les cris redoublèrent quand on appliqua des compresses froides sur la tête , et le jour et la nuit le malade ne cessa de parler, de crier ou de chanter. Le 8 : môme délire, con- traction spasmodique des lèvres, langue sèche, ventre peu développé, selles fréquentes; pouls à quatre-vingt-dix, chaleur moyenne. (Limon, ter. ; lav. em. ; sinap.).
Jusqu'au lendemain, alternative d'assoupissement et de cris. Le 9 : somnolence difficile à vaincre , rougeur érysipé- lateuse au bas des jambes. (Limon.; infus. de kl;, orid. ; pot. gom. av. cxt. de kk. 1 grammes. )
Du 10 au 20 , jour de la mort , le délire fut presque con- tinuel, souvent accompagné de cris et de vociférations ; il y eut de L'assoupissement dans leur intervalle, et rarement un peu de calme, si ce n'est dans les bains qui furent journelle- ment administrés du 11 au 17, pendant un espace de temps qui variait d'une à trois heures. Le malade parut môme recouvrer l'usage de l'intelligence le 12, pendant qu'il était au bain, se plaignant que l'eau était froide. Ses cris ne diminuèrent que dans les derniers jours de la vie. — Ses bras offraient des mouvements spasmodiques très mar- ques le 11; et, du 18 au 20, ces mouvements, beaucoup plus
Sl'ASMF.S. .
rares, interrompaient de loin en loin une raideur presque constante des mômes parties, qu'on ne pouvail chercher à vaincre sans faire crier le malade. Le 12, il assurait avoir la sensation d'un froid universel , plus considérable aux pieds qu'ailleurs; ajoutant que c'était inconcevable dans une saison chaude. Le 15, il y avait, sous l'épiderme du coude-pied gauche, une matière purulente assez épaisse. L'œil gauche, qui n'était plus rouge le 12, le redevint le 14, et Tétait encore le 17 , comme celui du côté droit. — La lan- gue , humide et naturelle le 10, fut sèche ensuite, la soif toujours vive, et le malade ne prenait que la moitié de son infusion amère. Il n'y eut ni nausées ni vomissements ; les selles furent toujours involontaires, médiocrement fréquen- tes, dépourvues de glaires et de sang ; l'abdomen plat, insen- sible à la plus forte pression , offrant beaucoup de taches roses, lenticulaires le 11, et de nombreux sudamina le 15. — La chaleur fut toujours considérable; elle était halitueuse le 15, et la figure couverte de grosses gouttes de sueur le 18. Le pouls, qui était à quatre-vingt-neuf le 11, fut à cent dix après le 13 ; et la toux, qui débuta avec le délire, fut légère. Le bruit respiratoire était naturel le 16.
Le malade mourut à cinq heures du soir, ayant eu , dans la matinée du même jour, les bras raides, demi-fléchis et inflexibles, la mâchoire inférieure et les épaules agitées de mouvements spasmodiques, le pouls tremblotant.
La limonade , l'infusion et la potion amère, fuient conti- nuées, et la dose d'extrail de quinquina augmentée succes- sivement , de manière que le malade en prenait 12 gram- mes, avec 1 gramme d'éther, le 16. On prescrivit, en outre, des frictions avec S grammes d'onguent mercuriel, le 18.
58 3 PARTIR, SYMPTÔMES.
OUVERTURE OU CADAVRE TRENTE-HCIT HETRES APRES LA MORT.
État extérieur Amaigrissement médiocre ; glandes ingui- nales volumineuses et d'un rouge violet, de chaque côté: muscles d'une couleur et d'une consistance convenables.
Tête. Quelques granulations nées de l'arachnoïde, dans la région occipitale, près delà faux, là ou les deux feuillets de la membrane adhéraient entre eux, dans la superficie de 600 millimètres environ. Nulle infiltration sous-arachnoï- dienae; deux petites cuillerées de sérosité dans chacun des ventricules latéraux, Pie-mère un peu plus ferme qu'à l'or- dinaire-, substance corticale d'un rose bleuâtre, bien pro- noncé,- celle du cervelet, les corps striés et les corps rhom- boidaux. avaient la même couleur, sans être ramollis.
Cou. Pharynx, amygdales, épiglotte et larynx, dans l'é- tat naturel; trachée-artère d'un rouge cramoisi-, sa mem- brane muqueuse d'ailleurs saine.
Poitrine. Cœur pâle et un peu mou. Aorte rouge à sa naissance, n'offrant , au-delà , que quelques taches de même couleur.— Adhérences celluleuses, partielles, entre les pou- mons et les plèvres; un kilogramme de sérosité rouge, un peu trouble, dans celle du coté gauche-, un peu moins à droite. Lobe inférieur gauche lourd, d'un rouge noirâtre à l'extérieur et à l'intérieur, dans la plus grande partie de sa masse, ne contenant un peu d'air qu'antérieurement ; ferme, non hépatisé ailleurs, où l'on ne reconnaissait plus, au mi- lieu d'un tissu homogène, (pie les vaisseaux d'un certain calibre qui contenaient une médiocre quantité de sang. Môme état, moins prononcé el moins général, do lobe droil correspondant.
tbdomen. Les intestins, I;1 gros surtout, riaient distendus
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par des gaz. — L'œsophage offrait, à sa partie inférieure , une ulcération de 22 millimètres de haut sur 11 de large, due à la destruction de la membrane muqueuse seule. — L'estomac avait un volume médiocre , contenait une petite quantité de liquide (rouble et grisâtre , offrait , intérieure- ment, deux nuances principales: l'une rougeâtre, comme aérolaire, occupant la moitié du grand cul-de-sac ; l'autre grisâtre et bleuâtre, successivement moins pror oncéè en approchant du pylore, un p« u avant lequel elle finissait. On voyait, dans sa grosse extrémité, six bandes blanchâtres et bleuâtres, de 110 à MO millimètres de haut, sur 9 à 11 de large : la membrane muqueuse était détruite, ou très mince et ramollie dans les points correspondants , et elle devenait progressivement plus épaisse et plus consistante, à mesure qu'on l'examinait dans un point plus rapproché des parties saines. A cet amincissement par bandes, s'en joignait un au- tre sous forme d'une plaque irrégulièrement arrondie, de 15 centimètres de surface, dans le grand cul-de-sac. La mu- queuse avait , dans l'intervalle de ces lésions, une épaisseur et une consistance assez convenables, était mamelonnée près du grand cul-de-sac , et couverte d'une couche épaisse de mucus là où clleétait grisâtre.— L'intestin grêle contenait un assez grande quantité de bile d'un jaune foncé, tendant au brun. Sa membrane muqueuse était très ramollie dans la longueur d'un mètre , près du cœcum , d'une bonne consis- tance ailleurs. Il y avait, dans toute l'étendue de l'iléum , un grand nombre de plaques elliptiques grisâtres et bleuâ- tres, peu saillantes, ulcérées dans le mètre voisin de la val- vule iléo-cœcale. Quelques-unes d'entre elles offraient quatre à cinq petites ulcérations, les autres une seule, et alors cette ulcérai ion était considérable, comprenait la presque totalité de la plaque. Toutes présentaient la membrane
GO 3e PARTIT, SYMPTÔMES.
musculaire à nu. légèrement épaissie et rouge: leurs bords étaient affaissés dans toute ou seulement dans une partie de leur étendue ; et le tissu cellulaire de la plaque, qu'elle fût ou non ulcérée, en avait la couleur, était épaissi, et four- nissait un peu de sang quand on y pratiquait des incisions. L'intestin grêle offrait encore, contre la valvule iléo-cœcale, dans la longueur de 80 millimètres et dans presque toute sa circonférence, une couleur grise et bleuâtre, plusieurs pe- tites ulcérations, les unes profondes, les autres superfi- cielles; et le tissu cellulaire sous-muqueux de cette portion de l'organe était plus épais et plus rempli de sang que celui des plaques elliptiques. —Le gros intestin contenait une médiocre quantité de matières fécales, pultacées dans la plus grande partie de s:i longueur, moulées dans le rectum ; et , à part trois petites ulcérations de 5 millimètres de dia- mètre, dans le cœcum, qui offraient la tunique musculaire à nu, sa membrane muqueuse était dans l'état naturel.— Deux glandes mésentériques, placées près du cœcum, avaient la grosseur d'une aveline, contenaient quelques pe- tits foyers de pus; les autres étaient bleuâtres et médiocre- ment augmentées de volume. Les glandes mésocoliles et gastro-épiploïques avaient la même couleur, et ces dernières un volume assez considérable. — Le foie était pâle et mol- lasse; la vésicule biliaire saine, et elle contenait un liquide trouble et grisâtre. — La rate était triplée de volume, bleuâ- tre et noirâtre, à l'intérieur surtout, et d'une bonne consis- tance. — La substance corticale des reins avait une couleur rouge-foncé.— Le reste était sain.
Cette observation est, comme on voit, tout aussi intéres- sante qtfela précédente; à peu près aux mêmes titres, et, plus qu'elle menre. d|c rappelle la fièvre ataxique; car lîi
SPASMES. Cl
diarrhée fut pou considérable, et les symptômes nerveux fu- ient aussi variés que graves. Eu effet , après huit jours de douleurs dans les membres, le sujet éprouve des nausées, des douleurs à l'épigastre et dans le reste du ventre, des bour- donnements d'oreilles, des picotements aux yeux, des élour- dissements; les nausées disparaissent au troisième jour de leur début, et, au cinquième, on observe de la somnolence, des soubresauts dans les tendons, des mouvements spasmo- diques des poignets-, le lendemain la mémoire est presque abolie, l'assoupissement plus profond, les spasmes conti- nuent, puis le délire se joint à ces symptômes qui persistent, à divers degrés, jusqu'à la mort; et on observe successive- ment le froncement des sourcils, la contraction spasmo- dique des lèvres, la raideur des bras, l'agitation de la mâ- choire inférieure. Quelques jours avant le terme fatal, le malade se plaint d'une sensation insolite de froid, malgré la chaleur de la peau -, et, à l'ouverture du cadavre, on trouve la substance corticale du cerveau et du cervelet, et tout ce qui dans l'un et dans l'autre est formé de matière grise, d'un rose-violet plus ou moins fonce; la membrane muqueuse de l'estomac mamelonnée, ramollie, amincie ou détruite, et des ulcérations à bords affaissés dans l'intestin grêle. C'est-à- dire que, malgré une forme assez éloignée de la plus ordi- naire, la lésion fondamentale, l'altération des plaques ellip- tiques de L'jjpum, était la même que dans tous les cas précédemment exposés. — J'observerai d'ailleurs, relative- ment à ces plaques, qu'elles étaient bleuâtres, que les ulcé- rations étaient affaissées à leur pourtour, qu'elles offraient par conséquent le caractère de celles qui sont en voie de guérison, dont l'état pathologique rétrograde; qu'il devient, par cela même , extrêmement probable, que le début de la maladie était le même que celui des douleurs dans les mem-
(32 3e PAIiTIf-, SYMPTOMES.
bres, et qu'il a précédé de huit jours le développement des phénomènes fébriles et des symptômes gastriques.
La couleur rose-violet des parties formées par la substance grise était-elle liée au trouble des fonctions cérébrales ? Les réflexions faites à cet égard, à la suite de l'observation précé- dente, étant appliquâmes à celle-ci, je n'y reviendrai pas; et je me bornerai à rappeler que le sujet qui nous occupe est le seul, parmi ceux qui ont succombé à l'affection typhoïde, chez lequel j'ai trouvé la substance grise de la masse encé- phalique aussi universellement violacée; qu'un cas semblable sVst rencontré parmi les individus morts d'autres maladies aiguës et qui n'avaient point éprouvé de symptômes spas- modiques ; que c'est une raison de ne pas hasarder ici une explication, et surtout de répondre affirmativement à la question proposée.
Il n'est pas possible, d'ailleurs, d'attribuer à l'état de l'es- tomac une part dans les mouvements spismodiques-, car le ramollissement et l'amincissement de la muqueuse gastri- que, qui se développent peut-être après la mort, ont lieu, comme nous avons vu , dans le cours d'un grand nombre de maladies aiguës; et l'affection typhoïde est à peu près la seule où on observe le symptôme dont il s'agit.
2° Chez les sujets atteints d'affectiuii typhoïde, qui ont guéri.
Les symptômes spasmodiques furent moins nombreux , di' moins longue durée, beaucoup moins fréquents chez les sujets qui guérirent que chez ceux qui succombèrent; en sorte que je ne les ai observés que chez six des cinquante* sept dont l'alViTiKiii fut plus ou moins grave. Ils doivent dune rendre te pronostic très fâcheux, et ils ont, sous ce rapport, plus d importance qu aucun autre symptôme.C'était
SPASMES. 63
des soubresauts des tendons chez trois malades, des crampes chez un quatrième, des mouvements spasmodiques des lè- vres et de la mâchoire inférieure chez les deux derniers. Les soubresauts eurent lieu pondant un jour dans deux cas , pendant cinq dans le troisième, aux huitième, dixième et quarantième de l'affection. Les crampes se firent sentir du sixième au dixième jour ; les spasmesdela mâchoire in- férieure, aux dixième et quaranlième.
Il est d'ailleurs fort remarquable qu'il n'y eut , dans au- cun des cas dont il s'agit, de contraction permanente des muscles du cou et des bras-, ce qui doit faire considérer ce signe comme presque absolument mortel.
Des faits semblables à ceux qui viennent d'être exposés ont été observés par M. Barth qui,,sur 100 cas d'affection ty- phoïde, a vu les soubresauts des tendons chez sept sujets, dont six ont guéri et toujours après un espace de temps considérable; de manière que celui dont la maladie a été la plus courte, n'a quitté l'hôpital qu'au cinquante-cinquième jour à partir du début. Le même médecin a observé la car- pbologie dans un cas mortel au vingt-sixième jour-, la con- tracture des membres supérieurs chez deux sujets dont un a succombé , tandis que l'autre, le plus jeune, âgé de 27 ans. guérit, mais seulement après quatre-vingt-dix-sept jours de maladie. Un dernier , qui a aussi guéri , eut une immobilité cataleptiforme.
Les symptômes qui sont l'objet spécial de ce paragraphe existent aussi dans l'enfance , et le pronostic à en tirer sé- rail à peu près aussi grave à celte époque de la vie que dans un âge plus avancé, d'après les fails recueillis par M. Rilliet. Ce médecin a, en effet, observé la carphologie
(il 3< PARTIE, SYMPTÔMES.
chez quatre sujets, dont trois ont succombé ; des mouve- ments choréiques dans les quinze derniers jours de la ma- ladie , chez un malade qui fut emporté au trente-septième ; des soubresauts de tendons dans deux cas, dont un relatif à un jeune sujet qui eut de la raideur au tronc et mourut : enfin, M.Rilliet a observé cette raideur dans trois cas dont la terminaison a été funeste. J'ajoute que les nouveaux faits recueillis par lui, dans les six premiers mois de cette année, confirment ceux-ci, et ne changent pas sensiblement la proportion des diverses espèces de spasmes que je viens d'exposer. Mais sous ce rapport, et sous le rapport du pronostic et du nombre, les résultats de l'observation de M*. Taupin sont très différents , à tel point qu'on est tente de croire que ces Messieurs n'ont pas désigné les mêmes choses par les mêmes noms. En effet, M. Taupin assure avoir obervé la carphologie dans presque tous les cas, le plus sou- vent bornée à des secousses dans les tendons (79 fois sur 121 sujets). Douze fois, dans des cas graves, il a vu des efforts continuels pour écarter des obstacles imaginaires; dans cinq cas il a observé une raideur marquée des membres et surtout delà colonne vertébrale; et une fille de quatorze ans qui a succombé, eut, pendant plusieurs heures, de véritables ac- cidents cataleptiques : en sorte que, d'après M. Taupin, la carphologie n'aurait aucune importance dans le jeune âge par rapport au pronostic, puisque sur 121 sujets, parmi les- quels 21 ont succombé, 79 eurent de la carphologie.
3° Chez les sujets atteints d'autres maladies aigut
Parmi ces sujets , entre lesquels je ne compte pas ceux qui fuient affectés de la colique des peintres, quatre seule- ment, sur plus de cinq cents, eurent des soubresauts dans
ETAT DES i OM.l 3. 65
les tendons ou des crampes. Les soubresauts eurent lieu dans un cas de péritonite, au neuvième jour de l'affec- tion , qui fut mortelle au onzième , et chez un péripneumo- nique qui entra en convalescence à la môme époque. Il y eut des crampes chez deux malades affectés d'entérite.
Si la grande différence observée entre les sujets qui meu- rent d'affection typhoïde et ceux qui en guérissent, relative- ment aux spasmes, rend ce symptôme précieux pour le pro- nostic , son extrême rareté dans le cours des autres maladies aiguës en ferait un auxiliaire utile, sous le rapport du dia- gnostic, s'il venait à se développer dans le cours d'une affec- tion grave, dont le caractère aurait été douteux Justine là Les mouvements ou les raideurs spasmodiques forment donc , comme l'assoupissement , un des signes les plus pré- cieux de l'affection typhoïde, en môme temps qu'ils indi- quent que si le trouble des fonctions cérébrales est géné- ralement proportionné au mouvement fébrile, il reçoit des modifications importantes de l'organe primitivement affecté , peut-être aussi delà cause de la maladie , et même de l'alté- ration primitive ou consécutive du sang.
§5.
De l'état îles forces. 1° Chez les sujets morts d'affection typhoïde.
Si l'affaiblissement est un des premiers effets des maladies aiguës, il ne se montre dans aucune au même degré que dans celle dont il s'agit , et il forme, par cette raison, un de ses caractères distinclifs.
De vingt-neuf sujets chez lesquels j'ai noté avec soin les II. 5
(i(i 3 PARTIE, SYMPTOMES.
circonstances principales de ce symptôme, dix furent obli- gés de quitter leurs occupations le jour du début, un autre le deuxième, quatre le troisième; et trois des premiers se mirent au lit le premir jour (obs. 15, 36, 53).
Quelle que fût l'époque à laquelle les malades avaient pris le lit ou quitté leurs occupations, l'affaissement devenait bientôt considérable ; ils avaient de la peine à pourvoir à leurs besoins , ou môme à faire quelques mouvements pour changer de place ; ils restaient dans la môme position , de manière qu'on était obligé de les en changer, pour éviter les effets de la compression. Dans cet état, ils ressem- blaient véritablement à des corps inertes. Un d'entre eux, qui mourut le vingt-cinquième jour de l'affection et n'eut de délire que le dernier, se trouvait si faible, avait tant de répugnance pour toute espèce de mouvement , à compter du dix-huitième jour, qu'il ne voulait pas même consentir à ce qu'on le mit à son séant. Cette extrême prostration eut lieu au dix-septième jour de l'affection chez un autre sujet qui mourut le vingt-huitième ( obs. 39). Chez deux malades emportés le huitième jour, les bras étaient comme paralysés le septième (obs. 11 , 13 ). Une femme qui se trouvait dans ce degré de faiblesse qui simule la paralysie , et qui mourut au treizième jour de l'affection, se laissait pincer les bras le douzième, sans donner aucun signe de douleur-, et elle me dit, le lendemain , qu'elle se rappelait bien avoir été pincée, que si elle n'avait pas retiré son bras, la veille, c'était faute de force.
Toutefois, bien que le plus haut degré de faiblesse accom- pagnât d'ordinaire l'affection typhoïde, il y eut quelques exception* assez remarquables à cette loi. Ainsi, un sujet mort après vingt-quatre jours de maladie, et dont je vais bietatol donner l'histoire, travailla pendant les quinze pre-
tiAi de.s rouets. 07
miers , et put encore descendre de son lit le jour même de sa mort (obs. 37). Un de ceux qui succombèrent au huitième jour put se promener dans les quatre premiers. Un autre, qui mourut le quatorzième, vint, le dixième, à pied, à l'hô- pital. Un quatrième se mettait sans aide, à sun séant, qua- tre jours avant le terme fatal ; et nous verrons, parmi les cas dans lesquels l'affection a été latente, des exemples bien plus remarquables encore du fait dont il s'agit.
La syncope, dont la cause est peut être la même, dans quelques cas que celle de la faiblesse générale, eut lieu au onzième jour de la maladie, chez un sujet qui ne fut em- porté que le trente-cinquième (obs. 14).
Mais à quelle cause rapporter l'extrême faiblesse obser- vée dans la majeure partie des cas d'affection typhoïde? Quand cette faiblesse ne se développait qu'à une époque éloignée du début, on pouvait, jusqu'à un certain point, s'en rendre compte par l'état des organes et le trouble pro- longé des fonctions, bien qu'une prostration aussi considé- rable n'ait pas lieu dans les autres affections aiguës, aux derniers jours de la vie, malgré de graves lésions. Mais dans les cas où l'affaiblissement était considérable dès le début, il ne pouvait pas en être ainsi; on ne pouvait l'atlri- baer à la diarrhée, qui n'existait pas, ou ne faisait que commencer; ni aux douleurs de ventre, toujours peu con- sidérables; ni à la céphalalgie, ordinairement obtuse, cl dont le plus haut degré ne produit pas, dans les autres affections, l'affaiblissement dont il s'agit; ni à une lésion appréciable du cerveau , par Les raisons précédemment in- diquées; nia l'étal de la membrane muqueuse de l'esto- mac, qui était saine dans plusieurs cas où la prostration était extrême, el dont l'altération ne commençait d'ailleurs qu'à une époque plus ou moins éloignée du début. Il fallait
nécessairement alors recourir, pour expliquer cette fai- blesse, à la lésion spéciale commençai) te de l'intestin grêle, agissant sympatiquement sur le cerveau ; ou bien encore à la cause, quelle qu'elle soit, qui avait amené le déve- loppement de cette lésion.
Je ne parle pas du ramollissement du cœur, du foie et de la rate , vu que cette altération n'a lieu qu'à une époque plus ou moins éloignée du début, qu'elle est, comme le ra- mollissement simple de la membrane muqueuse de l'esto- mac, très fréquente dans le cours des autres maladies ai- guës , que la nature et le début de son développement sont également indéterminés. D'ailleurs, chez douze sujets morts du huitième au vingt-huitième jour de l'affection, qui avaient le foie et le cœur sains, la rate médiocrement ramollie et doublée de volume environ, la faiblesse fut mé- diocre ou considérable, dans un égal nombre de cas.
Passons maintenant à l'histoire du malade dont la fai- blesse s'est développée tardivement.
XXXVII* OBSERVATION.
Diminution de l'appétit, selles rares, douleurs dans les membres, quel- ques frissons dans les premier» jours ; puis selles fréquentes, dou- leurs i)«' ventre, anorexie complète; faiblesse considérable dan- la dernière semaine, léger délire ; mort au vingt -quatrième jour. — Plaques tic l'iléum rouges, ramollies, ulcérées et non ulcérées j glan •le- mésentériques correspondantes rouges, volumineuses, très ra- mollies, etc.
Un limonadier, âgé de vingt-huit ans, dune constitution médiocrement forte, habituellement bien portant, sobre et (lune conduite régulière, travaillant dix-huit heures par jour environ, fut admis à l'hôpital de la Charité le 5 août 1822.11 était à Paris depuis quatre ans, accusait quinze jours de maladie, et avail travaillé jusqu'au moment de
ÉTAT DES FORCES. 69
venir à* l'hôpital, où il fut néanmoins conduit en voiture, ne se sentant pas la force de faire le chemin à pied.
Dans les huit premiers jours, céphalalgie, rêves fré- quents, douleurs dans les membres, bouche pâteuse et amère, diminution considérable de l'appétit, ce qui n'em- pèchaitpas le malade de manger presque autant que decou- tume; ventre indolent, selles rares, frissons par inter- valles. Ces huit jours passés, un purgatif, dont l'excipient était l'eau-de-vie, causa peu de malaise d'abord, et fut suivi, deux heures après avoir été pris , de coliques violen- tes et de selles nombreuses , bientôt portées au nombre de vingt. Dès-lors, la diarrhée fut considérable, le ventre dou- loureux, du côté gauche surtout, quand le malade résis- tait au besoin d'aller à la selle, l'anorexie complète; l'épi- gastre fut toujours indolent; la céphalalgie cessa, il y eut des éblouissementset parfois des bourdonnements d'oreille; d'ailleurs, ni toux, ni nausées, ni frissons, ni douleurs de gorge. Le malade prit de la soupe pour tout aliment, et, pour boisson, une infusion de tilleul, ou de l'eau vineuse.
Le 6 août : décubitus indifférent, figure violacée, yeux assez brillants, légère teinte de rose autour de la cornée, mémoire exacte, réponses nettes et précises; ni céphalal- gie , ni bourdonnements d'oreilles, ni douleurs dans les membres ; soif vive, haleine fétide, langue rose au pour- tour, jaunâtre au centre; léger météorisme, douleurs à gauche du ventre, dix selles la nuit : trois taches roses, len- ticulaires, sur l'abdomen; chaleur sèche, intense, et néan- moins sensibilité au froid ; pouls un peu plein , égal, à qua- tre-vingts; respiration légèrement accélérée: faiblesse et malaise fort médiocres-, le malade ne s'occupe que de son ventre. (Quinze saut/fur* à fanus} îav. Un; Us. (Forge av. le >•//•()/) /'/;•/. ter. ).
70 3e PARTIE, SYMPTÔMES.
La perte de sang fut :,SS07 considérable, il y eul quinze selles clans les vingt-quatre heures qui suivirent, un peu de sommeil et une sueur légère pendant la nuit. Le lendemain; figure pale, stupeur légère, augmentation de la faiblesse, intelligence intègre , ventre indolent, météorisé; taches len- ticulaires plus pâles que le 6; pouls un peu mou, soif aug- mentée (Id. sauf les sangsues).
Le 8 ; figure un peu rouge et violacée , air d'indifférence, réponses justes; le reste comme la veille. (Quinze sangsues à l'anus.)
Du 9 au 12 : môme degré de stupeur, figure pâle ou plombée, réponses justes et assez promptes; surdité, d'a- bord légère, puis considérable; faiblesse croissante-, langue sèche , puis jaunâtre et encroûtée au centre, le 11 ; météo- risme assez considérable, ventre indolent; selles nombreu- ses, sans traces de mucus ni de sang-, chaleur médiocre, pouls accéléré, assez large; toux rare.
L'assoupissement fut presque continu dans la journée du 1-2, et, pendant la nuit, le malade quitta son lit et parcourut les salles. Le lendemain , au milieu d'une stupeur assez pro- fonde, il assurait ne souffrir nulle part , sa figure était un peu livide, ses paroles presque inintelligibles, sa langue sèche et brunâtre, sa respiration haute et fréquente ; le bruit respiratoire était sans mélange de râle, le pouls assez ferme, régulier, à cent.
L'agitation fut la même pendant la nuit que dans la pré- cédente; el le 1 i , à l'heure de la visite, la somnolence était continuelle, le malade dans le même état apparent que la veille , en porte qu'il descendait encore du lit pour aller à la selle: il répondit se trouver bien, et une heure après \\ expira.
ETAT DES TOIICES. 71
OUVERTURE DU CADAVRE VINGT-TROIS HEURES APRES LA MORT.
État extérieur. Point de vergetures, sinon à la partie pos- térieure du corps.
Tête. Quelques adhérences entre les feuillets de l'arach- noïde, près du sillon médian, là où cette membrane était épaissie et opaque. Traces d'infiltration sous-arachnoï- < lien ne,; deux petites cuillerées de sérosité dans chacun des ventricules latéraux-, cinq dans les fosses occipitales infé- rieures; cerveau et cervelet un peu injectés, d'une bonne consistance.
Poitrine. 90 grammes de sérosité sanguinolente dans le péricarde; plaques blanches à la face antérieure du cœur, dont les parois étaient minces et très ramollies. Quelques bandes d'un rouge-foncé, le long de l'aorte.— 360 grammes de sérosité très rouge dans la cavité de la plèvre, droite ; ad- hérences celluleuses universelles à gauche. Les poumons étaient légers, plus ou moins mous, avaient une couleur rouge assez vive antérieurement, et, en arrière, une teinte beaucoup plus foncée , à l'intérieur comme à l'extérieur. Ces deux nuances étaient interrompues par des taches noirâtres, arrondies, de 4 millimètres de diamètre , sans augmenta- tion appréciable de la densité du tissu pulmonaire corres- pondant.
Abdomen. Le péritoine avait perdu le brillant qu'il a dans l'état ordinaire. L'estomac contenait une assez grande quan- tité de liquide peu épais. Sa membrane muqueuse était nuan- cée île rose et de gris, jaunâtre dans quelques points, d'une bonne consistance. — Celle de l'intestin grêle, à part un médiocre ramollissement et les objets que je vais indiquer, n'offrait rien de remarquable. Les plaques elliptiques étaient
?'2 3e PARTIE, SïMPTÛMES.
nombreuses dans ses deux derniers tiers , rouges , larges et épaisses dans les 55 centimètres les plus rapprochés du cœ- cum. Leur saillie était due principalement à la muqueuse, qui avait généralement plus de 2 millimètres d'épaisseur, dans ce point, était extrêmement ramollie , et détruite dans une petite étendue des plaques qui avoisinaient le cœcum. Le tissu cellulaire sous-muqueux correspondant avait la même couleur, et une épaisseur presque égale. Entre ces plaques s'en trouvaient d'autres, irrégulières, beaucoup moins con- sidérables , et quelques cryptes solitaires, aplaties, marquées d'un point central. Quelques-unes des plaques elliptiques qui précédaient celles qui étaient rouges et ramollies, étaient grisâtres et bleuâtres, un peu épaissies, et offraient quel- ques ulcérations dentelées. — Le gros intestin était très météorisé jusqu'à S , contenait quelques parcelles grisâtres et fermes, au milieu d'une matière liquide, médiocrement abondante. La membrane muqueuse du cœcum et de la moitié gauche du colon transverse , jusqu'au rectum, était rouge et très ramollie; il y avait aussi quelques petites ulcé- rations dans le cœcum. —Les glandes mésentériques étaient rouges, volumineuses et très molles, dans le voisinage de ce dernier. — Le foie était sain -, la bile vésiculaire abondante et ténue. — La rate était plus que triplée de volume, et si ramollie qu'il suflisait du moindre effort pour y enfoncer le doigt. — Les reins étaient rouges et d'une bonne consis- tance. — Le pancréas était très injecté.
Ainsi, bien que la mort ait eu lieu au vingt-quatrième jour de l'affection, W malade a pu continuer un métier fati- gant 1rs deux premières semaines; ses forces n'étaient pas même assez abattues , dans la dernière, pour l'empêcher de pourvoira ses besoins; et, une heure et demie avant sa
ÉTAT DES FORCES. 73
mort, il descendit encore de son lit pour aller à la selle. Quelle que manière de voir qu'on adopte relativement au début de l'affection , elle s'est donc bien écartée , sous le rapport des forces , de la forme la plus ordinaire.
On peut effectivement faire une double supposition rela- tivement au début; se demander s'il remontait à l'époque où l'appétit se déprima , ou seulement au jour où le malade prit un purgatif qui fut suivi de dévoiement : et l'on dirait, en faveur de la première de ces deux suppositions, qu'avant le purgatif il n'y eut aucun symptôme caractéristique. Mais les raisons qui militent en faveur de la seconde supposition me paraissent beaucoup plus concluantes : car si , avant l'administration du purgatif, les symptômes éprouvés par le malade n'avaient rien de caractéristique, ils n'étaient pas non plus en opposition avec ce que l'expérience apprend du début de l'affection typhoïde dans certains cas-, d'ailleurs, quand la diarrhée eut lieu à la suite du purgatif, le caratère généra] de l'affection resta encore le même; seulement un nouveau symptôme s'y ajouta et parut en fixer le siège, sans en indiquer la nature. Les symptômes véritablement carac- téristiques ne se manifestèrent que dans les huit derniers jours de l'existence -, de manière que si l'on se refusait à placer le début de la maladie au moment où l'appétit fut di- minué , et où il y eut des douleurs dans les membres » on ne pourrait pas le faire remonter à une époque antérieure à l'admission du malade à L'hôpital. Cependant les symptômes des huit premiers jours avaient une cause, et quand on con- sidère que la lésion la plus profonde , et sans doute la plus ancienne, était celle des plaques elliptiques de l'iléum , on ne saurait s'empêcher d'admettre que ces plaques fussent le siège de quelque altération , dans les huit jours qui précédè- rent L'administration du purgatif.
74 3e PAPU2, SYMPTÔMES.
J'ai écarté l'idée qu'un purgatif pût amener l'altération des plaques elliptiques de l'intestin grêle, pareeque j'ai ob- servé plusieurs fois des superpurgations à la suite du re- mède longtemps continué de Leroy, sans que rien, dans les symptômes, annonçât une semblable influence. Je ne crois pas non plus qu'on puisse attribuer au purgatif une part considérable dans la diarrhée qui en a suivi l'usage, comme les faits nous l'ont appris antérieurement (page 442 du ltr vol.); vu que les purgatifs, quels qu'ils soient, s'ils ne sont pas répétés, ne produisent de diarrhée permanente que dans le cas où les sujets y sont éminemment disposés-, en sorte qu'il faudrait au moins admettre ici une prédisposition très forte, puisque le dévoiement a été considérable et non interrompu, à compter de l'administration du purgatif: vu aussi que souvent un semblable dévoiement succède, dans l'affection typhoïde, à une constipation de plusieurs jours, sans qu'aucun purgatif ait été administré.
Ce cas était d'ailleurs, il faut en convenir, un de ceux qui peuvent le plus aisément mettre en défaut la sagacité de l'observateur, soit avant, soit après l'administration du purgatif, antérieurement à l'admission du malade à l'hôpi- tal ; l'anorexie , des douleurs dans les membres, une légère diminution des forces avant ou après la diarrhée, ne devant pas faire soupçonner une maladie grave. En pareil cas, toutefois, il faudrait se rappeler qu'un purgatif unique, suivi d'une abondante diarrhée , annonce une forte prédis- position , et qu'un semblable effet appartient à l'affection typhoïde commençante plus qu'à toute autre.
2J Chez les sujets atteints d'affection typhoïde, qui ont guéri.
L'affaiblissement ne fut pas moins remarquable chez ceux '!«' ces sujets don! la maladie fut grave, que cjiez ceux
£tat nr.s FORCES. 75
qui ont succombé. De quarante-sept malades sur lesquels j'ai pu recueillir des renseignements précis à cet égard , sept prirent le lit dès le premier jour de l'affection } neuf se bornèrent à quitter leurs occupations à la môme épo- que, deux le deuxième jour ; c'est-à-dire que la troisième partie des sujets éprouva un affaiblissement et un découra- gementconsidérables dès le début. Ce qu'on ne peut pas plus expliquer que dans les cas où la maladie eut une terminai- son funeste , par le dévoiement qui n'existait pas alors , ou ne faisait que commencer; par les douleurs de ventre, ni par des symptômes gastriques de quelque valeur, ni par ces lassitudes extrêmes dans les membres qu'on observe si souvent dans les simples courbatures. En sorte qu'ici , comme chez les individus qui ont succombé, on ne peut rattacher cette faiblesse qu*à la lésion spécifique commen- çante de l'iléum,ouà la cause à laquelle il conviendrait de la rapporter. — Un petit nombre de sujets ne fut alité que du dixième au vingtième jour de la maladie , et l'un d'eux ne commençai prendre de repos qu'au vingt-sixième. Chez celui-ci, après un début assez violent, l'affection parut s'ar- rêter dans sa marche , de manière que six jours après le début, le malade avait repris, bien que d'une manière in- complète, ses occupations.
L'affaiblissement fut considérable et de longue durée chez presque tous les sujets qui furent obligés de se mettre au lit dè^ le début- mais son maximum eut lieu à des épo- ques très varices, du dixième au trentième jour de l'affec- tion. La débilité ne fut pas moindre chez plusieurs malades qui ne quittèrent leurs occupations , ou ne se mirent au lit, qu'un plus ou moins grand nombre de jours après L'appa- rition des premiers symptômes: de manière qu'à une cer- taine époque de l'affection plusieurs de ces malades sem-
7G 3e PARTIE, SYMPTÔMES.
blaient comme paralysés , laissaient tomber leurs membres, préalablement soulevés, comme s'ils n'eussent plus obéi qu'à la pesanteur, et se laissaient manier comme des corps inertes. Dans quelques cas encore, à cette faiblesse ex- trême se joignait la pâleur de la face , et les sujets, comme anéantis, semblaient sur le point de s'éteindre. Cet état fut porté au plus extrême degré, chez une jeune fille de dix- sept ans et demi , d'une constitution un peu délicate. On l'aurait dit pendant deux jours, les dix-neuvième et ving- tième de la maladie, près d'expirer, n'ayant plus qu'un souffle de vie ; ce que ne pouvaient expliquer , ni la diar- rhée qui avait été légère, ni la douleur de ventre, ni le météorismc qui fut presque nul , ni le traitement qui ne fut ni tonique ni très débilitant, aucune saignée n'ayant été pratiquée. Cette profonde débilité ne diminua qu'avec beaucoup de lenteur ; et au moment où la conva- lescence paraissait devoir faire des progrès rapides, la malade eut une double péripneumonie , bornée à la par- lie postérieure des poumons, qui n'occasiona qu'une faible réaction, eut une marche très lente, et fut accompagnée d'un œdème assez considérable des membres inférieurs, de celui du côté gauche, surtout; de manière que la malade ne fut parfaitement rétablie qu'après cinq mois de séjour à l'hôpital.
L'affaiblissement fut médiocre dans les trente-un cas où l'affection fut légère;, et c'est, en grande partie, d'après la différence de l'état des forces, que j'ai divisé les malades en deux groupes. Toutefois, la perle des forces, chez les trente- un sujets dont il s'agit, était généralement très supérieure a celle qui aurait eu lieu dans toute autre affection inflam- matoire, à égalité de lièvre.
ETAT JifcS l'niti.LS.
M. Ililliet observe avec raison , qu'il est difficile d'estimer avec quelque exactitude la diminution, et surtout le degré de la diminution des forces, dans l'enfonce. Toutefois, il re- marque que les deux tiers des enfants atteints d'affection typhoïde, qu'il a observés, furent plus ou moins affaiblis dès le début ; que presque tous furent obligés de s'aliter dès les premiers jours. M. Taupin pense que l'affaiblisse- ment qui accompagne la fièvre typhoïde est un peu moin- dre dans l'enfance que dans lage adulte; que dans le pre- mier âge aussi, la convalescence de cette maladie est assez souvent prompte, comme subite; ce qui n'établit pas une distinction marquée entre l'affection typhoïde de l'enfant et celle de l'adulte , puisque le rétablissement des forces est quelquefois aussi très rapide chez les jeunes gens atteints de cette maladie.
3° Chez les sujets morts de maladies aiguës non typhoïdes.
Chez les péripneumoniques, la faiblesse était générale- ment proportionnée à l'étendue de l'affection ; mais aucun deux n'éprouva ce profond affaissement dont il a été ques- tion ci-dessus. La diarrhée, dans les cas où elle venait à se déclarer, augmentait beaucoup cette faiblesse, qui fut con- sidérable chez deux sujets dont la muqueuse gastro- intesti- nale était profondément altérée.
L'affaiblissement n'offrit rien de remarquable dans le cours des autres maladies aiguës, si l'on en excepte un cas d'érysipèle aux membres inférieurs, dans lequel la perte des forces fut considérable dès le début de l'affection.
A' Chez les sujets atteints de maladies aiguës non tjphoïdes, qui ont guéri.
La diminution des forces fut considérable chez quatre
78 3e PARUE, SYMPTÔMES.
des cinquante-sept péripneumoniques qui ont guéri. L'affec- tion fut presque parfaitement simple dans un cas ; elle était compliquée de dévoiement, ou de symptômes gastriques, dans les autres, quand l'affaiblissement devint très marqué. Le découragement était extrême, l'attitude abandonnée, dans ces trois cas ; et les deux malades qui éprouvèrent des symptômes gastriques, eurent, en outre, au sixième jour de l'affection , une lipothymie en allant à la selle.
Trois sujets sur dix-huit qui furent atteints de scarlatine, éprouvèrent, les cinquième et sixième jour de l'affection, un affaissement assez considérable , sans qu'il fût possible de se l'expliquer par la diarrhée ou quelque symptômes gas- trique. Un semblable degré de prostration eut lieu dans un cas de rougeole, au début de la maladie, quatre jours de suite, et céda au moment où les évacuations alvines devin- rent liquides et fréquentes. S'il n'était pas possible alors de s'en rendre compte, son degré, au début de la maladie, pou- vait, jusqu'à un certain point, écarter le soupçon d'une affec- tion typhoïde. J'en dirai autant de deux sujets qui offri- rent le même affaissement le premier jour d'une angine gutturale, et d'un troisième dont l'accablement fut extrême les trois premiers jours d'une urticaire, que ne compli- quaient ni symptômes gastriques, ni diarrhée.
Dans ïcntérite proprement dite, la faiblesse n'était pas comparable à celle qui accompagne l'affection typhoïde, alors même qu'elle était très intense, que les selles étaient très nombreuses. Aussi, bien que l'affaissement fût assez considérable chez un sujet dont les évacuations alvines fu- nril répétées île vingt à trente fois par jour, dans les six prenriert de la maladie, ce sujet n'en sortit pas moins par- faitemenl guéri de l'hôpital, au onzième jour, à partir du début. Et ce fait n'est pas une exception; car cinq autres
LIAT DtS KJRCES. 79
malades qui eurent des selles presque aussi nombreuses, une faiblesse à peu près aussi considérable, pour quelques jours, sortirent de l'hôpital du quatorzième au dix-hui- tième, fort bien portants. Trois d'entre eux y étaient venus à pied, et eurent quelques symptômes gastriques.
L'affaiblissement n'était doue pas seulement beaucoup plus considérable, beaucoup plus fréquent, dans le cours de l'affection typhoïde que dans toute autre; il était encore beaucoup plus prolongé.
§6.
Des douleurs et de l'œdème des membres.
1° Chez les sujets atteints d'affection typhoïde.
A deux exceptions près, tous les individus chez lesquels j'ai pu recueillir des renseignements exacts sur l'état des membres , à une époque antérieure à leur admission à l'hô- pital (et c'est le plus grand nombre), y éprouvèrent des dou- leurs dès le début de la maladie, qu'elle qu'en ait été l'issue. Ces douleurs, généralement très médiocres, n'étaient com- parables, dans aucun cas, à celles qui ont lieu quelquefois dans la courbature \ et elles ne se firent sentir avec quelque vivacité, dans les membres inférieurs, que chez un des su- jets qui ont péri, dont elles gênaient beaucoup la marche, et qui les comparait à un engourdissement (obs. 21). Dans aucun cas elles n'eurent le caractère rhumatismal. — Les mêmes individus qui éprouvaient des douleurs dans les membres en avaient aussi , pour la plupart, dans les lombes.
Je n'ai observe £ œdème aux membres inférieurs que
80 3e PARTIE, SYMPTÔMES.
chez une jeune fille dont l'affection eut une heureuse issue, dans le cours d'une double péripneumonie, survenue au moment où la malade, dont les forces avaient été pro- fondément altérées, paraissait entrer en convalescence.
Les douleurs dans les membres ont eu lieu chez tous les enfants observés par le Dr. Taupin, hors un. De peu de du- rée généralement, elles furent promptement remplacées par un sentiment de faiblesse, et, dans trente cas où elles persis- tèrent, aux genoux et aux reins, au-delà du terme ordinaire, j'ai pu remarquer, dit M. Taupin , que la taille des sujets avait pris un assez grand accroissement.
2° Chez les sujets morts de maladies aiguës non typhoïdes.
Des douleurs dans les membres eurent lieu chez les qua- tre cinquièmes des péripneumoniques: et trois d'entre eux, morts aux huitième , vingtième et quarantième jour de l'affection , offrirent de l'œdème aux membres inférieurs , deux ou trois jours avant le terme fatal. — Ces sujets avaient de cinquante à soixante ans, et le cœur de l'un d'eux était légèrement hypertrophié. Si l'âge et l'état du cœur ont eu quelque influence sur le symptôme qui nous occupe , l'organe principalement affecté en eut sans doute bien davantage; et le fait rapporté un peu plus haut vient à l'appui de cette manière de voir.
Chez les sujets qui succombèrent à d'autres affections, les douleurs dans les membres et dans les lombes furent à peu près aussi fréquentes que chez les péripneumoniques; et, dans deux cas, l'un de scarlatine et l'autre de péricar- dite, il y eut de l'œdème aux membres abdominaux. — • Le cœur était sain, les poumons n'offraient pas d'altération re- marquable, chez l'individu qui succomba à la scarlatine.
UOLLELUS, OLUL.ML J'L- MJ.MUKLv ,S |
o'Chez les sujets atteints de maladies aigucs non typhoïdes, qui ont guéri.
La plupart des péripncumoniques eurent des douleurs dans les membres et dans.les reins; ces douleurs furent très vives dans les cuisses chez un des sujets, et aux genoux chez deux autres. Chez l'un de ces derniers la douleur était accompa- gnée d'un gonflement assez considérable , sans rougeur, qui persista du onzième au quinzième jour de l'affection • après quoi les mêmes symptômes eurent lieu à la main droite , pendant le môme temps. Les douleurs ne furent pas moins fortes aux genoux dans l'autre cas où elles avaient élé précédées, pendant deux jours, de douleurs évidem- ment rhumatismales au cou. Il n'y eut pas de gonflement.
Ces deux faits , et un troisième que je citerai tout à l'heure, sont les seuls exemples de douleurs véritablement rhumatismales observées par moi , comme complication , dans le cours des maladies aiguës dont j'ai recueilli l'his- toire. L'extrême iarclé, dans cette circonstance, d'une maladie, d'ailleurs si commune, me paraît extrêmement remarquable, et forme un nouveau caractère à ajoutera ceux qui montrent dans le rhumatisme une affection aussi distincte des autres , que difficile à apprécier dans sa na- ture.
Un sujet dont la maladie traîna en longueur, eut, huit jours après son début , de l'œdème aux membres inférieurs, et cet œdème persista pendant plusieurs semaines. — Ce sujet , âgé de quarante ans , n'avait aucun symptôme de maladie du cœur , et il offre une nouvelle preuve de l'in- Quence delà gène de la circulation du sang, dans le cours de la péripneumonie, sur le développement de l'œdème. H. 6
62 3l 1AK1IK. tVMWÔVUU'
Dans un cas d'érysipèle aux membres inférieurs, il y eut des douleurs rhumatismales, d'abord à l'épaule gauche pen- dant huit jours, puis aux genoux, qui furent gonflés, mais sans rougeur.
Plus de la moitié des sujets atteints de catarrhe pulmo- naire eut des douleurs contusives dans les membres , et, deux d'entre eux, de l'œdème aux membres inférieurs pen- dant quelque temps.
Ces douleurs furent un peu moins fréquentes chez les su- jets affectés d'entérite, que chez les précédents, de manière qu'elles n'avaient lieu que dans la moitié des cas, quelle que fût d'ailleurs la gravité de l'affection . Elles furent vives aux poignets chez deux malades , sans être accompagnées de rougeur ou d'enflure.
Ainsi , sur sept cents individus atteints de maladies ai- guës, dont cent trente ont succombé, huit seulement eurent de l'oedème aux membres inférieurs ; six dans le cours d'une péripneumonie ou d'un catarrhe pulmonaire intense , un dans celui d'une péricardite; le dernier dans le cours d'une scarlatine. — Un peu d'œdème chez un sujet atteint d'une maladie aiguë , devrait donc diriger l'attention sur l'état des poumons et du cœur, surtout dans le cas où il n'y aurait aucun autre symptôme d'une maladie de Bright.
Él'ISÏ'AXIS. 83
ARTICLE vin.
Sfffiptttnei fournis par les or^-mt» de* <tn?. Épîslaxis, ^tal de la conjonctive des oreilles et de la peau.
De Tépistaxis. 1° Chez les sujets morts d'affection typhoïde.
Soit que j'aie omis de m'informer de l'existence de ce symptôme, ou que je n'aie pu prendre d'informations préci- ses à son égard, je n'en ai fait mention que chez seize sujets, parmi lesquels cinq en ont été exempts : ce que je ne puis néanmoins aflirmer d'une manière absolue, mes questions, sur ce point, n'ayant peut-être pas été assez répétées.
Quoi qu'il en soit, Tépistaxis variait dans son début, dans ses retours et dans l'abondance du liquide exhalé. Unique dans cinq cas, elle s'est répétée plusieurs fois dans les au- tres, deux , trois, quatre, six jours de suite, ou à des dis- tances plus ou moins considérables; chez quelques mala- des plusieurs fois dans la même journée (obs. A) , et pres- que toujours sans le moindre soulagement. — Elle débuta le premier jour de l'affection dans trois cas où elle s'est re- nouvellée plusieurs fois (obs. 4 , 16, 39) ; du quatrième au quinzième dans les autres.
2° Chez les sujets atteints d'affection typhoïde qui ont guéri.
Sur trente-quatre sujets dont l'affection fut grave et chez lesquels j'ai recherché l'existence de Tépistaxis, vingt-sept réprouvèrent une ou plusieurs fois-, et eetle (proportion peut être considérée eomm« exacte, tous les individus dont il
84 3€ l'AKïlt, 6YIWXÔMBS.
s'agit ayant été fréquemment interrogés relativement à l'ob- jet qui nous occupe.
Chez ces malades, comme chez ceux qui succombèrent , l'épislaxis fut variable dans son début , dans ses retours et dans son abondance. Relativement au début, elle se montra avec les premiers symptômes, dans trois cas -, dans cinq , le quatrième jour ; dans quatre , du cinquième au dixième; dans cinq, du dixième au quinzième; dans six, du quinzième au vingtième; plus tard encore chez les qua- tre autres sujets, dont la maladie eut une marche très lente. Considérée dans sa fréquence et dans ses retours, elle n'eut lieu qu'une fois chez dix malades, reparut cinq, six, huit , dix et quinze jours de suite chez neuf, assez souvent à plusieurs reprises'dans la même journée , et deux ou trois fois dans les autres cas , à des distances plus ou moins éloi- gnées. — Aucun rapport d'ailleurs, entre l'abondance et la fréquence des cpistaxis ; mais la diarrhée était généralement considérable, là où l'épistaxis s'était répétée le plus grand nombre de fois.
Cette hémorrhagie fut bien moins fréquente chez ceux dont la maladie fut légère; n'ayant eu lieu que dans la moi- tié des cas, ou chez onze des vingt-quatre sujets qui furent interrogés avec soin à cet égard.
L'épistaxis a été observée par M. Bar th, dans la moitié des cas soumis à son observation, ou chez quarante -deux sujets sur quatre-vingt-deux dont il a recueilli l'histoire : dans une proportion un peu moindre que celle qui résulte de mes analyses.
L'hémorrhagie nasale, et cela est surtout remarquable à
Kl' 13 IAXIS. 8;,
raison de l'opinion dominante sur ce point, parait être beaucoup moins fréquente dans V enfance qu'après quinze ans, dans le cours de l'affection typhoïde; de manière que M. Taupin n'a rencontré que trois exemples d'épistaxis au début ou dans le cours de l'affection typhoïde, chez les 121 sujets soumis à son observation. M. Taupin ajoute à ce fait que plusieurs enfants qui étaient sujets au saignement de nez avant d'être atteints d'affection typhoïde, n'en ont pas eu pendant toute la durée de leur maladie, et que cette hé- morrhagie se réduisait, chez les enfants qui en étaient at- teints, à quelques gouttes de sang qui se desséchaient immé- diatement.— M. Rilliet, qui n'a pu s'assurer de l'existence ou de la non-existence de l'épistaxis dans tous les cas sou- mis à son observation, l'a néanmoins observée dans treize cas, dans une proportion sensiblement plus considérable que celle indiquée par M. Taupin, quoique moindre de beau- coup que celle qui existe chez l'adulte. Huit fois elle eut lieu du premier au sixième jour, ordinairement les troisième et quatrième, du onzième au vingt- troisième dans les au- tres cas. Une seule fois elle se répéta journellement , du premier au neuvième jour de l'affection.
3° Chez les sujets atteints de maladies aiguës non typhoïdes, qui ont guéri ( 1 ).
Huit péripneumoniques , sur cinquante -sept, eurent des épistaxis. L'un d'eux le premier jour de l'affection, trois le second, les autres du quatrième au onzième. Unique chez trois sujets, l'épistaxis se repéta trois, quatre, six, huit jours de suite chez les autres, et fut quelquefois très abondante.
(•) Un trop pelil nombre de sujets, parmi cens qui ont succombé, a etc interroge relativement à lYpîstaxis, pour qu'il puisse en être question i<i.
86 3' PARTIF. SYMPTÔMES.
Je ne l'ai observée dans aucun cas de variole. Elle eut lieu chez deux sujets atteints de scarlatine, aux sixième et sep- tième jours chez l'un, au onzième chez l'autre; chez un in- dividu affecté de rougeole, au huitième jour de la maladie : au dixième d'un érysipèle à la face ; chez six des trente-neuf sujets atteints d'angine gutturale, du deuxième au douzième jour de l'affection ; le huitième dans un cas de zona, où elle fut le terme d'une céphalagie existante depuis plusieurs jours: chez quatre sujets affectés de rhumatisme, du deuxième au trentième jour de la maladie • dans cinq cas de cathorrthe pulmonaire , à une ou plusieurs reprises; le premier jour de la maladie chez deux individus, à une époque plus ou mois éloignée chez les autres. Enfin, l'é- pistaxis eut lieu chez quatre sujets atteints d'entérite pro- prement dite, du premier au dixième jour de l'affection.
Bien que j'aie omis de demandera plusieurs des indivi- dus affectés des maladies qui viennent d'être passées en revue, s'ils avaient éprouvé quelque épistaxis, que les nom- bres donnés ne puissent pas être considérés comme des pro- portions, l'ensemble des faits est néanmoins digne d'intérêt, en i e qu'il montre que l'épistaxis suit la marche de tous les symptômes secondaires qui se développent dans le cours des maladies aiguës, et, comme eux, paraît plus rarement au début de l'affection qu'à une époque éloignée; qu'il n'est pas possible, dès-lors, de l'envisager sous un point de vue différent; que La considérer comme critique serait s'enga- ger à reconnaître ce caractère à tous les autres symptômes secondaires, à toutes les lésions d'organes dont ils ne sont que l'effet. <>u dira peut-être que L'épistaxis soulage le mal de t'Me; mais qu'est-ce que cela prouve? Parce que la dou- leur du phlegmon diminue avec la suppuration . faudrait-il
i'tai of.s VLUX. *~
considérer celle-ci comme une crise? El n'y a-t-il pas une parfaite analogie entre le mal de tète qui précède l'épis- taxis, et la douleur qui devance la suppuration du tissu cel- lulaire? De part et d'autre, n'est-ce pas un phénomène qui se divise en plusieurs périodes, dont l'une, la suppuration ou l'écoulement de sang, peut ne pas avoir lieu?
§2. État des yeux.
Je rapporterai à ce paragraphe la rougeur ou l'injection plus ou moins vive de la conjonctive, les douleurs des yeux, le trouble de la vue.
1° Ches les sujets morts d'affection typhoïde.
Les conjonctives étaient plus ou moins rouges à des épo- ques variées de l'affection , dans un peu plus de la moitié des cas , ou chez seize des vingt-sept individus dont l'état des yeux a été indiqué avec soin, dans mes notes. C'était, chez quatre d'entre eux, une nuance rose très délicate, uniforme, sans vaisseaux distincts; chez les autres , une injection or- dinairement légère, quelquefois inégale, de la conjonctive des deux côtés. — Cette rougeur débutait à des époques va- riées , plus souvent à la fin qu'au commencement de l'affec- tion. Elle eut lieu du troisième au treizième jour, chez trois sujets dont la maladie dura de trois à cinq semaines; de trois à quinze jours avant le terme fatal, dans d'autres cas. Elle prit de l'accroissement chez quelques individus, futstation- naire chez d'autres, et ordinairement accompagnée d'une sécrétion de mucus qui maintenait rapprochés les bords li- bres des paupières -, quelquefois d'un larmoiement que je n'ai constaté que chez deux sujets.
8S 3e PARTIE, SYMPTÔMES.
Les yeux étaient cuisants, plus ou moins douloureux chez six malades, dont trois avaient les conjonctives injectées. Quelle était la cause de la douleur chez les autres? quelle qu'elle soit , ce fait vient encore à l'appui de ce que j'ai dit plusieurs fois de la difficulté de connaître le siège et la na- ture de la douleur, dans beaucoup de cas.
Sans parler des éblouissements que presque tous les mala- des éprouvaient sitôt qu'ils se levaient ou se mettaient à leur séant, quatre d'entre eux avaient habituellement la vue trouble, ne voyaient qu'à travers un nuage, dix, douze jours après le début , et pendant un espace de temps à peu près égal avant la mort.
Quatre sujets eurent les paupières closes et fortement contractées dans les derniers jours de l'existence , au point qu'il était très difficile de les écarter mécaniquement. Cette occlusion eut lieu, quinze jours de suite, chez un malade dont le cerveau était moins injecté qu'à l'ordinaire (obs. 30), Le délire existait, à divers degrés, dans chacun des cas dont il s'agit , et la contraction des paupières était probablement moins l'effet de la sensibilité des yeux à la lumière, qu'un phénomène spasmodique, analogue aux spasmes ou à la contraction permanente des muscles des membres, qui avaient lieu chez quelques-uns des sujets qui nous occupent.
2° Chez les sujets atteints d'affection typhoïde, qui ont guéri.
Les ymix étaient à peu près dans le môme état chez les sujets qui guérirent que chez ceux qui succombèrent. Ils n'offrirent rien de remarquable dans la troisième partie des cas , ou sur dix des trente-trois individus chez lesquels je les ai examines avec soin-, ils furent plus ou moins injectés, ou d'un rose uniforme chez les autres. Cet étal débutait ordi-
LTAT DE l/or.F.UJ.E. 89
nairement après le dixième jour , de manière que je ne l'ai observé aux sixièmeet septième, que dans trois eas. —Sa du- rée variait de deux à huit. — Il y eut aussi des cuissons chez sept malades, dont trois avaient les conjonctives injectées. — Un autre eut la vue trouble, dans le repos du lit, dans tout le cours de la quatrième semaine de l'affection. Aucun n'offrit cette contraction permanente et difficile à vaincre des paupières, observée dans plusieurs des cas où la termi- naison de la maladie a été funeste. Si d'ailleurs on se rap- pelle que la raideur spasmodique des membres n'eut pas lieu chez les mômes sujets, on sera convaincu que la contraction des muscles des paupières et la raideur des bras dépendaient d'une seule et même cause , et Ton verra dans Tune et dans l'autre un signe également funeste.
3° Chez les sujets atteints de maladies aiguës non typhoïdes.
Les yeux furent plus ou moins rouges et douloureux dans deux cas de péripneumonie dont la terminaison fut heu- reuse, aux troisième et sixième jour de la maladie. Leur état n'a pas été noté chez les autres sujets-, et, tout en regrettant cette omission, on peut croire qu'elle n'a eu lieu que parce- que la rougeur des yeux ou n'existait pas, ou était ex- trêmement légère.
§3.
De l'oreille.
Surdité, bourdonnements., douleurs, inflammation du conduit auditif externe.
1* Chez les sujets morts d'affection typhoïde.
De trente malades chez lesquels les symptômes relatifs à l'oreille ont été notés avec soin, onze eurent des bourdonne-
'.Mi 3» PARTIT; MMPTÔMFS.
ments , vingt l'ouïe plus ou moins dure , deux des douleurs d'oreille.
Les bourdonnements eurent lieu, dans la plupart des cas, sans dureté de l'ouïe -, ils suivirent une marche croissante chez plusieurs sujets, débutèrent avec les premiers symp- tômes chez quatre , puis à des époques variables, plus rap- prochées du début de l'affection que du terme fatal , si ce n'est chez les malades qui moururent du huitième au quin- zième jour de l'affection.
La dureté de ïouïe ne se manifesta chez aucun sujet avec les premiers symptômes. Elle débuta au milieu ou dans les derniers jours de l'affection , à peu près un égal nombre de fois, chez les individus qui moururent du vingtième au tren- tième jour. Peu prononcée d'abord , elle fesait ensuite des progrès plus ou moins rapides, et elle fut si considérable chez trois sujets , qu'il était presque absolument impossi- ble de s'en faire entendre. L'un d'eux n'eut pas de délire.
Des douleurs d'oreille eurent lieu pour peu de temps , et au milieu du cours de l'affection , chez deux sujets. (Obs. 29,45.)
Je n'ai noté d'inflammation manifeste du conduit auditit, ou d'écoulement purulent par le méat auditif , dans aucun cas; et je ne doute pas, néanmoins, que cet écoulement n'ait eu lieu plusieurs fois; vu que quelques-uns des sujets qui ont guéri l'ont éprouvé, et que les symptômes accessoires étaient moins fréquents et moins graves chez ceux-ci que chez les autres. On conçoit d'ailleurs comment plusieurs de. ces symptômes, venant à se déclarer à une époque avancée de l'affection , au milieu d'autres accidents beaucoup plus gra- ves, chez des malades souvent très sales, échappent à l'at- tention de l'observateur. Et comme cependant la connais- sance exacte dis maladies suppose celle de toutes les lé-
éfJrf nK t.'oreilit. 01
sions et de tous les symptômes qui ont lieu dans leur cours , il en résulte qu'on ne saurait donner trop d'attention à l'étal des organes, quels qu'ils soient, à toutes les époques de l'af- fection : et c'est cette nécessité bien sentie qui me fait insis- ter sur un point auquel je me suis déjà arrêté plusieurs fois.
2° Chez les sujets atteints d'affection typhoïde, qui ont piéri.
Sur quarante-cinq malades dont l'affection fut grave , et dont Tétatde l'oreille a été constaté avec soin, dix-neuf eu- rent des bourdonnements, trente-trois l'ouïe plus ou moins dure, sept des douleurs d'oreille, quatre un écoulement par le conduit auditif externe.
Comme chez les sujets qui succombèrent, les bourdonne- ments eurent lieu, assez fréquemment, sans que l'oreille fût dure. Ils débutèrent quelquefois avec les premiers accidents (trois fois) , précédèrent la dureté de rouie chez les sujets qui éprouvèrent l'un et l'autre symptôme, durè- rent de quatre à vingt jours.
L'ouïe détint dure, dès le début de l'affection , chez deux sujets qui n'eurent ni plus de délire, ni plus de céphalalgie que ceux chez lesquels le même état se déclara beaucoup plus tard, c'est-à-dire du huitième au vingtième jour de la maladie. Passagère en quelque sorte, ou d'un à deux jours de durée seulement , chez quelques malades, la dureté de l'ouïe se prolongea de quatre à vingt chez les autres. D'abord peu considérable, elle le devenait successivement davantage , diminuait de la même manière , si ce n'est dans un cas où celte diminution fut rapide. Elle offrit chez plu- sieurs individus des alternatives d'augmentation et de dimi- nution , sans qu'il fut possible de s'en rendre compte par des variations correspondante» dans les symptômes cérébraux.
02 3e PARTIE, SYMPTOMES.
ou dans l'état de la circulation : et elle fut si considérable, plusieurs jours de suite, chez certains sujets, qu'il était impossible de s'en faire entendre par un moyen quelconque. —La plus extrême surdité n'ajoute donc rien à la gravité du pronostic, et elle diffère beaucoup, en cela, des mouve- ments spasmodiques , et surtout de la raideur permanente des membres.
Des sept malades qui éprouvèrent des douleurs d'oreille , trois eurent aussi une inflammation manifeste du conduit auditif externe. Chez ceux-ci le début de la douleur fut as- sez tardif; il eut lieu du dixième au quinzième jour de l'af- fection chez les autres. Ordinairement passagère ou de peu de durée, cette douleur se prolongea deux semaines de suite dans un cas.
La suppuration n'eut lieu qu a une époque avancée de la maladie, pas avant le vingt-deuxième jour à compter du début, et seulement aux trentième et quarantième, dans deux cas où la marche de l'affection fut très chronique. — Sa durée moyenne fut de vingt jours.
Dans un cas d'affection typhoïde, terminé par le retour à la santé, qui s'est offert à mon observation à l'Hôtel-Dieu, l'année dernière, la suppuration de l'oreille droite était ac- compagnée de la perforation du tympan ; et cette perfora- tion , qui me fut signalée par M. le Dr. Ménière , se rencon- tre assez fréquemment, d'après ses recherches, dans des cas analogues. Cette lésion serait-elle encore la suite de la pré disposition à l'ulcération , si souvent signalée dans le cours de cet ouvrage, chez des sujets atteints d'affection ty- phoïde? Serait-elle plus fréquente chez ces malades, que chez ceux qui sont atteints d'otite dans le cours des autres affections aiguës '
I. oreille subissait donc la loi de la plupart des organes .
liât dl l'oreille. 93
dont l'inflammation est plus ou inoins fréquente dans le cours de l'affection typhoïde et des autres maladies ai- guës.
Quant aux cas où les douleurs ne furent ni accompagnées ni suivies d'écoulement par le méat auditif, si l'on ne peut pas dire qu'il n'y eut d'inflammation dans aucun d'eux, la chose me parait presque démontrée pour celui où ces dou- leurs durèrent quinze jours de suite : car comment conce- voir une douleur inflammatoire de cette durée , sans suppu- ration ?
Les mômes phénomènes eurent lieu chez les sujets dont l'affection l'ut légère, mais dans une proportion un peu moin- dre : de manière que sur vingt-quatre d'entre eux, dont l'é- tat de l'oreille fut étudié avec soin, quatorze seulement y éprouvèrent quelques-uns des symptômes indiqués. Six eu- rent des bourdonnements , et l'un d'eux le premier jour de la maladie; cinq eurent l'oreille dure, ordinairement à un degré peu considérable ; et dans un cas où cette dureté de l'ouïe dura vingt jours, elle eut lieu dès le début. — Trois sujets accusèrent des douleurs dans le méat auditif , et chez l'un d'eux elles furent suivies, après deux jours de durée, au quatorzième de l'affection, d'un écoulement de pus qui se prolongea pendant une semaine.
Ainsi, toujours mêmes lésions secondaires, proportion- nées à l'intensité du mouvement fébrile, dans les divers de- grés de la môme maladie.
Les observations recueillies depuis la publication de mes recherches confirment les faits qui viennent d'être exposés. Ainsi, sur vingt-huit cas d'affection Lyphoïde observés à l'hôpital de la Pitié, M. Bail h a trouve vingt-un cas de
•J4 3' 1WRI1E, àVMl'lÔMLb.
bourdonnements d'oreille. Il en a trouvé soixante-quatre sur cent un sujets reçus à l'IIùtel-Dieu, dans la division de M. Chomel , dans les deux dernières années -, proportion un peu plus considérable que celle qui résulte de l'analyse des faits que j'ai recueillis. moi-môme, puisque, trente-six fois seulement sur soixante-dix-neuf cas , j'ai constaté les bour- donnements d'oreille.— Quantàlasurdité, la différence est in- verse-, M. Barth ne l'a notée que dans huit des cas observés à la Pitié, et dans vingt-huit de ceux qu'il a vus à l'Hôtel- Dieu: différence plus apparente que réelle, sans doute, et qui tient très probablement à ce qu'il n'aura noté les cas de dureté de l'ouïe que dans ceux où elle aura été très pro- noncée.
La persévérance la plus complète dans l'étude des phéno- mènes morbides chez les enfants, ne peut conduire à la con- naissance des phénomènes de la nature de ceux qui nous oc- cupent, dans tous les cas où ils existent. Cependant, M. Ril- liet s'est assuré de l'existence des bourdonnements d'oreille chez huit des soixante enfants qu'il a observés; et il a noté la surdité chez sept individus, rarement intense, pour peu de temps, du sixième au vingt-sixième jour de l'affec- tion. — De son côté, M. le docteur Taupin a trouve la sur- dité presque constamment double chez vingt sept sujets, et elle survenait généralement vers le milieu de la maladie.
L'otorrhée eut lieu dans sept cas observés par M. Rilliet, du dix-neuvième au trente-unième jour de l'affection ; deux fois double, successivement-, ordinairement par l'oreille gauche, et toujours dans des cas graves ; de manière, ce- pendant, qu'un seul des sujets dont il s'agit a succombe.
ETAT DE L'OREILLE. {)',
3U Chez les sujets atteints de maladies aiguës non tvfdwides , qui ont guéri.
Un péripneumonique eut des bourdonnements d'oreille du premier au troisième jour de l'affection. — Je n'en ai point trouvé d'exemples chez les sujets atteints de variole. Il y eut un écoulement de pus par le méat auditif, dès le quatrième jour de la maladie, dans un cas de scarlatine. — Un individu affecté de rougeole eut des bourdonnements. — Ils furent beaucoup plus communs dans le cours del'angine gutturale; tellement que dix-sept des trente-neuf sujets affectés de cette maladie eurent des douleurs d'oreilles : ce qui tenait proba- blement au voisinage de l'affection principale. Et si ces douleurs ont manqué dans la rougeole et dans la scarlatine, où l'angine est si fréquente, c'est sans doute parce que celle -^i est plus légère alors que quand elle existe comme affection principale. — Il est remarquable d'ailleurs qu'il n'y eut d'inflammation manifeste, reconnaissable à l'écoule- ment du pus par le méat auditif, que chez un des dix-sept sujets dont il s'agit. Et ce fait me semble une nouvelle preuve de la liaison qui existe entre le mouvement fébrile et l'in- flammation de l'oreille^ puisque, malgré le voisinage de la maladie principale, la proportion des cas d'otite est beau- coup moindre ici que chez les sujets atteints d'affection ty- phoïde grave. — Un des individus malades de rhumatismr eut l'ouïe dure, un autre une otite externe, à une époque éloignée du début. — Des bourdonnements et des douleurs d'oreille eurent lieu dans deux cas de catharre pulmonaire ■ des bourdonnements chez un des quatre-vingt-quatre sujets atteints d'entérite proprement dite. De manière que plus nous avançons dans l'élude des symptômes, plus nous voyons
06 3" P&ftTlE, SYMPTÔMES.
clairement qu'aucune maladie ne diffère davantage de l'af- fection typhoïde (le nombre des selles excepté) que l'entérite.
§4. De la peau.
Taclics roscj, lenticulaires ; .ud.uiiuia. e'rysipclc , éruptions va-!ces, plaies des vesicatoires.
1° Taches roses, lenticulaires. 1° Chez les sujets morts d'affection typhoïde.
J'ai observé cette éruption dans vingt-six des trente-cinq cas où je l'ai recherchée, sans pouvoir dire qu'elle n'ait pas eu lieu dans quelques autres; plusieurs des sujets dont il s'agit étant venus à l'hôpital après le vingt-quatrième jour de l'affection, à une époque où les taches avaient peut-être disparu.
Elles étaient en petit nombre chez les trois quarts des malades ^dix-huit sur vingt-six) ; et alors on les trouvait disséminées sur l'abdomen et sur la poitrine. Quelquefois môme elles étaient bornées au ventre où l'on n'en voyait que cinq à six chez certains sujets. Plus ou moins nom- breuses, elles avaient lieu non-seulement à la poitrine et à l'abdomen, mais aussi, dans quelques cas, aux membres ; et dans l'un d'eux j'en ai trouvé à la face. Elles existaient à la partie postérieure du tronc chez deux malades dont j'ai examiné le do?, et l'on peut croire, par là, qu'elles n'y étaient peut-être pas moins fréquentes qu'à la partie antérieure du corps. — On en trouvait presque toujours davantage sur l'abdomen que sur la poitrine.
Dans les eas où elles étaient nombreuses, on les voyait s<- développer successivement, dans l'espace de trois, qua-
JA'Hl.s B4)S£5] LENTICULAIRES. 1)7
tic, ciuq jours, et quelquefois plus. Elles disparaissaient aussi par degrés, rarement à la fois et promptement, et leur couleur rouge pâlissait chaque jour davantage. Là où elles étaient rares on les voyait s'effacer après deux jours de durée, pour être remplacées par d'autres qui ne disparais- saient pas moins rapidement. Et, si j'en excepte deux sujets, leur largeur restait toujours la même.
Leur début variait. Chez trois individus qui se sont offerts à mon observation, les quatrième et cinquième jour de la maladie, elles ne se montrèrent pas avant les sixième et septième; elles existaient au huitième chez six sujets ob- servés, pour la première fois, à cette époque. Je ne les vis se développer que du neuvième au onzième jour dans plu- sieurs cas, et, dans un autre, au trente-cinquième seulement (obs. 14). Elles existaient au moment de l'admission de la plupart des individus qui furent conduits à l'hôpital après le dixième jour de la maladie; en sorte que, pour eux, il n'est pas possible de savoir à quoi s'en tenir, relativement à l'objet qui nous occupe. Maison ne s'éloigne sans doute pas beaucoup de la vérité, en admettant que l'éruption des ta- ches roses, lenticulaires eut lieu, du sixième au neuvième jour de l'affection, dans la moitié des cas.
Quelques circonstances étrangères à la maladie, un bain, pw exemple, paraissent susceptibles de Favoriser le déve- loppement de ces taches. C'est du moins ce que l'observa- tion suivante permet de soupçonner.
\\\M1I' OBSERVATION.
Céphalalgie, douleurs contusives dans les membres, fièvre; aa cin- quième jour, diarrhée, délire noient, continuel ensuite; raideur spasmodique des membres; éruption abondante île taches i lenticulaires, ;\ La sortie du bain; morl au onzième jour. — ri.Kj'.es Il 7
',)S 3' l'.U. 1 IL, SYMPTOMES.
elliptiques de L'iléutn épaissies, dures, ulcérées <>n non ulcérées; glati des mésentériques correspondantes volumineuses, rouges et ramollies; conduit cystique oblitère, etc.
Un garçon, âgé de seize ans, bien développé, d'une con- stitution assez forte, à Paris depuis trois moi fut conduite l'hôpital de la Charité, le 12 novembre 1822, dans un délire violent. M. le docteur Hervez de Chegoin qui lui avait donné des soins, me dit qu'il était malade depuis huit jours, que l'affection avait débuté par des maux de tête, des douleurs contusives dans les membres et dans les lombes, une fièvre assez forte, qu'il y avait du délire et du dévoiemenl. depuis trois jours. Dans la nuit du 12 au 13 le délire fut violent, le malade poussa des cris, accabla les sœurs d'injures. Le 13, à l'heure de la visite, il répondait à ceux qui lui demandaient son nom qu'il ne le savait pas; ses paroles étaient presque constamment d'ailleurs inintelligibles, l'ouïe paraissait fuie, la physionomie n'offrait rien de remarquable, les lèvres et les dents étaient sèches, la langue brune et rugueuse, le ventre météorisé, insensible à la pression ; le pouls petit et serré, à cent vingt- trois ; la respiration courte, à quarante- quatre ; la toux rare, le bruit respiratoire mêlé de râle sec et sonore, des deux côtés de lu poitrine et en arrière. Le malade refusait souvent de boire, el on remarquait quelques taches roses, lenticulaires, sur l'abdomen. (Orge éd. ; pétil- lait tamar. bis; km. lin bis ; vésic. aux jambes.)
Le délire continua, il n'y eut pas de selles dans la journée, et, dans la nuit, le malade iitde continuelsetlnrts pour sortir du lit. Le 14 : persistance du délire, front plissé; le malade s'oppose à ce qu'on l'examine, frappe ceux qui veulent lui tàler l«- pouls, grogne dès qu'on le touche dans quelque par lie du corps ijiir ce soit ; | urine osl involont lire.
TACHES ItOsLJj, LENTICULAIRES. 99
Le 15, aucun changement appréciable. — On ordonne un bain.
Le malade y fut très agité ,• je le vis comme on l'en sortait, et alors sa peau était généralement injectée ; les taches ty- phoïdes, ou lenticulaires, rares avant le bain, étaient extrê- mement nombreuses, conlluentes dans plusieurs points, ré- pandues sur tout le tronc et môme sur les membres.
Il y eut quelques selles dans la journée, et beaucoup d'a- gitation pendant la nuit. Le 16, au matin, cette agitation était continuelle, la figure décolorée, les bras raides, l'érup- tion aussi abondante que la veille, mais d'une couleur moins vive-, le pouls (Mail extrêmement faible, d<: manière à ne pouvoir pas en compter les battements ; et à onze heu- res et demie, une heure après avoir quitte le malade, il expira.
OCVBRTURE DU CADAVRE VINGT-UNE HEURES APRÈS LA MORT.
État extérieur. Vergelures nombreuses en arrière et suv les côtés du corps, raideur cadavérique considérable ; mus des fermes, non poisseux. — Glandes inguinales rouges et volumineuses.
Tête. Traces d'infiltration sous-arachnoïdienne; une petite cuillerée de sérosité dans chacun des ventricules latéraux ; six dans les fosses occipitales inférieures. Cerveau ferme et très injecté.
Cou. Glandes cervicales rouges et volumineuses, sans ra- mollissement marqué. Larynx dans l'état naturel. Mem- brane muqueuse de la trachée -artère rouge, intérieurement, d'ailleurs saine.
Poitrine. Deux cuillerées de sérosité claire dans le péri* carde. Cœur et aorte dans l'étal naturel : beaucoup de sarig,
100 3r PARTIE, SYMPTÔMES.
liquide dans l'aorte. — Poumons libres, d'un rouge assez vif, d'ailleurs sains, sauf le lobe inférieur droit qui était lourd , dense, difficile à déchirer, entièrement privé d'air, non grenu, d'un rouge-brun, et contenait très peu de liquide. — Les bronches étaient de la même couleur que les parties du poumon auxquelles elles répondaient , minces et saines. abdomen. L'œsophage était dans l'état naturel. — L'esto- mac avait un médiocre volume. Sa membrane muqueuse était rouge autour du cardia, légèrement nuancée de rose ailleurs , un peu mamelonnée dans la plus grande partie de son étendue, non épaissie, un peu ramollie dans le voisi- nage du pylore, dans la longueur de 80 millimètres. — Le duodénum n'offrait rien de remarquable. — La membrane muqueuse de l'intestin grêle était injectée et un peu épaissie dans quelques points , généralement ramollie à un médiocre degré ; elle offrait , dans le voisinage du cœcum , dans la longueur d'un mètre , des plaques elliptiques placéesà l'op- positedu mésentère, plus ou moins rouges et inégales, de 27 à 65 millimètres, dansleur grand diamètre, de 3 millimètres, un peu plus ou un peu moins, d'épaisseur. La muqueuse était détruite sur quelques-unes de ces plaques , dans une petite étendue , épaissie et ramollie dans le reste, de manière à ne pouvoir être enlevée par traction. Au-dessous de cette mem- brane se trouvait une matière homogène, blanchâtre, jau- nâtre, ou nuancée de rose, développée «lins le tissu cellu- laire sous-muqueux ; ce dont il était facile de se convaincre au pourtour des plaques, où l'on voyait ce tissu se bifur- quer pour recevoir, dans l'écartement de ses lames, la ma- lien'indiquée. La surface des plaques, non ulcérées, était inégale, comme l'enveloppe ligneuse des amandes sèches; ce qui prov< naît de l'élargissement des orifices des cryptes. —La membrane muqueuse du gros intestin était dans l'étal
TACHES ROSES, LENTICULAIRES. 101
naturel, à pari quelques points du colon droit etde la réunion du gauche avec le transverse , où elle était rouge , ramollie et épaissie par petites taches, plus ou moins étroitement ul- cérée. — Les glandes mésentériques avaient généralement un volume considérable, surtout dans le voisinage du cœ- cum où elles étaient rouges et très ramollies. Quelques-unes des mésocolites étaient aussi le siège de la même altération. —Le foie était sain , la vésicule biliaire très distendue par un liquide de la couleur et la consistance de l'urine -, le conduit cystique était oblitéré, à 15 millimètres du col de la vésicule , et transformé, dans la portion oblitérée (longue de 18 millimètres) , en une matière cartilagineuse. — La rate était au moins triplée de volume ; — le reste sain.
Si l'on se rappelle qu'avant le bain les taches roses, lenti- culaires, étaient assez rares , qu'elles étaient très nombreu- ses au moment où le malade en sortit ; si j'ajoute que cette éruption était plus abondante ici que dans aucun des cas où je l'ai observée, on ne pourra guère se refusera croire, comme je l'ai annoncé, qu'elle ait été provoquée, en grande partie , par l'action du bain.
D'ailleurs, bien que je n'aie pas recherché si le malade avait eu ou non des douleurs de ventre , il n'en est pas moins évident qu'ici encore l'affection a suivi sa marche accutumée, et que, suivant toutes les probabilités, l'intestin grêle était le point de départ de tous les symptômes. En ef- fet, les lésions de cet organe étaient profondes et déjà ancien- nes, lors de l'autopsie , très certainement antérieures au de- but de la diarrhée, puisque celle-ci n'existait que depuis six jours, lors du terme fatal, et que, dans aucun des cas où l'intestin .mèlea été indubitablement le point de dé- part , on n'a observé d'ulcérations de ses plaques après un
1<l2 '> i> \n in. >i mi'M'M i s.
espace de temps si cuurl. D'un autre cote, si le début de la diarrhée devait être considéré, dans le cas actuel, comme étant le môme que celui de l'altération des plaques de Peyer, il faudrait aussi admettre que les tachesexistaient au quatrième jour de l'affection de Tiléum ; c'est-à-dire plutôt que je ne l'ai observé , dans aucun des cas où le début des premiers symptômes coïncidait évidemment avec celui de l'altération des plaques elliptiques de Peyer.
La marche de la maladie étant bien déterminée , on peut se demander si l'état des organes rend suffisamment compte de la mort ; car aucune des lésions observées n'était extrê- mement grave. Le nombre des plaques altérées de l'intestin grêle c'était pas très considérable, la muqueuse intermé- diaire n'était pas très ramollie : celle de l'estomac n'était pas profondément altérée, et celle du gros intestin, sauf quelques points rouges ulcérés ou non ulcérés, était saine. Mais si la membrane muqueuse de l'intestin grêle était peu ramollie, elle l'était dans toute sa longueur, et elle étaitépais- sie dans un assez grand nombre de points : le ramollisse- ment et l'état mamelonné de la muqueuse gastrique avaient lieu dans une étendue considérable : la rate, si elle n'était que médiocrement ramollie, était très volumineuse : et si l'on remarque que toutes ces lésions se sont opérées en fort peu de temps, on pourra trouver, dans leur réunion , une (anse suffisante de mort.
Ces! in d'ailleurs le cas de se rappeler ce qui a été dit au sujet des Ponctions cérébrales et du délire en particulier. Bien qu'on ne puisse eu trouver la cause matérielle dans quelques lésions appréciables du cerveau, il faut néanmoins en tenir compte dans la recherche des causes qui ont amené
la mort; le trouble d'une fonction importante avant à peu
rACMF.s i o-i - . m s tiw i.iinr. I OH
près le môme effet, quelle qu'en soi I la 60urce, quand il est profond.
L'habitude de considérer comme critiques, beaucoup de phénomènes accessoires qui se développent dans le cours des maladies aiguës, fera peut être attribuer le môme caractère aux taches roses, lenticulaires, dont il s'agit. Ce serait, tou- tefois, porter bien loin le respect pour l'usage; ces taches ayant ordinairement lieu à une époque assez voisine du dé- but , loin de celle où la maladie doit se terminer heureuse- ment ou malheureusement, quand elle n'est pas encore à son état, comme on dit; ou seulement au début de cette pé- riode. Evidemment, les taches roses, lenticulaires, ont tous les caractères des symptômes secondaires étudiés jusqu'ici ; elles offrent, comme eux, beaucoup de variations relatives à leur nombre, à leur début, à leur durée; de manière qu'il n'est pas possible de les considérer sous un autre point de vue. Seulement, à raison de leur fréquence extrême dans l'affection typhoïde, il faut reconnaître qu'elles ont ici quel- que chose de spécifique, plus encore que les altérations de la rate, qui ne sont pas propres à l'affection qui nous occupe spécialement.
2° Chez les sujets atteins d'affection lyplwule, qui ont guéri.
Tous les sujets , hors trois , dont l'affection fut grave (cin- quante-sep! et qui ont guéri, eurent des taches roses, len- ticulaires, il est d'ailleurs digne de remarque que deux de ces trois sujets n'arrivèrent qu'aux quatorzième et quaran- tième jour de l'affection , c'est-à-dire à une époque où les taches avaient peut-être disparu : et (pie chez l'autre je ne les ai cherchées «pie du septième au onzième jour de la maladie, après lequel l'éruption se manifeste encore assez
101 3' PABYlF, SYMPTOME?,
souvent. Dr* manière qu'on peut se demander si l'exception indiquée ne serait pas plus apparente que réelle ; et avec d'autant plus de raison, que cette éruption eut lieu dans tous les cas où l'affection typhoïde fut légère.
Comme chez les sujets qui ont succombé , on n'observait, dans quelques cas, qu'un petit nombre de taches, cinq à six sur la poitrine et sur l'abdomen, soit simultanément, soit successivement. Dans d'autres, au contraire, l'éruption était fort abondante. Elle avait ce caractère chez douze sujets, dont trois offraient aussi des taches roses, lenticulaires, aux membres, dans le voisinage du tronc.
Le développement de l'éruption était successif, sa dispari- tion souvent très lente, sa durée moyenne huit jours et demi ; les termes extrêmes de cette durée trois et quinze jours. Ce dernier fait montre qu'il n'est pas nécessaire , pour s'as- surer de l'existence ou du défaut des taches lenticulaires, d'observer la surface du corps tous les jours, qu'on peut se borner à faire cet examen trois à quatre fois la semaine, avec la certitude que l'éruption n'échappera pas, si elle a lieu.
Le début de l'éruption des taches roses, lenticulaires, était sensiblement le môme ici et dans les cas où l'issue de la ma- ladie avait été funeste; deux fois je les ai observées au sixième jour do l'affection , trois fois au septième; chez la troisième partie des individus, au dixième.L'éruption débuta du vingtième au trentième jour chez dix sujets.
Elle eut lieu , comme je le disais tout à l'heure , dans tous les cas où l'affection l'ut Ugèrej et ce fait n'est pas seulement l'indice que les taches dont il s'agit ont lieu chez tous ou presque tous les sujets atteints de l'affection qui nous oc- oupej il moiili*; encore que leur cause est spéciale, diffé- rente de celle qui préside au développement des autres
TACHES ROSES, TENTICUMIRES. 105
phénomènes secondaires ; la fréquence et la gravite de ceux- ci étant proportionnées à la gravité de la maladie et au mou- vement fébrile.
Le début , l'abondance et la durée de l'éruption ne va- riaient pas moins d'ailleurs chez les malades dont il s'agit, que dans les cas précédents. Je ne l'ai observée qu'une fois au sixième jour de l'affection , une fois le neuvième , trois fois le dixième, deux le onzième ; terme moyen à une époque de la maladie un peu plus avancée que dans les cas où les symptômes étaient graves. — Les termes extrêmes de sa du- rée étaient trois et dix-sept jours ; le terme moyen sept. C'est-à-dire qu'ils étaient à peu de chose près les mômes que dans les cas graves.
Il ne m'est arrivé que bien rarement , depuis dix années, de ne pas trouver détaches roses, lenticulaires, dans le cours de l'affection typhoïde. Cependant cette éruption a manqué trois fois sur trente cas de cette maladie observés à la Pitié, dont j'ai rendu compte dans mes conférences cliniques, chez des sujets observés tous les jours avec exactitude, à comp- ter dos septième, huitième et quinzième de l'affection. Elle a manqué deux fois sur vingt-quatre malades observés avec non moins d exactitude, à l'Ilôtel-Dieu, dans ces derniers temps. J'ajoute que la durée et le début de l'éruption n'ont pas moins varié dans ces deux groupes de faits que dans les précédents; que, dans un cas , les taches roses, lenti- culaires, ont paru dès le cinquième jour de la maladie ; que, dans un autre, elles ont persisté pendant vingt-cinq-, ter- mes extrêmes que je n'ai pas vu dépassés depuis.
Dans Venfance, les taches roses, lenticulaires, ne sont pas moins fréquentes que chez l'adulte-, ainsi, sur cent vingt-un
ldfi '.V PARI II, S> MPTÔMKS.
cas d'affection typhoïde observés dans le premier âge, M. Taupin n'a vu manquer cette éruption que onze fois, et parmi ces cas s'en trouvent trois relatifs à des sujets qui vinrent à l'hôpital trois semaines et plus après le début de l,affection, chez lesquels, par conséquent, les taches avaient bien pu disparaître. M. Rilliet ne les a observées que dans les deux tiers des cas, sans dire si cela tenait, comme cela est très probable , à l'arrivée tardive des petits malades à l'hôpital.
Quant au début de l'éruption , il parait un peu plus rap- proché de celui de la maladie dans l'enfance, au moins dans la généralité des cas, que dans un âge plus avancé. Ainsi, suivant M. Rilliet et M. Taupin , ce début a généralement lieu du quatrième au huitième jour de l'affection , quel- quefois plus tôt , quelquefois plus tard. De manière que M. Taupin assure avoir observé les taches typhoïdes chez quelques enfants, dès le deuxième jour de la maladie.
Disparaissant quelquefois après un ou deux jours de du rée, ces taches ne persistaient pas au-delà de huit jours, dit M. Rilliet, chez les petits malades soumis à son observation. Le môme médecin assure que cette éruption est généra- lement peu abondante dans le premier âge de la vie; que néanmoins elle était considérable chez quatre des sujets soumis à son observation, au point que chez l'un deux elle revêtit le caractère d'un exanthème gênerai. Des faits sem- blables ont été observés par M. Taupin, qui rapporte que chez trois de ses malades l'éruption fut considérable; qu'on crut, pendant trois jours, à l'existence d'une variole con- fluentc. Faits précieux, etqui montrent avec beaucoupd'au- tres combien la réserve esl nécessaire dans le diagnostic de quelques maladies aiguës à leur début. Al. Taupin n'a jamais rencontré les taches lenticulaires
t w ni s toi i -. if- ru i i m ii 10?
que chez les enfants atteints d'affection typhoïde; et il as- sure que si M. Becquerel les a vues plusieurs fois dans le cours de la méningite , il ne les a constatées , lui , dans au- cun cas de cette espèce, bien qu'il en ait observé plus de deux cents.
2' Chez les sujets atteints de maladies aiguës non typhoïde.
Je n'ai , malheureusement , examiné la surface du corps des sujets affectés de ces maladies, que dans un petit nom- bre de cas; mais comme les résultats numériques ont tou- jours leur importance, voici ce que j'ai observé relative- ment à l'éruption qui nous occupe. De cinquante sujets atteints de péripneumonie, d'angine, de diarrhée, de rhu- matisme, de catarrhe pulmonaire, de fièvre d'accès, de pleurésie, de gastro-entérite, d'embarras gastrique, et chez lesquels j'ai recherché l'existence de l'éruption, douze, ou un peu moins de la quatrième partie, offraient des taches roses, lenticulaires, à une certaine époque de l'affection. Ces cas étaient distribués de la manière suivante : un sur deux peripneumoniques qui succombèrent ; deux sur douze diar- ihéiques, un sur trois rhumatisants, trois sur huit sujets atteints de catarrhe pulmonaire, un sur quatre, de ceux qui eurent une gastro-entérite; quatre sur dix individus qui offrirent les symptômes de l'embarras gastrique plus ou moins prolongé. — L'éruption fut très peu abondante dans ces douze cas.
Ces derniers faits, il faut que je le dise, ne doivent pas inspirer une entière confiance au lecteur ; car . depuis la publication de cet ouvrage, j'ai vainement cherché los ta- ches dont il s'agit , chez nombre de malades atteints d'affec- tions aiguës autres que l'affection typhoïde; et je présume
108 3' PARTIE, SYMPTÔMES.
qu'étant moins familiarisé, il y a dix ans, avec les taches ty- phoïdes, qu'aujourd'hui, j'aurai confondu de simples papu- les avec l'éruption qui nous occupe-, ce qui explique la contradiction apparente que je viens de signaler. C'est, au reste, une question à étudier de nouveau.
2° Des sudaimna. 1° Chez les sujets morts d'affection typhoïde.
Ces vésicules , formées par l'accumulation d'un liquide incolore et transparent, sous l'épiderme, avaient une forme et des dimensions variées. Petites , ou de la largeur d'un demi à 2 millimètres, elles étaient arrondies; plus larges, ou de 3 à 4 millimètres dans leur grand diamètre, quel- quefois plus, elles étaient oblongues, comme les larmes dont elles avaient tout l'aspect quand leurs dimensions étaient considérables. — Généralement plus nombreuses au cou et dans le voisinage de l'articulation seapulo-huméralo que partout ailleurs, elles couvraient une grande partie du corps dans un cas où elles étaient fort aplaties; et, dans ce cas, l'épiderme s'enlevait par le plus léger frottement dans leur intervalle, comme cela arrive quelquefois sur le cadavre de certains sujets, de ceux qui ont succombé à quelque maladie éruplive principalement (obs. 16).
Les sudamina ne furent pas, à beaucoup près, dans un rapport constant avec les sueurs: ils étaient quelquefois en raison inverse de celle ci, nombreux quand elles avaient été peu abondantes, et réciproquement. Les sueurs n'étaient donc pas la circonstance la plus importante de celles qui concouraient à leur développement \ en sorte qu'il faut ad- mettre qu'ils tiennent à un état de la peau, non encore ap-
SDDAMINA. 10/J
précié jusqu'ici. Sous ce point de vue les sudamina me sem- blant un fait de beaucoup d'importance dans l'histoire de l'affection typhoïde. Par une fatalité que je ne saurais as- sez regretter, je ne les ai recherchés que chez neuf sujets, dont six seulement , ou les deux tiers, m'en ont offert une plus ou moins grande quantité. Et néanmoins cette propor- tion, tirée d'un si petit nombre de faits, est bien probable- ment, comme on le verra tout à l'heure, celle que donnerait encore l'examen d'un nombre de faits plus considérable.
La durée des sudamina variait de trois à dix jours. — Je ne lésai observés, avant le douzième de l'affection, dans aucun cas.
2° Chez les sujets atteints d 'affection typhoïde, qui oui guéri.
Les sudamina eurent lieu chez quatorze des vingt-un su- jets dont la maladie fut grave , et chez lesquels j'ai recher- ché leur existence avec soin; c'est-à-dire dans la même pro- portion que chez ceux qui succombèrent. Comme chez ceux-ci, je ne les ai pas observés avant le douzième jour de l'affection-, ils étaient tantôt rares, tantôt nombreux. Deux fois je les ai vus couvrir la plus grande partie de la surface du corps; et, dans leur intervalle, l'épidémie s'enlevait par le moindre frottement , laissant à nu le derme humide, avec une faible nuance rose , bientôt plus vive. Enfin , comme chez les sujets qui ont succombé, les sudamina n'étaient pas non plus dans un rapport constant avec les sueurs, à beaucoup près.
La proportion des cas dans lesquels il y eut des sudamina était encore la même chez les sujets dont l'affection fut le- gère. Huit, sur treize, en offraient un plus ou moins grand
110 3* PARUE, syjlptômes-
nonibre; mais ils ne furent très multipliés chez aucun d'eux. Chez aucun aussi on ne put enlever répiderme, dans leur in- tervalle, avec la facilité dont il a été question tout à l'heure. Cette différence, bien que légère, me semble venir à l'appui de ce que j'ai dit sur la condition principale du développe- ment des sudamina , une altération inconnue de la peau, qui doit être plus développée dans les cas où l'affection est grave, que dans ceux où elle est légère.
De ce que les sudamina sont aussi fréquents dans les cas où la maladie est légère, que dans ceux où elle est grave . faut il en conclure que cette éruption a, comme celle des taches roses , lenticulaires, quoique à un moindre degré, quelque chose de spécifique dans l'affection typhoïde?
Je n'ai pas observé moins fréquemment les sudamina , chez Jes sujets atteints d'affection typhoïde , depuis dix an- nées, qu'auparavant, soit à l'Hôtel-Dicu , soit à la Pitié- Sur quatre-vingt-dix-huit cas dans lesquels ils ont été recher- chés par M. Barth ou par moi, dans ces deux hôpitaux, soixante- seize sont l'exemple d'une éruption plus ou moins considérable de ces petites vésicules ; et, dans ces cas comme dans ceux qui précèdent, il n'y eut pas , il s'en faut de beau- coup, proportion entre l'abondance des sudamina et celle des sueurs; de manière que celles-ci étaient quelquefois très peu abondantes chez les sujets qui offraient une éruption confluente de sudamina.
Les sudamina ne sont pas moins fréquents dans l'enfance qu'après quinze ans. M.Rilliet les a rencontrés dans les deux tiers des cas, H M. Taupin. sur cent quatre descent vingt-un sujets dont il a recueilli l'histoire, tantôt discrets, tantôt confluents. — Suivant 31. Taupin , les sudamina se dévelop-
SLDA.Ml.W. 111
pent à peu près indistinctement à toutes l<\s époques de l'af- fection typhoïde des enfants, le plus ordinairement néan- moins à la lin. Suivant M. Rilliet, c'est du dixième au ving- tième jour qu'ils apparaissent ; de manière qu'il ne les a observés qu'une fois le cinquième , deux fois le septième , une fois le huitième, et après le vingtième jour dans trois cas.— La duréede cette éruption, chez les enfants, est, d'après M. Rilliet, d'un à six jours.
La desquamation de Tépiderme eut lieu, dans une étendue variable, dans quelques cas d'affection typhoïde grave, heureusement terminée , même chez des malades qui n'eu- rent point de sudamina.— Comme ceux-ci, cette desquama- tion indique sans doute une altération antérieure de la peau, et je regrette beaucoup de ne pas l'avoir recherchée plus souvent.
3° Chez les sujets atteints de maladies aiguës, non typhoïdes.
De quarante sujets qui eurent des transpirations abon- dantes, et chez lesquels les sudamina ont été recherches avec soin , trois seulement m'en ont offert; un sur six ma- lades atteints d'entérite, deux sur cinq qui eurent la scar- latine. Les affections dans le cours desquelles je n'en ai point observé sont les lièvres d'accès, le cararrhe pulmo- naire , la péripneumonie , etc.
Si l'on ne peut pas avancer que les sudamina soient propres à l'affection typhoïde, au moins est-il vrai de dire qu'ils sont beaucoup plus communs dans son cours que dans celui des autres affections aiguës; et la rareté des sudamina chez des sujets atteints de ces maladies, et qui avaient eu des sueurs copieuses, confirme les précé lentes inductions sur la con- dition la plus importante du développement Hes sikUtnina.
U- 3' PAIT1E, SYMPTOMES.
Un fait observé dernièrement par moi , à l'hôpital Beau- jon, donne un nouveau degré de certitude à ces inductions qui ne sont , malgré l'assertion contraire d'un contempo- rain, que l'expression des faits. Je veux parler d'un homme d'une quarantaine d'années, d'une constitution assez forte, qui fut pris, au milieu de l'été, d'un érysipèle au bras droit, qui se termina par suppuration. Cet érysipèle parcourut successivement le dos, la poitrine , les membres supérieurs et inférieurs, et enfin la tête. Arrivé sur les parties latéra- les du tronc, il était précédé, dans les parties qui allaient en être le siège, par des sudamina d'un volume médiocre (1 ou 2 millimètres de large) assez nombreux. Mais, au moment où l'érysipèle abandonna la poilrine et la tète, ces parties furent couvertes, du jour au lendemain , après une sueur assez légère, d'énormes vésicules, remplies d'un liquide transparent, incolore, sans rougeur aucune à leur pourtour, ayant tout à fait le caractère des sudamina; dont plusieurs étaient plus larges que l'extrémité du pouce et communi- quaient largement entre elles; de manière qu'on faisait re- fluer, sans peine, la sérosité qu'elles contenaient, des unes dans les autres. Il y avait à peine quelques points de la face antérieure delà poitrine dont l'épidémie ne fut pas sou- levé, et le moindre frottement de l'extrémité du doigt suf- fisait pour l'enlever, comme cela a lieu dans quelques cas graves de fièvre typhoïde. Comment ne pas voir, dans le fait dont il s'agit, la preuve que l'état particulier de la peau, indépendamment des sueurs, a une grande influence sur le développement du sudamina ?
tn autre fait rend cette assertion plus évidente encore, s'il se peut; c'est que dans la suellc miliaire, les sudamina, si l'on en croit les observations recueillies par M. Rayer, sont rares.
ÉaYSipi:Lç< 1 13
3° De l'érysipèle . 1° Chez les sujets morts d'affection typhoïde
L'érysipèle eut lieu chez six sujets, et l'inflammation se propagea rapidement, chez quatre d'entre eux, au tissu cel- lulaire sous-cutané.— Quatre succombèrent du vingt-qua- trième au trentième jour de l'affection , deux au-delà.
L'érysipèle fut peu considérable, disparut après deux jours de durée, dans deux cas. — Le nez en lut le siège ex- clusif, du dixième au vingt-unième jour de l'affection, dans l'un 5 dans l'autre . l'inflammation passa du nez à l'un des genoux, et elle les occupa successivement, pendant vingt- quatre à trente-six heures (obs. 19). Il n'y en avait pas de traces à l'ouverture du cadavre, bien que la mort en eût suivi le développement de très près.
Dans les cas où l'érysipèle fut grave, il se manifesta quatre, dix et vingt-huit jours avant le terme fatal. — Il eut une marche très rapide chez un sujet dont je vais donner l'histoire, et se termina par gangrène chez un autre, comme nous l'avons vu antérieurement. — Les symptômes géné- raux offrirent peu de changement à son début : des tis- sons eurent lieu dans un cas (obs- 39), un peu de délire dans un autre : le pouls devint plus accéléré qu'aupara- vant chez un sujet (obs. 16).
XXXIX* OBSERVATION.
Frissons, anorexie, nausées, soif, èpistaxis, diarrhée au début ; puis, affaissement, météorisme, fttour de l'épistaxis, augmentation de l'af- faissement; plus tant, frissons, délire, érysïpèle à [a jambe el à la cuisse droites ; morl au vingt-huitième jour. — Erysipèle phlegmo- neux de la cuisse et de la jambe droites ; plaques elliptiques de 1 i- II 8
114 3' PAUSIKj a\MP10MLS.
léum grisâtres, rougeâtres et bleuâtres, ulcérées ou non ulcérées;
glandes mésentériques correspondantes de même couleur, médiocre- ment volumineuses et ramollies, etc.
Un garçon de bureau, âgé de vingt-trois ans, un peu maigre, d'une taille asssez haute, d'un caractère vif, fut admis à l'hôpital de la Charité le 23 décembre 1823. A Paris pour la troisième fois , depuis six semaines , il n'y était venu qu'avec répugnance, y ayant toujours été un peu malade. Il avait presque constamment la diarrhée depuis plus d'un mois, se disait souffrant, et gardait le lit depuis douze jours , ayant déjà des maux de tête, depuis quelque temps, à cette époque.
Au début: frissons, épistaxis abondante, anorexie, nau- sées, augmentation de la soif, déjà plus forte que de cou- tume depuis cinq semaines. Le mal de tête'diminua peu à peu , l'épistaxis se renonvela plusieurs fois, toujours consi- dérable, et il en fut de même des frissons. Il y eut des dou- leurs à l'epigastre , des coliques dès le premier jour ; et, dans les six derniers, un peu de toux, des crachats sanglants, quelques douleurs de gorge , de la gène dans la déglutition. L'assoupissement fut presque continuel dès le début.
Le 24 : affaissement, décubitus, tantôt latéral, tantôt dor- sal, mémoire débile; et néanmoins les détails qui précè- dent, et qui m'avaient été donnés par le malade, furent con- firmés par son père, le lendemain; réponses extrêmement lentes , arrachées pour ainsi dire ; assoupissement dès que l'attention cesse d'être soutenue par des questions ; ni cé- phalalgie, ni douleurs dans les membres; langue un peu rouge à la pointe , nette et presque sèche ; soif vive , déglu- tition facile, encore qu'il y ait des douleurs àe gorge avec tension eï rougeur lU Vôtle du palais; ventre légèrement mété'nisé, epigaslre sensible a la pression^ deux setlefe ;
BBYS1P&LE. 11Ô
pouls petit, faible, â quatre-vingt-quatre-, chaleur peu éle- vée, douce : quelques crachats peu aérés, d'un rouge noir; toux rare, bruit respiratoire naturel. (Pot. rj»mm.\ orge av. sir. fart. bis. ; in fus. de kk. ; lav. de kk. camph.
L'assoupissement fut médiocre, et il y eut des épistaxis assez copieuses dans la journée Le 35 : même lenteur dans les réponses, un peu moins d'accablement «jue la veille, constipation, pouls à quatre-vingt-douze; pas d'autres changements. (Deux resic. aux jambes.)
Du 26 au 29 l'abattement augmenta , le. malade ressem- blait, pour ainsi dire , à un corps inerte ; la somnolence fut presque continuelle, il y eut des épistaxis, et la lèvre supé- rieure fut épaisse et tendue. Les 27 et 28, les selles augmen- tèrent, et il y en eut neuf dans la journée du 28 ; la soif fut vive, la langue presque naturelle, le ventre plat et indo- lent, le pouls médiocrement accéléré, la chaleurforte.il y avait des taches roses, lenticulaires, un peu saillantes sur l'abdomen, le 26; elles firent des progrès les jours suivants. L'infusion de quinquina fut supprimée le 30, et il y eut douze selles dans la journée. Le 31 : affaissement médiocre, exercice de l'intelligence incomplet, pouls petit et faible, à cent,- chaleur peu élevée -, langue humide. (In fus. de kk. M. bis. ; pot. av. rin et sir. de kk. aa 60 (/ranimes et suif, de k. 2 gratmnes ,• fom. d'alk. camph. -, vésic au cou.
L'abattement fut un peu moindre du 1<" au 3 janvier. Le malade ne prit que moitié de sa potion le jour où elle lui fut prescrite , et cette potion excita des nausées, puis quelques vomissements. La langue fut blanche le 1" jour, ronge et sèche les 2e et 3e : le ventre toujours indolent, tes selles au nombre de six à huit dans la journée; le pouls petit et fai- ble, a cent vingt, puis a cent six. Le:> : air de malaise et de dégoût , nulles douleurs lèvro»
116 3e PARTIE, SYMPTÔMES.
supérieure toujours tendue et épaisse , langue rouge , sèche et râpeuse , bruit respiratoire naturel ; légère excoriation au grand trochanter droit . rougeur vive à la région du sacrum. (Suppression des amers ; trois tasses de vin.)
Dans la journée ; frissons et tremblements , selles nom- breuses ; le 4 , aucun changement , même absence de dou- leurs.
Il y eut, par intervalles, un peu de délire et d'agitation le jour et la nuit. Le 6 : expression de dégoût, rougeur au genou droit et dans son voisinage , à la partie externe de la cuisse , avec une légère augmentation de son volume, sans tension bien marquée de la peau; nulle douleur dans cette partie ; pouls à cent vingt-huit , respiration médiocrement fréquente.
La soif fut très vive, il y eut une selle involontaire pen- dant la nuit. Le 7, au matin .j'observai de la somnolence et de la raideur au bras gauche ; le ventre était très météo - risé ; le reste comme la veille. (Bain de six minutes. )
Le malade se trouva bien au bain et eut du délire toute la nuit. Le 8, ses traits étaient affaissés, sa ligure pâle, ses bras raides, le gauche principalement; la rougeur du genou droit s'étendait à une grande partie de la cuisse et de la jambe correspondantes ; la langue était humide, le pouls très accéléré; un peu de raie sonore existait du coté gau- che dr la poitrine, à sa partie postérieure.
Le 9, la parole était inintelligible, la cornée transparente couverte d'un enduit muqueux ; le pied droit , la jambe el la cuisse du môme côté étaient bleuâtres; l'épiderme de ces parties était soulevé dans plusieurs points, enlevé dans d'autres; la couleur bleuâtre, circonscrite dans une assez grande étendue , par une couleur rouge
ERYSIPFXE. 1 I *
Le malade mourut le soir, à six heures, sans avoir pu dire un mot à ses parents qu'il parut reconnaître cependant.
OUVERTURE DU CADAVRE TRENTE-SIX HEURES APRES LÀ MORT.
État extérieur. Tout le membre abdominal droit était plus ou moins augmenté de volume , plus ou moins rouge et li- vide, dépouillé d'épiderme dans plusieurs points ; la peau en était épaissie et durcie. A la partie externe de la cuisse et de la jambe droites, le tissu cellulaire sous- cutané était infiltré d'une sérosité roussàtre et purulente. Au pied , l'infiltration était sanguinolente et sans pus. La peau correspondante au vésicatoire de la cuisse droite était amincie et grenue ; elle était détruite à gaucbe, dans la plus grande partie de la plaie du vésicatoire. — Les glandes inguinales droites étaient volumineuses, rougeàtres , et offraient quelques points purulents.
Tête. L'arachnoïde était parfaitement saine ; on trouvait une petite cuillerée de sérosité dans chacun des ventricules latéraux , trois dans les fosses occipitales inférieures. La pie-mère était sans injection ; le cerveau dans l'état na- turel.
Cou. Le pharynx , l'épiglotte , le larynx et la trachée-ar- tère n'offraient rien de remarquable.
Poitrine. Il n'y avait ni épanchement, ni adhérences en- tre les poumons et les plèvres ; une fausse membranejaune, molle, peu étendue, existait sur le poumon droit. Ce pou- mon et le gauche étaient mous , d'un rose tendre à leur partie antérieure, d'une teinte rouge plus ou moins foncée en arrière, où ils avaient une consistance assez ferme, sans être ni engoués ni splénisés , ni hépatises. — Le cœur était d'un petit volume, parfaitement sain d'ailleurs ; l'aorte rem-
I I S .'>r PAl'TIl. >ï Mpl ÔMES,
plie de sang, d'une couleur naturelle. — Les veines pro- fondes de la cuisse droite ne contenaient pas de pus.
Abdomen. L'œsophage était pâle, offrait 35 millimètres au-dessus du cardia , et dans la hauteur de 45 , onze ulcé- rations ovalaires , verticales , de 4 à 6 millimètres dans leur grand diamètre , à bords pâles, faites comme avec un em- porte pièce. La membrane muqueuse correspondante était entièrement détruite , et le tissu cellulaire sous-muqueux légèrement aminci. — L'estomac était moins volumineux d'un tiers que dans l'état naturel , et il contenait un peu de bile. Sa membrane muqueuse était d'un jaune obscur mêlé de gris, dans le grand cul-de-sac; d'un gris nuancé de rose le long de sa petite courbure; d'un gris d'autant plus foncé dans le reste de son étendue qu'on l'examinait dans un point plus rapproché de la grande courbure; légèrement mamelonnée près du grand cul-de-sac, où elle était peu ramollie: d'une épaisseur et d'une consistance convenables ailleurs. — L'in- testin grêle contenait une médiocre quantité de mucus jaune. Sa membrane muqueuse offrait une infinité de pe- tits points gris, était grisâtre universellement, d'une bonne consistance, si ce n'est dans les 7 derniers décimètres de l'iléum, où elle était un peu ramollie. Des plaques ellipti- ques, placées à l'opposite du mésentère, à la fois grisâtres, bleuâtres et rougeâtres, minces à leur centre, épaisses de 2 miliim.'tresà leur pourtour, se trouvaient dans cette partie; et ce) epaisissi'ineul était du principalament au tissu cellu- laire sous muqueux , qui avait une couleur rougo-livide. La muqueuse qui lais ut partie de ces plaques était ramollie el amincie, ou détruite dans quelques points , et dans la largeur de 6 oùlui lèires, sur deux des plus voisines du pœ- cum _ Le gros intestin contenait une petite quantité de matières fécales pultacéei Sa membrane muqueuse était
; ■ i SIl'KU
J 10
pèle, un peu ramollie, ci offrait un certain nombre de erjfp-
tes grisâtres, aplaties, dont quelques-unes étaient légère- ment ulcérées dans le voisinage de la rate. — Les glandes mésentériques , correspondantes à l'iléum, étaient grisâtres et bleuâtres , du volume d'une noisette , médiocrement ra- mollies. — Le foie était sain ; la bile de la vésicule abon- dante, très liquide, d'un jaune-clair. — La rate était dans l'état normal, sauf un léger excès de volume.— Les autres viscères n'offraient rien de remarquable.
C'est seulement quatre jours avant le terme fatal que j'ai observé, pour la première fois, l'érysipèle , qui était alors borné au genou droit et au bas de la cuisse du même côté. En supposant qu'à cette époque il existât depuis deux jours, ce qui est indiqué par les frissons éprouvés parle malade , sa marche n'en aura pas moins été extrêmement rapide, et il est remarquable que malgré cette marche ra- rapide et la période avancée de l'affection à laquelle l'éry- sipèle se déclara , la peau qui en était le siège, était rouge , dure, épaisse, à l'ouverture du corps , et la rougeur bien circonscrite : nouvelle preuve de la persistance des caractè- res de l'inflammation après la mort , quand elle existe réel- lement dans les derniers jours de la vie.
Le malade n'éprouva aucune douleur dans la partie en- flammée, et cette absence de douleurdoit être remarquée, vu que si l'inflammation eût été profonde , qu'il n'eût pas été possible de voir l'organe enflammé, on n'aurait peut-être eu aucun moyen d'en reconnaître le siège; je ne dis pas l'exis- tence , les frissons , qui eurent lieu six jours avant la mort , pouvant faire soupçonner le développement d'une nouvelle lésion.
On ne saurait d'ailleurs considérer le vém'catoire delà
12(1 3r PARTIE, SYMPTÔMES.
cuisse droite comme la cause de Férysipèle, celui du cùté gauche, qui fut suivi delà destruction de la peau dans une étendue considérable, n'y ayantpas donné lieu ; et si les cau- ses occasionelles ont eu ici quelque influence sur le déve- loppement de l'affection, il serait plus naturel de les cher- cher dans le décubitus habituel du malade sur le coté droit. Mais ce qui prouve qu'il faut très peu attribuer ici aux causes occasionnelles , et notamment à l'irritation artili- cielle de la peau, c'est que l'érysipèle ne s'est développé dans aucun des cas dont il s'agit autour des vésicatoires , à quelque époque de la maladie et en quelque nombre qu'ils aient été appliqués."
Quant aux causes de la mort , la principale est évidem- ment l'érysipèle; car le nombre des plaques de liléum qui étaient altérées était peu considérable; et leur couleur, comme celle des glandes mésentériques correspondantes, indique que la nature suivait à leur égard , depuis quelque temps, une marche rétrograde. La membrane muqueuse <le l'intestin grêle, à parties 7 décimètres les plus voisins du.cœcum , était dune consistance et d'une épaisseur con- venables,1 celle du gros intestin n'offrait que quelques al- térations partielles, et l'état des autres viscères n'avait rien de remarquable.
La marche de la maladie fut encore la même que dans les précédentes observations, puisque les lésions de l'intestin grêle, qui avaient déjà rétrogradé au moment de la mort , étaient évidemment les plus anciennes. Toutefois, ici, comme dans d'autres cas dont il a été question plus haut, on peui se demander a quelle époque l'affection typhoïde a débuté, le malade ayant eu presque toujours du dévoiement depuis son arrivée à Paris, cinq semaines avant son admis- sion à l'hôpital. J'ai fixé cette époque au moment où des
ÉRYS1PÈLE. 121
symptômes généraux se joignirent à la diarrhée, et je crois cette fixation fondée; car un dévoiement sans fièvre, sans diminution évidente de l'appétit, sans le moindre symptô- mes cérébral, ne peut être rapporté à la lésion qui constitue lecaractère anatomique de l'affection typhoïde. J'ajoute que si le début de la diarrhée, si commune chez ceux qui arri- vent à Paris , suffisait pour établir celui de la maladie qui nous occupe , on devrait la faire remonter à une époque an- térieure, de cinq semaines, à l'admission du sujet à l'hôpi- tal; ce qui me parait inadmissible.
2° Chez les sujets atteints d'affection typhoïde, qui ont guéri.
Trois de ceux dont l'affection fut grave , eurent un érysi- pèle ; l'un au quinzième jour de la maladie , les deux autres aux trentième et quarante-cinquième; c'est-à-dire , dans ce dernier cas, au commencement de la convalescence. — La marche de l'érysipèle fut plus rapide dans ces cas que dans ceux où il se développe chez des sujets bien portants-, et, (liez deux femmes qui en furent atteintes, il eut son siège à la face, siège qu'il affecte le plus ordinairement quand il se déclare de prime abord. En sorte que le mouvement fé- brile ne fit que mettre en jeu , comme les causes les plus ordinaires, une prédisposition.
Aucun des sujets dont l'affection typhoïde fut légère n'eut d'érysipèle. in seul eut L'avant-bras droit d'un rouge assez vif, sans épaississement, sans dureté de la peau, pendant un jour, au vingtième de la maladie.
Ainsi, les lésions graves de la peau étaient , comme les altérations secondaires des autres organes, plus fréquentes chez les sujet* qui succombèrent . que chez ceux qui gin''-
|-22 3" partie, symptômes.
rirent , et. parmi ceux-ci, chez Les malades dont l'affection tut grave, que chez ceux qui n'éprouvèrent que de légers symptômes.
MM. Rilliet et Taupin n'ont probablement pas observé d'érysipèle dans le cours de l'affection typhoïde chez les en- fants , car ils n'en font pas mention ; et cela n'a rien de sur- prenant pour qui sait la rareté de 1 erysipèle dans le pre- mier âge.
3° Chez les sujets atteints de maladies aiguës, non typhoïdes.
Trois des trente-six pneumoniques qui ont succombé, eu- rent un erysipèle à l*un des bras, deux et trois jours après la saignée qu'on y avait pratiquée. — Bien que je n'aie rien observé de semblable , dans des circonstances analogues, chez les sujets atteints d'affection typhoïde, on ne peut guère douter que la saignée n'ait été, dans ces trois cas, la cause occasionnelle de l'érysipèle: mais aussi, cette faible cause d'un effet considérable atteste, il faut le dire, une pré- disposition extrême chez les sujets dont il s'agit, puisque dans nombre de cas de la même espèce, où des saignées ont été faites et des vésicatoires appliqués à une ou plusieurs reprises, la peau n'a pas été enflammée.
Un seul des cinquante-sept peripneumoniques qui ont guéri eut un erysipèle au bras, et encore à la suite d'une saignée. — La môme affection eut lieu chez un desdouzesu- jets atteints de variole qui ont guéri : et cette rareté de l'éry- sipèle, dans une maladie où la peau est partiellement enflammée dans une infinité de points, est une des, preu- ves les plus incontestables de la nécessité des prédisposi- tions, sans lesquelles les causes «le maladies, les pins éner-
if.ri'iioss \u.iiis. 1 Î3
giques en apparence , sonL sans action; comme les plus légères suscitent les affections les plus graves, quand elles s'appliquent à des sujets qui y sont très prédisposés. — Il y eut un érysipèle au nez, du neuvième au treizième jour d'une angine guttural? ; et au sein gauche, chez une femme atteinte d'un rhumatisme, au quarantième jour de l'af- fection.
4° Éruptions varices, plaies des vesicatoires, escliares.
Les éruptions variées dont il s'agit n'ont pas eu lieu dans le cours de l'affection typhoïde, au moins n'en ai-je pas fait mention dans mes notes , ce que je ne crois pas cependant une omission. Elles se montrèrent chez quelques-uns des sujets atteints d'autres maladies aiguës, de la manière sui- vante. J'observai des plaques semblables à celles dçYéry- thema marginatum . du douzième au quinzième jour d une affection rhumatismale ; une éruption ortiee, à peu près à la môme époque, dans un cas de catarrhe pulmonaire; — des boutons rouges, non suppurants , dans le cours d'un au- tre cas de rhumatisme; — des taches rouges de largeur va- riée, sans altération de la souplesse de la peau, du quatrième au neuvième jour d'une angine gutturale; — des boutons purulents ou des vésicules d'herpès aux lèvres, ou à la base du nez, ou dans d'autres parties du corps, dans sept cas d'erysipèle, d'entérite, d'angine, et de catarrhe pulmonaire; généralement au milieu du cours de ces affections, quel- quefois en-deçà, quelquefois au-delà, pendant un espace de temps qui a varié de trois à six jours. En sorte que ces di- verses éruptions débutaient à peu près à la même époque, à celle où se manifestent ordinairement les autres symptômes secondaires ; qu'il n'y a aucune raison , dès-lors, de les en-
124 3 PARTIE, SYMPTÔMES.
visager d'une manière différente ; que si ceux-ci ne sont pas critiques, les autres ne peuvent pas, ce me semble, être con- sidérés comme tels.
Chez les sujets atteints d'affection typhoïde grave qui ont guéri , la peau sur laquelle avaient été appliqués des vésica- foires offrit un plus ou moins grand nombre d'ulcérations, dans la huitième partie des cas; de sept à douze jours après leur application ; proportion moindre que chez les sujets qui ont succombé (1). La peau fut entièrement détruite chez une jeune fille dont l'affection traîna en longueur, et dont il a été parlé plus haut (2).
Les vésicatoires n'offrirent rien de remarquable chez les individus dont la maladie fut légère.-
La peau sur laquelle on les avait appliqués était superfi- ciellement ulcérée dans un cas de pleuropéripneumonie, où la suppuration était entretenue depuis plusieurs se- maines.
Comme les membranes muqueuses, la peau témoignait donc d'une profonde disposition à l'ulcération dans le cours de l'affection qui nous occupe spécialement, môme chez les sujets dont la maladie eut une heureuse issue.
Des eschares superficielles au sacrum eurent lieu , chez deux individus atteints d'affection typhoïde grave , qui ont guéri. Elles furent assez larges et profondes chez un autre, et se développèrent aux dix-neuvième et vingt-septième jour de l'affection. — Il n'y en eut chez aucun de ceux qui guérirent d'autres maladies aiguës.
Dans '['enfance, comme au-delà de quinze ans, les es-
(1) Pajf. r.Tti du premier Volume.
(2) Pag« :<; de ce v<A.
iiwsSo.Ns. Î2j
chares sont fréquentes dans les cas graves d'alï'ection ty- phoïde. MM. Rilliet et Taupin les ont observées dans une proportion à peu près égale ; M. Taupin chez sept des sujets qu'il a observés, toujours à une période avancée de la mala- die et dans la l'orme adyoamique , le plus ordinairement au sacrum. M. Rilliet a vu des eschares au sacrum chez deux sujets qui ont succombé, et chez trois qui ont guéri, du dix-septième au cinquantième jour de l'affection. Ces es- chares étaient ordinairement limitées et peu profondes.
ARTICLE IX.
Des symptômes fébriles, proprement dits.
Ces symptômes , dont l'ensemble forme ce qu'on est con- venu d'appeler fièvre, comprennent le frisson, la chaleur, la sueur et les différents états du pouls. Objet de l'attention de tous les médecins, ils doivent fixer la notre d'une manière spéciale, puisque, d'après ce qui précède, le nombre et la profondeur des lésions accessoires leur sont proportionnés; que l'altération de la circulation, à laquelle ils se rattachent en partie, semble en être la cause excitante. Nous allons les étudier successivement.
§ i-
Des frissons.
1° Chez les sujets morts d'affection typhoïde.
Trente-un des trente-trois sujets sur lesquels j'ai pu re- cueillir des renseignements exacts sur le point qui nous occupe, eurent des frissons; et tous, à six